Il faut dire qu'habitué à la médiocrité de la part de la plupart des honorables membres du nouveau gouvernement, le tunisien a acquis le réflexe de rire de tout ce qui émane de cette formation, aussi bien sous formes de déclarations que de projets ou d'idées. La dernière idée qui a suscité les sarcasmes d'une grande frange des internautes tunisiens, aura été celle de la prochaine création d'une agence pour la lutte contre les moustiques. Un projet proposé par le ministre de l'environnement lors de sa dernière sortie médiatique. Et voilà que les tunisiens s'enflamment sur le net pour rigoler de cette « idée », en ironisant sur l'utilité d'une telle institution et sur l'efficacité qu'on pourrait attendre d'elle. Or, en réalité, il faudra reconnaitre que, pour une fois, et au milieu de la cascade d'idées plus saugrenues et plus farfelues les unes que les autres qui ont déferlé ces derniers temps de la part des brillantissimes conseillers de nos honorables membres du gouvernement, ce projet de création d'une agence pour se pencher sur la lutte contre le fléau des moustiques, n'est pas aussi folle que certains semblent enclins d'imaginer. Car, la lutte contre les moustiques et autres insectes nuisibles, est très loin d'être une mince affaire. Çà n'a rien à voir avec les simples opérations d'épandage ou de pulvérisations d'insecticides, et parfois même, de simples hydrocarbures qui n'ont de nocif que le fait d'irriter les gorges des riverains, et qui n'ont aucune efficacité prouvée, sauf, comme le souhaitent leurs auteurs, sur le mental des contribuables qui sont bernés en croyant que les collectivités locales s'occupent de leur confort. Çà n'a, par ailleurs, rien à voir, non plus, avec les spectaculaires opérations de curage des oueds et autres étangs, où sont employés de grands moyens mécaniques pour faire semblant de mettre le paquet dans cette lutte, alors qu'en réalité çà sert simplement à déplacer le mal de quelques dizaines de mètres. En effet, la lutte contre les insectes requière la collaboration de nombreux départements, et de nombreuses directions, comme le ministère de l'intérieur, ceux de l'agriculture, de la santé et de l'environnement, pour ne citer que ceux-ci. Et la collaboration qui se faisait jusqu'à ce jour, sous forme de commission qui est appelée à se réunir de façon épisodique à l'approche de la saison estivale, ne pouvait en aucun cas être efficace. Car la lutte contre ces nuisances est une affaire quotidienne et à longueur d'année. Elle commence par l'identification des gîtes des moustiques et de leurs larves, et leur curage, avec utilisation de moyens mécaniques mais aussi de pesticides qui doivent, au préalable, être testés sur les bestioles qui ont acquis la fâcheuse manie de développer des résistances à tous les produits jusque là utilisés. Cette lutte se poursuit par des études scientifiques poussées pour retrouver les produits à retenir, et pour identifier la meilleure façon de les utiliser, et le temps pour le faire. La lutte passe, aussi, par l'étude des moyens autres que mécaniques ou chimiques, mais plutôt biologiques pour s'assurer d'un minimum de nocivité, comme les petits poissons voraces de larves de moustiques qui avaient été utilisées, avec un énorme succès, lors des jeux méditerranéens à Rades, région pourtant réputée à très grande infestation par les moustiques. Il avait, donc, et au final, raison, le ministre de l'environnement, ou celui qui lui a soufflé l'idée, de préconiser la création d'une telle agence, qui pourrait cumuler les efforts des différents départements, et centraliser aussi bien les ressources que les méthodes utilisées, pour ne plus avoir des communes qui traitent d'une façon, alors que ses voisines traitent avec d'autres moyens, ou alors, ne traitent pas du tout, devenant, ainsi, un gîte de repli pour les moustiques des voisins. Cette agence pourrait, même, éventuellement, centraliser les achats des produits et engins nécessaires à cette lutte, ce qui ferait gagner énormément d'argent au contribuable, tout en assurant un maximum d'efficacité.