Le Temps-Agences - La probabilité d'une intervention armée turque dans le nord de l'Irak contre les rebelles kurdes paraissait avoir sensiblement augmenté hier au lendemain de l'échec de négociations avec une délégation irakienne à Ankara. "Une opération transfrontalière est à la porte", titrait le quotidien pro-gouvernemental Zaman. C'est dans ce contexte très tendu que le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) a affirmé que la libération de huit soldats turcs, faits prisonniers dimanche dernier, "ne prendra pas longtemps". Les soldats ont été pris en otages lors d'une attaque du PKK qui a également fait 12 morts dans les rangs de l'armée turque. Le PKK s'est dit prêt "à discuter de la question (de leur libération) avec toute délégation susceptible de se présenter". Affirmant que les prisonniers se trouvaient dans une "zone de guerre" soumise aux bombardements turcs, le PKK a indiqué en substance que l'arrêt des tirs faciliterait leur libération. La délégation irakienne qui a discuté sans succès pendant plus de six heures avant-hier avec des responsables turcs a par ailleurs quitté Ankara hier pour l'Irak. Ankara a jugé insuffisantes et trop lentes à mettre en œuvre les propositions des Irakiens visant à empêcher les infiltrations meurtrières en Turquie de combattants du PKK. La Turquie veut des "mesures urgentes et décisives", a souligné le ministère des Affaires étrangères en réponse aux propositions. Bagdad a notamment proposé de faire surveiller les frontières du Kurdistan irakien par les forces de la coalition et de "renforcer" les postes-frontières du nord de l'Irak avec la fourniture d'armes et d'équipements. Soulignant que les trois provinces situées dans le nord de l'Irak étaient sous le contrôle du gouvernement provincial kurde, le général américain Benjamin Mixon, qui commande la division multinationale nord, avait déclaré avant-hier que ses forces ne comptaient "absolument rien" faire contre les rebelles du PKK. Le gouvernement turc, qui redoute une intervention armée dont le succès est loin d'être garanti "est comme un funambule sur son fil", soulignait hier un diplomate occidental. A chaque nouvel incident avec les rebelles, "l'exercice devient de plus en plus périlleux" mais il existe encore "deux fusibles" pour éviter une intervention, a-t-il estimé. La secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, doit faire un crochet par Ankara avant d'assister à une conférence internationale des voisins de l'Irak à Istanbul les 2 et 3 novembre. Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan doit aussi être reçu à la Maison Blanche le 5 novembre pour des entretiens, les premiers depuis le triomphe du Parti de la justice et du développement (AKP), issu de la mouvance islamiste, aux législatives de juillet. M. Erdogan a laissé entendre avant-hier soir qu'une intervention armée avait peu de chances de se concrétiser avant sa rencontre avec George W. Bush. Il a affirmé qu'une action militaire s'inscrivait dans un "processus" qui inclut sa rencontre avec le président américain George W. Bush. "Je ne sais pas ce qui peut se passer jusqu'à mon voyage en Amérique", a-t-il cependant ajouté car "nous sommes en ce moment dans un état d'alerte permanent".