Le premier mai est fêté cette année avec un goût d'amertume à cause de la situation qui sévit sur le plan social. La flambée des prix et l'augmentation du chômage affectent les citoyens et influent sur leur pouvoir d'achat qui affiche une baisse continue. Cependant on assiste de plus en plus à des mouvements de grève à travers tous les secteurs d'activité, ou privées, les derniers en date étant ceux des enseignants du secondaire, des instituteurs, des surveillants, des magistrats, des médecins et du personnel des hôpitaux... Le dilemme est que la grève est un droit constitutionnel, qui a été le fruit des luttes des travailleurs pour des revendications sociales dont notamment le droit au travail. Cela parait contradictoire à priori. Car comment revendiquer le droit au travail en s'abstenant de travailler ? La finalité est justement de sensibiliser tous les citoyens qui se trouvent touchés indirectement par la grève. C'est le moyen le plus efficace pour dénoncer des abus et revendiquer des droits. Aussi, il y a plusieurs sortes de grève, dont notamment la grève sans perturber la bonne marche du travail en portant un simple brassard rouge. Mais il a fallu passer par plusieurs étapes au cours desquelles les travailleurs ont payé de leur sang et de leur vie, pour aboutir à la fête du travail et des travailleurs. Le mouvement ouvrier a commencé en 1886 aux Etats-Unis et plus précisément à Chicago où les travailleurs s'étaient affrontés aux forces de l'ordre suite à une grève générale ayant paralysé tous les secteurs économiques et généré l'arrestation des meneurs tels que Fisher, Parsons et quelques autres, qui furent suite à un procès expéditif, condamnés à mort par pendaison, et exécutés. Mais les ouvriers finirent par obtenir gain de cause et voir le 1er mai 1886, devenir officiellement un jour célébrant la fête du travail, en mémoire de ceux qui se sont sacrifiés pour la cause des travailleurs. Ce mouvement gagnera l'Europe et notamment la France où le congrès international socialiste de Paris déclare le 1er mai 1889, comme journée des travailleurs. Cependant, les manifestations et les affrontements sanglants continueront à se développer en France et ailleurs durant les années 1890 et 1891. En France le 1er mai 1941 fut décrété journée de la fête du travail par la loi du 12 avril de la même année. Ce n'est qu'en 1947 qu'une nouvelle loi a décrété que le 1er mai sera désormais, chômé et entièrement payé. La période coloniale A cette époque, la Tunisie était sous domination française. En 1886, non seulement les travailleurs étaient exploités à outrance et ne pouvaient prétendre à aucun droit, mais ils étaient assimilés à des esclaves. Les travailleurs étaient essentiellement attachés soit au secteur agricole, soit au secteur minier. Les mines de Jérissa et de Gafsa commençaient à être exploitées par les capitalistes français et européens. Les autochtones étaient contents de trouver du travail, et acceptaient toutes les conditions qui leur étaient imposées par les colonisateurs, pour pouvoir gagner quelques pécules afin de subvenir un tant soit peu à leurs besoins et à ceux de leurs familles. Dans le secteur agricole la situation était similaire. Bien plus, certains fellahs, après avoir été chassés de leurs terres par les colons, se résignaient à travailler pour le compte de ceux-ci et à se soumettre aux conditions qu'ils leur imposaient et qu'ils n'avaient aucun droit de négocier ou discuter. En 1907, le mouvement Jeunes Tunisiens, de Bach Hamba et ses adeptes faisaient état de cette situation lamentable des travailleurs, en tant qu'un des éléments néfastes du colonialisme. Ce n'était pas donc un mouvement syndical qui s'occupait particulièrement des travailleurs, mais un mouvement politique qui avait pour but de dénoncer une atteinte notoire à la souveraineté du pays par l'occupant. En attendant, les droits des travailleurs étaient bafoués même entre autochtones. Le Droit du travail était non seulement méconnu à l'époque, mais considéré comme une rébellion de la part de quiconque osait réclamer ses droits à l'employeur. Comment les travailleurs pouvaient-ils de ce fait affronter en effet, les autorités coloniales ? Il a fallu attendre 1925 pour voir jaillir la première étincelle du mouvement ouvrier incité par M'hamed Ali El Hammi. Bien d'autres lui emboîtèrent le pas tels que Belgacem Gnaoui, Farhat Hached, Habib Achour, Ahmed Tlili, Ahmed Ben Salah et tant d'autres, qui avaient mené une lutte acharnée contre l'exploitation du travailleur. Celui-ci, a pu recouvrer ses droits grâce au mouvement ouvrier dont des dizaines de militants qui ont sacrifié leur sang et leur vie pour la cause ouvrière.