Silence du gouvernement face aux agressions dont sont l'objet les universitaires et les chercheurs A terme, l'obscurantisme rampant a pour objectif d'instaurer un ordre islamiste nouveau dans l'université
Les atteintes aux libertés académiques sont manifestes dans notre pays. Agression contre universitaires, menaces à l'endroit les chercheurs, des campagnes de dénigrement contre les enseignants, actes de violence au sein même des établissements...La liste des dépassements s'est rallongée. En fait, le phénomène prend plusieurs formes après la Révolution du 14 janvier, où l'on parle carrément d'atteinte contre les libertés les plus élémentaires : la liberté de penser, d'expression, et de culte...Ce constat soulevé par l'Observatoire des Libertés Académiques pour les Universitaires Tunisiens confirme la crise par laquelle passe l'Université, menacée plus que jamais par la montée des idées rétrogrades et obscurantistes. La persistance de cette situation risque de mettre en péril la recherche et plus particulièrement celle spécialisée en sciences sociales. La plainte déposée par deux jeunes étudiantes portant le niqab contre Habib Kazdaghli, le Doyen de la Faculté de la Manouba, les actes de violence survenus il y a quelques jours à la faculté des Sciences Sociales ne sont que quelques exemples de ce qui se passe dans l'Université Tunisienne, menacée de plus en plus par un sérieux recul. En fait, plusieurs dépassements ont été enregistrés par l'Observatoire des Libertés Académiques pour les Universitaires Tunisiens lors de cette phase transitoire marquée par des actes de violence dans tous les domaines et à travers le pays. Le bilan d'une année de travail est le moins que l'on puisse dire négatif. Atteinte aux libertés élémentaires, agressions physiques, morales, psychologiques, actes de violences perpétrés contre les enseignants et les étudiants...il s'agit de l'état des lieux constaté par les spécialistes qui sont visés aujourd'hui à cause de leurs idées. Ce sont d'ailleurs, les enseignantes qui sont menacées le plus par des groupes minoritaires, lesquels essayent de leur imposer leur diktat d'une manière ou d'une autre. Souvent violents, agressifs, influencés par des idéologies extrémistes, ils ne lésinent pas sur les moyens pour intimider les enseigant(es).
Et la loi ?
Par ailleurs, aucune mesure n'a jusque là été prise par le gouvernement pour assurer la sécurité des universitaires. Au contraire, l'Observatoire considère que les autorités de tutelle ne prennent pas au sérieux les dépassements enregistrés dans les enceintes des établissements. On parle même de la politique de deux poids deux mesures, où l'on évite de responsabiliser les agresseurs et condamner carrément les universitaires. Et pour preuve : l'affaire du Doyen de la faculté de la Manouba, où Habib Kazdhaghli se trouve dans l'obligation de comparaître devant le juge de première instance à cause des accusations de deux étudiantes portant le Niqab alors qu'il a avait fait l'objet de harcèlement et de perturbations dans son travail. Dans ce sens, l'observatoire critique les autorités de tutelle qui n'appliquent pas la loi en vigueur et n'assure pas la sécurité des fonctionnaires. Conscients de la gravité de la situation, les universitaires, les chercheurs et les défenseurs des libertés académiques et des valeurs universitaires essayent de mieux s'organiser pour se défendre contre toutes les formes de violence et la montée des idées rétrogrades. Des associations actives dans le domaine ont récemment été créées. Objectif commun : défendre le statut de l'Universitaire et du chercheur surtout en cette période critique où les islamistes tentent de mettre leur main sur nos universités afin de concrétiser leur projet social, à cela s'ajoute des contraintes politiques imposées par le gouvernement provisoire qui ne souhaite pas que les universitaires parlent librement ou mènent des recherches qui pourraient déranger les décideurs.
Sonia Naccache, coordinatrice de l'Observatoire des Libertés Académiques pour les Universitaires Tunisiens
«Des antennes fixées dans toutes les universités»
Créé en il y a presque deux ans (en 2010), l'Observatoire des Libertés Académiques pour les Universitaires Tunisiens, -actif sous la tutelle de la Fédération Générale de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (FGESRS)- a du pain sur la planche. Pour bien accomplir cette mission et veiller au respect des libertés académiques, les fondateurs ont déjà déterminé les procédures d'observation des atteintes qui pourraient avoir lieu dans les différents établissements universitaires. D'ailleurs, des antennes ont été fixées dans toutes les Universités à travers le pays et ce, pour recueillir les informations en cas d'atteintes, déclare Sonia Naccache, coordinatrice de l'Observatoire. Elle précise également, que des textes de sensibilisation ont été rédigés afin de définir les libertés académiques, quand est ce qu'elles sont entravées... « Un premier bilan a été présenté en juillet 2012, alors que nous sommes en train de distribuer actuellement le protocole d'observation à tous les universitaires », ajoute Mme Naccache. Pour mieux protéger les libertés académiques, l'Observatoire travaille en concordance avec plusieurs associations actives dans le même domaine. A cet effet, la présidente de l'Observatoire considère qu'il faut multiplier les efforts fournis dans ce sens d'où « l'étroite collaboration avec 45 associations », signale Mme Naccache.