Un nouveau nom vient s'ajouter à la longue liste de la mort. Il s'agit de Hamza Belloumi, le jeune animateur de Shems FM et de Nessma qui dérange par son franc-parler et sa révélation des vérités exactement comme ses confrères les deux Sofiène, Ben Hmida et Ben Farhat, Moez Ben Gharbia, Naoufel Ouertani, Haithem Mekki et tant d'autres. Il y a un bon moment qu'on essayait d'inféoder toutes ces voix libres et de faire d'elles un moyen de propagande de la politique officielle qui ne peut respirer que de mensonges. Mais face à leur obstination à aller de l'avant et à poursuivre leur noble mission, on a jugé nécessaire d'étouffer ces voix rebelles, de faire taire à jamais ces voix qui osent tout critiquer et faire émerger tout ce qu'on essaye d'occulter à l'image de ce qu'on a fait avec le martyr de la patrie le grand militant Chokri Belaïd. Complicité dans le mal Les ennemis de la liberté sont déterminés à poursuivre leur action criminelle, à allonger la liste des martyrs, à faire couler plus de sang, à approfondir l'entaille, à renforcer la division. La menace de mort prononcée à l'encontre de Hamza Belloumi est d'autant plus grave qu'elle intervient après l'assassinat de Chokri Belaïd, à un moment où le pays est encore sous le choc, où le peuple tunisien essaye de panser sa très grave blessure pour se remettre sur les pieds et où un appel général à la paix sociale est lancé. Malheureusement, il existe une différence entre les désirs et la réalité qu'il ne faut pas amalgamer: cette volonté n'est pas exprimée par tout le monde. Il est vrai qu'elle est l'émanation de la quasi-totalité des Tunisiens, mais cela n'empêche qu'elle est combattue par une partie de la société, celle qui se vantait d'être majoritaire et dont la vraie dimension était vérifiée le jour des grandes funérailles de notre martyr et aussi lors des manifestations «millionnaires» des défenseurs de la «légitimité». En dépit de son nombre insignifiant, cette minorité nous empoisonne la vie, car elle détient le pouvoir qu'elle veut pérenniser et instrumentaliser pour mettre en application son programme importé qui ne cadre aucunement avec nos intérêts. Ennahdha n'est pas la seule à nous infester la vie, ses partenaires y participent également chacun à sa manière. En effet, les dirigeants de Ettakatol ne sont pas en reste, Khalil Zaouia et Lobna Jeribi, par exemple, ont rendu visite à la milice du Kram baptisée «ligue de protection de la révolution» avec laquelle ils ont pris une photo avec comme toile de fond le drapeau noir de la haine et de la terreur. Il est de même, pour les dirigeants du CPR, leur président honorifique en tête, Moncef Marzouki qui a invité ces gens là au palais présidentiel de Carthage. Ettakatol et le CPR soutiennent ces milices au même titre que Ennahdha et ne peuvent se prévaloir d'aucun contre argument pour se parer des plumes blanches des colombes de la paix, ils ne nous persuaderont jamais du contraire par leurs discours faussement modérés et stéréotypés où ils «condamnent la violence d'où quelle vient». Cela fait longtemps que les Tunisiens ont appris à juger les gens par les actes et non pas par les propos mielleux qu'ils tiennent. Les précepteurs et leurs disciples En plus de son soutien inconditionnel à ces milices en qui elle voit la conscience de la révolution et à la dissolution desquelles elle s'oppose farouchement, Ennahdha refuse de signer le pacte national contre la violence, elle est le seul parti politique à ne pas le faire. Par ses prises de position concernant une question aussi brûlante et aussi déterminante qu'est la sécurité, elle se situe aux antipodes de l'ensemble de la société civile et politique. Ce parti pris nous renseigne sur sa tendance dont le moins qu'on puisse dire c'est qu'elle est inquiétante et n'augure rien de bon. Il ne pourrait pas en être autrement quand certains de ses ministres tels que Mohamed Ben Salem et Houcine Jaziri adoptent des attitudes présomptueuses et s'expriment d'un air méprisant à l'égard de leurs interlocuteurs sur les plateaux télévisés, quand ils leur balancent des mots aussi insultants que «tu mens» qui sont banalisés à force d'être employés. Pourrait-on s'en vouloir aux partisans de Ennahdha après qu'ils voient leurs leaders se comporter de cette façon irrespectueuse vis-à-vis de leurs adversaires politiques? Absolument pas, un tel comportement représente une source d'inspiration pour eux. Ces groupuscules sont les principaux instigateurs de la campagne très hostile orchestrée contre les journalistes, ce sont eux qui ont les premiers monté leurs masses contre ces derniers. Comme tout le monde sait, cette orchestration a démarré avec le sit-in devant le siège de la Télévision Nationale avec le fameux slogan «l'assainissement des médias de la honte» scandé par des gens dont la plupart n'ont jamais suivi de leur vie un journal télévisé, ni écouté un flash d'information à la radio, ni lu un article dans un journal. Décidément, ils tiennent leur savoir de leurs maîtres à penser qui se montrent connaisseurs en la matière comme Habib Ellouze qui multiplie ses diatribes à l'adresse des journalistes sur les places publiques pour leur «manque de savoir faire» et le secrétaire d'Etat de l'immigration qui se permet de leur donner des leçons de journalisme. Ceux qui en ont le plus profité sont Amel Chahed, l'animatrice de l'émission sur Al Wataniya 1, «Bitawkit al oula», à qu'il a conseillée de ne plus s'attaquer à Ennahdha, et Moez Ben Gharbia, l'animateur de «9h Soir», auquel il a prodigué des conseils concernant la manière de choisir ses témoignages dont certains devaient, selon le maître, louer les prouesses du gouvernement et faire son panégyrique. Ces rappels à l'ordre déguisés en conseils ne seraient-ils pas la mise à exécution de l'avertissement prononcé, un jour, par Tarek Dhiab le ministre de la jeunesse et des sports: «Al assa liman assa» (Les insoumis seront corrigés). Jamais ces lâches menaces ne parviendront à entamer la détermination de Hamza Belloumi et de ses collègues, jamais elles n'émousseront leur courage, leur effet sera bien contraire à ce que leurs auteurs espèrent. Ces menaces de mort vont les inciter à redoubler de volonté et d'efforts, car elles sont la preuve que ce qu'ils disent est vrai, ce sont la preuve qu'ils réussissent bien leur mission de journalistes qui consiste à être vigilants et à dessiller les yeux des gens. Leurs voix ne pourraient, donc, déranger que les ennemis de la vérité, ceux qui tentent par tous les moyens de l'étouffer. Mais ils se trompent sur toute la ligne, parce que le sang de Chokri Belaïd a bien irrigué notre terre et son esprit l'a bien ensemencée...