Quelque chose change. Quelque chose bouge. Un vent moralisateur soufflerait (timidement encore) sur le football tunisien. Dépassées certaines lignes rouges, le sport fait valoir une espèce d'instinct de conservation. Une réaction spontanée. Il y a de bons et de mauvais samaritains. Mais les bons finissent par émerger. Englué dans ces sables mouvants que sont la banalisation du dénigrement, le football refuse de s'encanailler. Mais dans la mêlée de la duplicité, de la cupidité, il s'en trouvera toujours un, il s'en trouvera toujours quelques uns pour tendre une perche moralisatrice à un football qui perd ses religions et qui perd, finalement, ses vertus. C'est la première fois, depuis très très longtemps qu'un président de club, Mongi Bhar en l'occurrence, ne tarit pas d'éloges sur les responsables d'un autre club. Il déclare : "Je suis fier (il dit bien fier) d'avoir traité avec des hommes de paroles". Du coup, la cession de Mejri, un gardien que tous désiraient avoir et dont personne n'en voulait, est reléguée au second plan. Car le plus important dans cette affaire c'est le civisme, le sens de la droiture et l'éthique qui ont accompagné cette transaction. Rien à voir avec le professionnalisme. Rien à voir avec l'amateurisme. Il s'agit de la valeur de la parole donnée, dans cette jungle du football où les vendeurs se comportent en marchands de tapis et où les acheteurs se comportent comme dans une vente aux enchères. Croire que, du coup, nos dirigeants de clubs vont se transformer en colombes serait utopique. Il y aura toujours de bons et de mauvais samaritains. Il y aurait tout juste à souhaiter que les bons dépassent (en nombre) les mauvais. Et que finisse, enfin, le cycle de hautes turbulences tournant autour de la bipolarisation (Etoile/Espérance) du football tunisien. Bipolarisation certes féconde, mue par une rivalité acerbe, mais par ailleurs un peu trop personnifiée à travers un interminable match de 15 ans entre Jenayeh et Chiboub. Pas tous les coups étaient permis. Mais il y en avait qui n'étaient pas interdits... Leur duel aura relevé le niveau du football national et celui de l'Equipe nationale, et même dans d'autres disciplines que le football. Mais cette période a été celle de la surenchère, du mercantilisme et du mensonge... Et ces avatars ce sont les clubs satellisés autour des deux grands de l'époque qui les ont "entretenus..." "Lois du marché"... "Loi de la survie pour les petits", entendait-on répéter lors de la campagne des transferts. C'est pour cela que la manière dont ont été menées les négociations pour le passage du gardien hammam-lifois à l'Espérance, représente une petite lueur d'espoir. Car si les clubs ne se font plus obstruction les uns et les autres pour des joueurs qui n'en valent pas vraiment la peine, la bourse des valeurs ne flippera plus. Et d'autres MM. Bhar viendront nous rappeler que le football ne peut secréter que des hommes mais que, parfois, les hommes pourrissent le football. Et le sport.