Il a voulu à travers cette démonstration tenir l'opinion publique à témoin, témoin de sa popularité et de sa capacité à revenir à pouvoir. De tous les meetings, celui de Sfax incarnera peut être la reconquête. « Ennahdha a quitté le pouvoir parce que elle est sûre d'y revenir » avait lâché Rached Ghannouchi au détour d'un discours prononcé à Bizerte à l'occasion de la fête de l'Evacuation. A ce dessein, Ennahdha compte bien se servir de sa démonstration de force à Sfax. Une ville qui aura, par ailleurs, marqué le changement du fusil d'épaule de chef de file ou son retour aux sources. Fini les appels du pied à Nidaa et l'arme imparable du consensus. Fort d'une foule monstre qui est venue l'acclamer, samedi, au théâtre de Sidi Mansour, Rached Ghannouchi s'est fendu d'un long réquisitoire contre son principal ennemi politique, Béji Caied Essebsi. « Depuis son avènement, Ennahdha a tenu neuf congrès. Pas une fois, nous nous sommes reprochés un manque de démocratie » a avancé Rached Ghannouchi en allusion aux remous ayant entaché alors le mouvement Nidaa Tounès lors des préparatifs de son congrès. Et d'ajouter qu'Ennahdha n'a aucune leçon à recevoir en matière de démocratie, d'islam, ou de liberté. « Ennahdha a été persécuté des années durant et elle a donné des centaines de martyrs et des milliers de prisonniers pour s'affranchir du joug de la dictature », a-t-il poursuivi. Le président de Nidaa Tounès avait pointé auparavant l'incompatibilité de l'islam politique à la démocratie. Sans pour autant déplacer le curseur, le meeting d'Ennahdha aura restitué, à une semaine de la grande échéance, les angles et redessiné les contours d'une bataille entre deux projets de société diamétralement opposés.