Avant hier soir, à l'hôtel Africa, quarante deux députés constituants démocrates, ceux des coalitions et les autres, ont annoncé leur décision de retrait de l'ANC jugée dépourvue de toute validité et de toute légitimité. Hier, ils ont été rejoints par les membres de la Constituante appartenant à l'Alliance démocratique pour porter leur nombre à 52. Déterminés à faire aboutir le processus démocratique, ils ont décidé de répondre favorablement à l'appel de la patrie en s'inscrivant dans les luttes du peuple qui a décrété la dissolution de la constituante et le renversement du gouvernement qui en est issue et qui s'est illustré par la série d'échecs qu'il a essuyés à tous les niveaux. Pour donner forme à leur démarche, les députés dissidents observent un sit-in ouvert, à partir d'aujourd'hui, devant le siège de l'ANC où ils comptent installer une tente. Toutefois, ce procédé de contestation peut revêtir d'autres formes plus évoluées, en ce sens qu'il est possible que le sit-in change de terrain et qu'il ait lieu sous la coupole du Bardo pour interdire la tenue des assemblées générales qui se dérouleraient, ainsi, en dehors de tout consensus. Les avantages du retrait Les députés ont préféré le retrait à la démission, parce que, selon eux, ce dernier procédé les exclurait et les priverait de toute initiative. Cette politique des sièges vides profiterait à la Troïka et ne ferait que renforcer sa position d'autant plus que ce seraient ses partisans qui suppléeraient, immédiatement, aux démissionnaires, puisque leurs noms figurent juste après ceux de ces derniers. D'après les spécialistes de droit, le retrait est l'équivalent d'un gel d'appartenance à l'ANC qui a plusieurs avantages, contrairement à la démission qui rompt toute affiliation à cette instance. La préservation de cet attachement permet d'empêcher la suppléance, car des parties politiques qui ont quitté leurs coalitions, qui ont rejoint d'autres partis et qui sont proches de la Troïka peuvent conforter la position de celle-ci ; ces partis appartiennent surtout à Al Aridha et à Ettakatol. Garder la qualité de membres de constituants laisse la possibilité à ces députés d'intervenir pour brouiller ou perturber aussi bien les travaux de l'assemblée plénière que ceux des commissions. Toujours selon ces spécialistes, pour qui, il ne faut jamais jurer de rien, le retrait procure à ces députés un autre avantage en cas de force majeure ou de cas fortuit où ils pourraient reprendre leurs fonctions au sein de l'ANC, alors que la démission c'est catastrophique. Détermination Quelles qu' en soient les justifications, cette position prise par les constituants s'insère dans une dynamique révolutionnaire irréversible. Seulement, la présence dans ce groupe d'une députée dont le parti s'oppose à la destitution de l'ANC fait planer le doute quant à l'aboutissement de cette démarche ; on veut parler ici, en particulier, de Nejla Bourial dont le parti la « Coalition démocratique » reste proche du parti au pouvoir en défendant cette prétendue légitimité. Et quandon sait que les membres d'un parti sont tenus de respecter ce qu'on appelle la « discipline de parti », on se pose la question si elle s'agrippait à sa position personnelle ou bien si elle s'alignait sur celle de son parti. On craint que ce manque d'homogénéité n'affecte cette action de rébellion. En tout cas, le groupe des quarante deux députés s'est montré rassurant à ce propos en affirmant qu'il irait jusqu'au bout dans sa démarche qui ne connaîtrait de répit qu'avec la dissolution de la constituante.