Sur l'écran de la salle Le Mondial, les projections des documentaires se poursuivent tous les jours mais aucun film ne ressemble à l'autre. Et voici du Maroc un film qu'il est difficile d'assimiler à un documentaire car son écriture est plus proche de la fiction. « Vaine tentative de définir l'amour » de Hakim Belabbès est une histoire d'amour dans les vastes montagnes berbères. Un couple d'acteurs, Hamza et Zineb, partent dans les montagnes de l'Atlas pour vivre les rôles qu'ils doivent jouer dans un prochain film, La légende d'Isli et Tislit (le fiancé et la fiancée), de deux amoureux dont les larmes ont formé les deux lacs qui portent leurs noms. Zineb traverse une crise amoureuse, déçue par celui qu'elle pensait être l'homme de sa vie. Hamza, lui, vient de rater son mariage et s'interroge sur les grandes décisions de son existence. L'espace et les gens que rencontrent Hamza et Zineb leur montrent que l'amour qu'ils pensaient unique pouvait avoir plusieurs autres formes. Ils mettent leurs sens à l'épreuve de l'air, des nuages, de l'eau, du tonnerre, de tout ce qui fait la vie ordinaire des nomades qu'ils rencontrent. Un scénario original écrit avec beaucoup de finesse et d'intelligence. Méditation autour de l'invisible Il s'agit d'un mélange entre fiction et documentaire autour de l'histoire de ces deux célèbres amoureux berbères. Bien qu'il ait découvert la région d'Imilchil il y a bien longtemps, le réalisateur a voulu, lors du tournage de son nouveau film, y aller en explorateur sur les traces d'Isli et Tislit. Hakim Belabbès a toujours été fasciné depuis sa tendre enfance par cette légende, «j'ai toujours rêvé de faire un film sur l'histoire mythique d'Isli et Tislit», dit-il. L'aspect documentaire apparait au niveau de la participation des habitants de la région. En effet, Zineb et Hamza essaient de ressusciter l'âme de ces deux amoureux légendaires en faisant parler les habitants de la région. Les habitants de cette région célèbrent chaque année le « moussem » des fiançailles d'Imilchil en commémoration des deux amoureux légendaires de la région. Info ou intox, l'histoire d'amour d'Isli et Tislit continue de faire rêver les jeunes et d'être prise en exemple aux niveaux local, régional ou national. Les larmes d'une légende La légende dit qu'Isli et Tislit n'ont pas pu supporter l'opposition de leurs familles respectives à leur mariage. Les deux amoureux se sont mis à pleurer jusqu'à ce que leurs larmes se transforment en deux lacs qui portent depuis leurs noms. Le réalisateur essaie aussi de faire parler des habitants de la région de leur expérience personnelle dans l'amour. Certains villageois ont avoué avoir pleuré à cause d'une déception amoureuse ou de la perte d'un proche. Bref, le film fait montrer au fur et à mesure que les habitants, quel que soit leur âge, ont hérité la simplicité et le romantisme de leurs aïeux influencés par cette légende. En plus de la beauté de la région, le film met ainsi en valeur la bonté et le sens de l'humour des villageois face aux difficultés de la vie. Un film beau et triste comme toutes les histoires d'amour. Le réalisateur Hakim Belabbès a étudié la littérature américaine et anglaise à Rabat. Il a commencé des études de cinéma à Lyon, puis a complété sa formation aux Etats-Unis. Il a obtenu un master des Beaux- Arts en Cinéma au Columbia College de Chicago où il vit et enseigne à la « School of the Art Institute ». Il a tourné plusieurs courts et longs métrages documentaires dont « Chuchotements », « Ces Mains » et « Fragments ».