Le 25 juillet 2013 aura marqué l'Histoire de la Tunisie mais d'un choc poignant et sanglant. Voilà que la journée où les Tunisiens e préparaient à fêter le 56ème anniversaire de la proclamation de la République, se métamorphose en une journée de deuil national. Le second en son genre après le premier assassinat politique du martyr Chokri Belaid, joint aujourd'hui par Mohamed Brahmi, paix à leurs âmes. Tout le pays secoué, affligé et endeuillé. De l'ANC, à l'hôpital, en passant par la demeure du martyr et pour finir au centre ville de la capitale, le voyage était éreintant, secouant et surtout dur et chargé en émotions aussi affligeantes les unes que les autres. On devait fêter notre République, notre Tunisie LIBRE, l'on se retrouve de nouveau foudroyé par un second assassinat politique par balles. Le coup de fil fatal Tôt le matin, il sortit de chez lui, selon ses proches, en courant. Un coup de fil qu'il aurait reçu l'a incité à sortir précipitamment de sa demeure et de se diriger vers sa voiture parquée à quelques mètres de la porte. Vêtu d'à peine un short, un t-shirt et des tongs, il ignorait qu'il avait en fait rendez-vous avec le trépas. Le ou les meurtriers l'ont cruellement arraché à ses enfants. Du haut de ses 11 ans, sa benjamine criait en ces mots : «Mon père était allongé à mes côtés dans ma chambre quand il a reçu un coup de fil qui l'a perturbé et il est sorti en courant. J'ai entendu d'abord un bruit assourdissant, j'ai cru au départ que c'était juste des pétards. Mais quand les coups se sont succédé j'ai compris que c'était des balles réelles. Je n'ai pas compris ce qui se passait. Une panique totale nous a assaillis et tout le monde est sorti pour le rejoindre. On m'a empêché de sortir de peur que je ne sois moi aussi attaquée. On m'a volé mon père !!!». Un témoignage poignant saccadé par les larmes d'une fillette choquée et en deuil par la perte foudroyante de son père, feu Mohamed Brahmi. Quant à sa fille aînée, le visage en larmes mais intrépide et fière s'est adressé en ces termes au peuple et au leader du parti islamiste Ennahda (premier accusé de l'assassinat) : «NON ! Mon père n'est pas mort ! Mon père est un HOMME et demeurera toujours vivant dans nos cœurs, par sa présence, sa parole ! Si l'Opposition ne démissionne pas après ce sale coup, elle ne peut plus se prétendre de l'Opposition ! On n'a plus confiance en vous ! Donnez la patrie aux Nahdhaouis ! Mon père comptait démissionner mais on l'a tué avant qu'il ne le fasse ! Ils sont en train de nous liquider un par un. Ils feront en sorte que l'affaire soit étouffée comme celle de Chokri Belaied. C'est le sang des orphelins qui est piétiné ! Pourquoi tant de haine Ghannouchi!! Pourquoi veux-tu nous condamner à l'orphelinat et au veuvage !? Je suis une femme et la fille d'un homme vaillant et je ne laisserai jamais le sang de mon père partir vainement ! Mon frère et mes sœurs vengerons le sang de notre père ! Nous grandirons pour l'amour de la patrie et la haine envers Ennahdha !! » Au cœur du mois saint et en un jour de fête l'on a volé à cinq enfants dont une handicapée le père, rien que pour ses idées politiques et son appartenance à l'Opposition. Le coordinateur général du courant populaire, Mohamed Brahmi commençait à déranger et il fallait le liquider durant un jour hautement symbolique pour la Tunisie. L'ANC, un hémicycle déboussolé En ce 25 juillet 2013, l'hémicycle s'apprêtait à la fête et se préparait à recevoir les trois présidents provisoires actuels qui donneront, comme l'an dernier, un énième discours prometteur et nullement tenu, si on se rappelle les promesses faites le 25 juillet 2012 par ces derniers. Au lieu de cela, a eu lieu une conférence de presse présidée par le président de l'Assemblée, Mustapha Ben Jaâfar durant laquelle il a, bien évidemment, acerbement critiqué l'acte d'assassinat tenant à présenter ses condoléances à la famille du martyr Mohamed Brahmi, le peuple tunisien et la classe politique tunisienne. Un désordre total régnait sur les lieux. Visages livides et blêmes à l'expression figée, tous ceux qui étaient sur place étaient sous le choc. L'ultime voyage entre les hôpitaux Nous quittâmes l'ANC direction de l'hôpital où a été transporté le corps du défunt. Canicule, jeûne et circulation énorme n'ont pas empêché les milliers de personnes à envahir l'hôpital. Société civile, citoyens et élus étaient venus par milliers pour protester et exprimer leur colère, leur révolte et leur affliction quant à la perte d'un second homme de l'Opposition dans les mêmes circonstances ambigües et foudroyantes. Les lieux étaient encerclés par une présence massive de policiers et de l'armée. Munis du drapeau tunisien et s'aspergeant d'eau sous un soleil de plomb, les manifestants criaient à la dissolution de l'Assemblée constituante et au départ du gouvernement. Accueillis et hués, certains élus de l'Opposition ont tantôt été appelés à prendre réellement position en quittant l'ANC et déposer leur démission collective, tantôt critiqués pour leur laxisme et leur «incompétence». Des femmes de tout âge, enfants, jeunes et moins jeunes étaient venus en nombre, en pleurs, en larmes, affligés et révoltés appelant à envahir la rue et à limoger le pouvoir en place. Une grande partie s'est dirigée au centre ville accaparant l'avenue principale de la capitale, théâtre de toutes les fluctuations et tous les maux sociaux politiques qui secouent la Tunisie depuis 3 ans. Sur place, l'on voyait ces visages en deuil, dolents, expressions endolories. Déboussolés, certains étaient accroupis, d'autres assis à même le sol, sous une canicule humainement insupportable. Pourtant, près de deux mille personnes y étaient. Entre temps, quand le camion qui transportait le corps du défunt Mohamed Brahmi a quitté l'hôpital El Matri de l'Ariana se dirigeant vers l'hôpital Charles Nicolles, était à mi-chemin, il a été arrêté à plusieurs reprises par des manifestants qui intimaient le chauffeur à se diriger vers le centre ville et passer par l'Avenue Habib Bourguiba. La situation a dégénéré au niveau d'El Menzah 5 où les policiers ont dû recourir au gaz lacrymogène pour disperser les manifestants. Affaire à suivre…