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Révolutions et transitions démocratiques témoignages croisés, études comparées
Publié dans L'expert le 20 - 04 - 2011

Tel est le thème de la journée d'étude co-organisée par la Konrad-Adenauer-Stiftung et la Chaire Unesco d'Etudes comparatives de religions et tenue le vendredi 15 avril 2011, à Gammarth. La séance inaugurale de la journée a été assurée par M. Thomas Schiller, représentant régional de la Konrad-Adenauer-Stiftung et M. Mohamed Haddad, titulaire de la Chaire Unesco. Cinq experts éminents ont intervenu: Dr. Bronislaw Wildstein, membre fondateur de Solidarnosc de Pologne; Dr. Ramon Petit Miret, membre de l'Institut méditerranéen à Barcelone d'Espagne; Dr. Phil. Wolfgang Mayer, auteur d'Allemagne; Prof. Cristian Pirvulescu, directeur de l'association Pro Democratica de Roumanie et M. Hamid Elkam du Maroc. Y étaient présents les ambassadeurs d'Allemagne et de Pologne, un représentant de l'ambassadeur d'Egypte, les membres de l'association Ibn Abou Dhief pour le dialogue démocratique et l'entente nationale et des représentants des partis politiques et de la société civile. Malheureusement les médias audiovisuels n'ont pas été présents malgré leurs invitations et une pétition, au sujet, a été signée par les présents.

Au cours de cette journée des témoignages sur les quatre transitions démocratiques ont été présentés: polonaise, espagnole, roumaine et celle de l'ex-Allemagne de l'Est. Le but recherché étant de tirer profit des expériences d'autres pays. «Il ne s'agit pas de copier une expérience précédente mais de tirer profit des réussites et éviter les erreurs des autres pour offrir à la Tunisie les jalons d'un modèle qui lui permettra de mieux réaliser les objectifs de sa Révolution, notamment les deux principales revendications: LIBERTE & DIGNITE», a noté M. Mohamed Haddad.
«Avec l'élection d'une Constituante qui, travaillera sur une nouvelle Constitution pour la République tunisienne, c'est là, à mon avis, que la vraie transition va commencer et que les vrais débats vont commencer… La démocratie, ou plutôt, la transition démocratique n'est pas seulement un débat constitutionnel. Il y a, aussi, beaucoup d'autres sujets qui y sont liés», a souligné M. Thomas Schiller lors de son allocution tout en accordant ainsi toute l'importance d'étudier les expériences d'autres pays en matière de transition démocratique.
Les intervenants, des témoins et acteurs dans la transition démocratique de leurs pays, ont abordé dans leurs exposés, entre autres, le rôle du religieux dans les transitions démocratiques comme c'est le cas de l'église catholique en Pologne pendant et après la révolution, les relations entre les partis politiques et la société civile, le rôle des intellectuels et des femmes et les forces émergentes dans la transition démocratique.
Selon M. Haddad, il y a eu trois vagues de révolutions dans le passé. La première est celle des révolutions anglaise, française et américaine, qui sont restées des révolutions de référence. La deuxième vague est celle, essentiellement, de la révolution en Russie, en Chine et, après, en Iran. C'est un type de révolution qui était portée sur une idéologie. La troisième vague de révolutions est celle des révolutions démocratiques. Pour lui, la révolution tunisienne s'inscrit dans cette dernière vague dont le mouvement s'est particulièrement accéléré après la chute du mur de Berlin en 1989.

Une révolution sans idéologie
Concernant les transitions démocratiques et la spécificité de la révolution tunisienne, il a indiqué:
«Une trentaine de pays avaient observé une transition démocratique, mais aucun pays arabe. C'est ce qui a fait dire à plusieurs personnes qu'il y a une exception arabe ou qu'il y a une exception islamique. Le monde arabe ou le monde islamique n'appartient pas à ce monde qui tend vers la démocratie. Au début, c'était une idée, mais par la suite c'était devenu des théories chez certains philosophes et chez certains sociologues. Je pense que ce qui s'est passé en Tunisie a battu en brèche cette idée et cette théorie. Il n'y a pas d'exception arabe. Il n'y a pas d'exception islamique. Tous les peuples tendent vers la liberté et vers la démocratie. Cependant, ce n'est pas un processus facile ou sans risque. La spécificité de la révolution tunisienne c'est qu'elle a démoli le mur de la peur en Tunisie et, après, dans le monde arabe. C'est une révolution sans idéologie, sans leader et sans parti d'avant-garde. Ce qui était bien. Ce sont ces éléments qui ont permis à cette révolution de réussir, mais aussi ce sont ces éléments qui font en sorte qu'aujourd'hui le processus de construction soit assez difficile et assez compliqué car il n'y a pas d'idéologie qui sert de référence à tout le monde. Personnellement je dis c'est tant mieux. Il n y a pas de leader avec qui nous pouvons traiter. Et je dis tant mieux car un leader cela finira toujours par devenir un dictateur. Et il n'y a pas de parti d'avant-garde et donc, c'est bien. Tout le monde peut participer. Il n'y a qu'à voir ce qui se passe tous les jours sur l'Avenue Habib Bourguiba. Est-ce que cela ne vous rappelle pas un peu la situation de la Grèce antique où les gens venaient, au centre de la ville, pour discuter de leurs affaires. Aujourd'hui, sur l'Avenue Habib Bourguiba, nous discutons sur la Tunisie et sur l'avenir de la Tunisie».
Pour qu'une discussion soit valable et qu'elle aboutisse à une construction positive, suivant M. Haddad, il faut qu'il y ait trois éléments. D'abord, il faut avoir un maximum d'informations pour pouvoir débattre et pour pouvoir arriver à des opinions. Deuxièmement, il faut que les gens acceptent le débat contradictoire, étant donné que chacun a sa propre perception des choses et ses propres idées. Et troisièmement, il faut que les gens aient dès le départ l'idée d'arriver à une entente nationale. Sans entente nationale, il ne peut y avoir un vivre commun dans la société, a-t-il ajouté.

Eviter l'anarchie
Pour que l'expérience tunisienne réussisse, il faut qu'elle ne finisse pas dans un régime militaire, dans une anarchie totale et dans la théocratie, a-t-il dit. «Nous avons énormément de chance pour éviter ces trois dérives. Si la Tunisie réussit, aujourd'hui, à ne pas tomber dans ces trois scénarios, nous donnerons la preuve irréfutable que le monde arabe n'est pas une exception, le monde islamique non plus, et que, dans ce monde-là, nous avons aussi besoin de démocratie et nous pouvons réussir une transition démocratique».
Cependant, a-t-il ajouté, il faut relever beaucoup de défis structurels. «La révolution tunisienne a été faite essentiellement par des jeunes. La jeunesse a été décisive dans cette révolution. En revanche la classe politique tunisienne n'est pas une classe assez jeune et n'est pas une classe assez rajeunie. Nous comprenons pourquoi; durant vingt ans il n'y avait pas de vie politique. «Les politiciens» c'étaient des gens qui étaient formés à l'ère de Bourguiba. C'est un problème. Il y a une révolution qui a été faite par les jeunes, mais par la suite c'est une classe politique qui va gérer le devenir de cette révolution et cette classe politique doit agir très rapidement pour essayer d'être au diapason avec les jeunes. Or, c'est une question qui n'est pas facile à résoudre, mais c'est un des défis majeurs, à mon avis, de la situation actuelle.

Besoins sociaux et de liberté
Le deuxième défi structurel est le rapport entre les besoins sociaux et les besoins démocratiques. Pour beaucoup de gens, nous avons besoin de liberté. Pour beaucoup d'autres gens, nous avons besoin de travail. Comment faire en sorte que le besoin de travail ne devienne pas contradictoire avec le besoin de liberté et vice versa? Comment faire en sorte que nous n'oublions pas le besoin démocratique face à l'urgence du besoin social ou le contraire, que nous n'oublions pas le besoin social face à l'urgence du besoin démocratique? C'est un deuxième défi structurel et majeur de la révolution tunisienne.
Le troisième défi majeur, est le rapport entre les tendances à sensibilité islamiste et les tendances à sensibilité sécularisée - pour ne pas employer le mot laïque. Il y a les deux en Tunisie et il ne faut pas que nous arrivions à des situations de conflits et d'affrontements. Il faut trouver là aussi des terrains d'entente. Ça sera l'un des défis majeurs, mais nous avons quelques chose de positif: le haut comité de la révolution est arrivé à avoir un code électoral dans lequel ont participé quatorze partis dont un part islamiste et d'autres partis non islamistes. Espérons que ce comité réussisse, maintenant, à avoir une charte. C'est très important parce que le problème, n'est pas seulement d'organiser des élections. Le problème est aussi de dire quels sont les éléments communs de ce que nous appelons la citoyenneté tunisienne. Et ce n'est pas une question d'élection. Espérons donc que le haut comité qui a réussi son premier objectif à savoir une loi électorale puisse réussir son deuxième objectif, à savoir une charte républicaine dont laquelle tous les citoyens tunisiens se reconnaitront.

Culture du compromis
Le quatrième défi majeur est la relation entre une culture de compromis entre des égos individuels très gonflés en Tunisie. Pendant vingt ans les gens avaient peur les uns des autres. Pendant vingt-ans, il n'y avait pas de véritable dialogue. Maintenant, chacun vient avec ses propres perceptions et ses propres catégories de pensée et il doit y avoir un débat. Ce n'est pas facile. Ce n'est pas facile en matière de politique, mais ce n'est pas facile non plus en matières de culture, d'intellectualisme, etc.».

Détermination des Polonais
Dans son intervention, Dr. Bronislaw Wildstein a résumé les problèmes des Polonais dans le fait qu'ils tirent leur origine de leur passé communiste. Solidarnosc (qui veut dire solidarité) était, en Pologne, un grand mouvement national pour la liberté et la souveraineté. Il a pris la forme d'un syndicat car c'est seulement sous cette forme que le régime communiste a pu accepter son existence, a-t-il indiqué. En quelques mois après sa naissance en août 1980, Solidarnosc a regroupé environ 10 millions de membres, ce qui était incroyable a-t-il souligné, et a montré «la détermination des Polonais contre le système communiste». En 1981 La loi martiale a été adoptée pour affronter les conflits incessants en Pologne et c'est en 1989, qu'il y a eu une table ronde et des négociations entre le pouvoir et Solidarnosc et, quelques mois après, a débuté la chute du communisme. La transition démocratique du pays a duré quelques années. Elle n'a pas réussi totalement et ses conséquences se font sentir jusqu'à présent.
En Espagne, il y a eu une transition politique. Elle a commencé après le décès du dictateur espagnol, le Général Franco, le 23 novembre 1975. Elle dure jusqu'à présent, selon l'avis du Dr. Ramon Petit Miret. Des choses ont été mal faites dans la transition. Tous les crimes du Franquisme n'ont jamais été jugés.
Selon Dr. Ramon Petit Miret, pour avoir un consensus, il faut faire des concessions. La droite a cédé énormément et la Gauche aussi.

Justice transitionnelle
Dans son intervention, M. Hamid Elkam a présenté l'expérience de son pays en matière de justice transitionnelle. C'est un concept nouveau et ancien, a-t-il dit. Il relève de la science de la transition politique et non uniquement des transitions démocratiques, appelée la transitologie. Les composantes de cette justice transitionnelle sont au nombre de cinq, a-t-il évoqué, à savoir:
«-L'établissement de la vérité des faits sur ce qui s'est passé durant une période donnée dans un pays donné qui a vécu une période de violence et de conflits;
- La réparation des victimes; directes soit indirectes, de ces violations des droits humains;
- La countibility. Elle comprend beaucoup de fronts y compris la traduction devant la justice ordinaire des perpétrateurs de ces violences,
-la proposition d'une trame de mesures, de réformes à même de garantir la non répétition de ce qui s'est passé dans le passé, dans le présent et dans le futur d'une nation ou d'un pays ;
-la réconciliation de la population avec ses institutions».
La justice transitionnelle, a-t-il ajouté: «est une justice à effet rétroactif. Comme mécanisme, elle est liée à la transition politique et à la transition démocratique. Parmi ses objectifs stratégiques la restauration, une restaurative justice. Elle va restaurer la confiance des citoyens dans leurs institutions. Elle va restaurer le système politique lui-même, parce que le problème d'une société en conflit c'est que les institutions qui devraient fonctionner normalement sont en panne, sont corrompus, ne livrent pas un service public dans une gouvernance et dans le respect des droits des usagers de ces services public, etc.».
Chaque type de violence détermine le type de mécanisme de règlement extrajudiciaire pacifique de ce passé violent, a-t-il ajouté.

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Selon M. Elkam, c'était en 1999 qu'a eu lieu «la première tentative de justice transitionnelle, au Maroc, avec la création d'une instance indépendante d'arbitrage et d'indemnisation des victimes de disparitions forcées et des torsions arbitraires». Cependant, le travail de cette instance qui a duré deux années et demi environ, a été contesté par les associations des droits humains et les groupements des victimes des violations graves et massives des droits de l'homme, a-t-il dit. Ainsi, et suite à l'accroissement de la demande sociale par rapport à la question de la justice, de l'équité et , surtout, de la vérité sur ce qui s'est passé, il y a eu la création, en janvier 2004, de la commission nationale de vérité, de justice et de réconciliation, comme c'est le cas dans d'autres pays, avec les règles et mécanismes de la justice transitionnelle. La création de cette commission a été proposée et recommandée par le Conseil consultatif des droits de l'Homme au Roi du Maroc qui l'a acceptée, a-t-il indiqué.
Selon M. Elkam: «l'essentiel est qu'il y ait une demande sociale, une réaction d'une institution intermédiaire entre l'Etat et la société et la volonté politique de l'Etat. C'est la conjugaison des trois volontés politiques de l'Etat et de la volonté de la société de régler le dossier du passé. Mais pour le régler, il faut le lire. Avant de fermer la page du passé, nous avons procéder à une lecture».
C'est une question qui demande un peu de distance et d'objectivité scientifique.
Pour M. Elkam, la réussite d'un mécanisme de justice transitionnelle est tributaire de la volonté de l'Etat et de celle de la société, et, aussi, d'une distance temporelle entre la période des conflits et la période post-conflits.


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