Craignant que la question tunisienne ne devienne « un enjeu interne entre les partis politiques québécois », l'ambassadeur de la Tunisie au Canada, Mouldi Sakri, a décidé mercredi matin, à la dernière minute, d'annuler la conférence de presse à laquelle il devait participer au foyer de l'hôtel du Parlement. « J'ai pris ma décision en écoutant la période des questions à l'Assemblée nationale, a-t-il assuré au Journal. J'ai senti qu'une sortie publique ne servirait pas la cause de la démocratie en Tunisie et ne serait pas en notre faveur. » Lors de la période des questions, la députée péquiste Louise Beaudoin avait demandé si « le gouvernement du Québec sera à la hauteur de nos valeurs et de nos principes pour aider le peuple tunisien à régler rapidement la question du gel des avoirs de la famille Ben Ali ». La ministre des Relations internationales, Monique Gagnon-Tremblay, a répondu que « nous sommes ici devant une situation exceptionnelle, et c'est pourquoi je souhaite que le gouvernement fédéral agisse avec diligence ». Belhassen Trabelsi, beau-frère du président déchu Ben Ali, se trouve au Canada − vraisemblablement dans la région de Montréal − depuis le 20 janvier. L'ambassadeur tunisien devait notamment évoquer la demande d'extradition déposée par les autorités tunisiennes contre celui qui est présenté comme l'ancien « parrain » de la mafia politique tunisienne. La main d'Ottawa? Pendant toute la journée d'hier, la rumeur a couru qu'Ottawa avait exercé des pressions sur M. Sakri pour l'empêcher de prendre la parole à l'Assemblée nationale. Le palier fédéral est réputé pour sa sensibilité aux sujets touchant ses champs de compétence lorsqu'ils sont débattus à Québec. Niant formellement avoir reçu des appels en ce sens en provenance de la capitale fédérale, M. Sakri a cependant admis du bout des lèvres que l'annulation de sa conférence de presse lui permettait vraisemblablement de garder de bonnes relations avec Ottawa. Malgré ce démenti, deux sources dignes de foi ont juré au Journal que l'ambassadeur tunisien a reçu, hier matin, l'ordre formel d'Ottawa de ne pas s'adresser aux journalistes parlementaires de Québec. Le ministère fédéral des Affaires étrangères n'a pas répondu aux questions du Journal. Le 9 février, les députés du Québec ont adopté une motion unanime réclamant, entre autres, le gel des avoirs des proches de l'ancien président Ben Ali. Source : lejournaldequebec.canoe.ca