Dans le cadre de l'ouverture de la nouvelle rentrée culturelle à l'espace El Teatro, le public a eu le plaisir d'assister à la représentation de la pièce « Cherche Saâdia désespérément » co-produite par El Teatro et Art Rue, mise en scène par Naoufel Azara avec l'assistance de Mohamed Saber Weslati. Ont joué dans cette pièce, les jeunes acteurs Yussor Galai, Leila Youssfi, Oumaima Bahri, Malek Zwaidi, Ghassen Hafsia, Nabil Hammami, Nabil Belhaj et l'enfant Tahar Chebbi. Tous ont fait preuve d'une bonne performance durant environ une heure, ayant réussi à incarner des personnages du 19ème siècle, époque où les hommes étaient encore victimes de l'esclavagisme et où la traite des noirs était encore un commerce prospère et lucratif pour les négriers.
« Boussaadia » est l'une des figures du patrimoine culturel tunisien. La légende populaire djerbienne raconte que ce personnage d'origine africaine représente un père dont la fillette prénommée Saâdia a été enlevée et vendue comme esclave. Alors, Il se déguise, se masque et va de village en village divertir les enfants dans l'espoir de retrouver sa fille parmi les enfants attirés par son spectacle. La pièce se repose sur cette légende qui puise ses racines dans la culture des Noirs en Tunisie, une minorité soumise, assujettie et vendue aux plus offrants des seigneurs de la ville. La légende n'est qu'une toile de fond pour dénoncer la soumission, la servitude et l'esclavage. La scène se passe à bord d'un navire accosté au port et dont le capitaine, un homme boiteux, passe pour le chef incontesté à bord. Il n'est autre qu'un pirate agressif et insolent qui met en vente son butin : des femmes et des enfants capturés ! Entretemps, apparaît Saâdia, folle de chagrin et d'amertume à la recherche de son père dont elle ne connaît aucune nouvelle depuis son enlèvement. Elle rencontre d'autres femmes esclaves sur le bateau, comme cette négresse enchainée et souffrante qu'elle aide à accoucher.
Mais il a fallu l'intervention d'Ahmed Bey qui abolit l'esclavage en Tunisie en 1847. D'où la dimension historique de cette pièce qui fait allusion à cette date importante dans l'histoire de Tunisie. Grâce à cette loi, la traite des noirs a été interdite. Depuis, les Noirs Tunisiens sont libres, égaux avec leurs concitoyens blancs. Cependant, Saâdia, l'héroïne, fière de vivre heureuse et dans la dignité, garde un peu d'amertume pour son père qui, un jour, fut enlevé par les pirates. La pièce se termine sur un ton d'espoir et d'optimisme : Saâdia reçoit les habits de son père qu'elle enfila et commença à danser aux rythmes des vieilles chansons de son père.