Khaled Abida est plasticien de la nouvelle génération en Tunisie. Il est également enseignant à l'Institut des Métiers d'Arts à Kairouan. Il est actif au niveau pédagogique (chef de département) et au niveau de la recherche théorique. Il a organisé plusieurs séminaires et a participé à des colloques internationaux. Il a surtout, publié un texte sur Klee, très remarquable par rapport à sa démarche très fine et par rapport à l'originalité de point de vue de la problématique de la parabole de l'arbre chez Klee. L'artiste a essayé de saisir la représentation essentialiste de l'arbre en décharnant cet élément naturel par rapport à ses éléments graphiques constitutifs. La métaphore est dans cette approche de purification qui aboutit au décharnement de l'arbre. Il a compris que Klee est allé vers le signe et la trace comme substrat du visible du monde et comme essence de sa « corporéité », mais n'oublions pas que Klee aussi est devenu peintre à Kairouan dans une démarche similaire. Revenons à nos moutons, et nos moutons ici, est l'exposition de Khaled Abida qui propose à la galerie municipale de Sidi Bou Saïd, une exposition d'envergure à l'effort fourni surtout par rapport à son approche de Klee. Le signe, la trace, la figure se conjuguent pour fournir des configurations multiples qui se déploient en deux directions : La première consiste, pour Khaled Abida, à organiser son support autour d'un noyau central avec un rayonnement singulier élaboré par rapport à des milliers et des milliers de signes se propageant en faisceaux quasi- réguliers. Ce travail de patience est précis, il se situe au niveau du geste artisanal, une sorte de litanie distribuée sur des surfaces de grandes dimensions. Un tableau (le n°1) est réellement une inspiration d'une démarche de Klee, fait arc-en-ciel en bleu nuit et parcouru par des signes et symboles graphiques appartenant au monde de Klee. Cette œuvre occupe une place particulière dans toute l'exposition. La deuxième direction s'organise par rapport à des dimensions modestes avec un espace partagé entre blanc et noir où la figure se déploie dans un entregent et émerge soudainement comme un nouveau itinéraire très promoteur qui annonce que le plasticien est en train d'approfondir une nouvelle démarche, celle d'une nouvelle figuration qui n'a plus honte d'elle-même. En fait, cette exposition n'est pas seulement riche de ses deux directions, elle contient d'autres apports, surtout, par rapport à un travail modulaire nous rappelant Sahli et ses tentatives de répéter inlassablement le monde et ses signes. Cela évidemment, est aussi lié à des expériences artisanales appartenant à notre propre patrimoine de tissage. Ces œuvres peuvent êtres utilisées comme carton de tissage pouvant sortir notre artisanat de sa crise et le moderniser ainsi. Khaled Abida, en exposant ses 64 tableaux est heureux de dérouler à Sidi Bou Saïd toute sa science et tout son art d'une manière majestueuse et irréprochable. Il peint en pensant et pense en peignant n'est-ce pas ? ll n'a jamais oublié que la pittura e cosa mentale.