Que se passe-t-il en Tunisie, en ce froid mois de janvier ? On a bien l'impression, que dis-je, la quasi-certitude que quelque chose d'important et de grave est en train de se tramer, en ce mois glacial. Mais quoi ? On ferait bien de ne pas trop y penser, de peur de choper la migraine, voire la panique et en perdre le sommeil. Çà bouge de partout. Et çà bouge sacrément. Çà bouge, surtout, là où il ne le faudrait pas. Çà bouge le long des frontières, çà bouge à Sidi Bouzid, çà commence à remuer du côté de Sfax... Toutes ces zones étant à haut risque. Un risque évident d'infiltration d'éléments douteux, de casseurs qui n'ont d'autre dessein que de parasiter le travail des sécuritaires et des militaires, et de créer diversion, pour laisser du champ à quelque chose qui doit passer ou qui doit se passer. Du côté de Ben Guerdene, il y a le risque d'infiltration de terroristes à partir de la Libye, des terroristes qui fuient la débâcle de Daech et qui nourrissent des espoirs de se réorganiser chez nous. Du côté de Kasserine et du Kef, le risque provient des frontières algériennes, surtout que l'armée algérienne ne rend pas la vie facile aux terroristes de son côté, mais le risque provient aussi des éléments retranchés dans les montagnes et qui doivent penser que l'heure est venue pour eux de bouger. Quand à Sfax, il ne faudrait pas négliger le risque qui pourrait provenir des îles de Kerkennah, devenues depuis des moins, un lieu de non droit, par excellence, et qui pourraient abriter, en l'absence de police, de nombreux terroristes qui auraient pu y débarquer par la voie des mers, en provenance des côtes libyennes. A Sidi Bouzid, le risque provient de l'intérieur, même, de certaines cités, minées par l'extrémisme, et par le chômage, de même que par un sentiment grandissant de dénigrement et d'indifférence aux yeux du reste du pays. Ce qui est gravissime dans une zone qui se prétend être le berceau de la révolution, qui grâce aux sacrifices de ses fils, permet aux tunisiens de se targuer de vivre un semblant de liberté. Bref, çà bouge, çà se trémousse, çà hurle, çà se chamaille avec la police, çà jette des pierres, çà brûle des pneus, çà proteste, de préférence la nuit tombée... En face, il n'y a pratiquement, pas de réaction de l'Etat. Il y a, plutôt un Etat amoindri, en apparence immature et incapable de gérer de telles situations. En revanche, des réactions, il y en a, du côté de l'UGTT qui attise et qui soutient tout ce beau monde qui a attrapé la bougeotte. Un syndicat égal à sa réputation, qui ne rate pas une occasion pour voler au secours, non pas de travailleurs, mais de chômeurs, ou des casseurs qui ne savent même pas ce qu'ils revendiquent. Un syndicat qui ne recule devant aucune occasion pour décréter grève générale sur grève générale... Des réactions, il y en a, aussi, du côté de certains dirigeants de partis de second, voire de énième ordre, qui ne veulent pas rater ce qu'ils pensent être la vague de « la deuxième révolution » et qui surfent dessus, en montant au créneau et en attaquant le gouvernement sur tous les flancs, alors qu'ils sont incapables de proposer la moindre bribe de soupçon de projet d'idée, pour remédier à ces situations qu'ils ne peuvent que déplorer et condamner, nourrissant, peut-être, le secret espoir de gagner les jalons de « partie prenante » de cette révolution, du moment qu'ils n'avaient pas vu la précédente venir. Tout ceci ne fait que renforcer chez nous ce désagréable sentiment de « déjà vu » et qui nous fait craindre le pire pour ce qui reste de ce petit pays. Que Dieu préserve la Tunisie, d'abord de ses enfants, et ensuite, de ses ennemis !