Selon un reportage réalisé par France 24, dans des facultés tunisiennes et dans certains quartiers de Tunis, un nouveau phénomène a fait apparition dans notre société, à savoir, les mariages coutumiers. Bien qu'il soit difficile de recenser ces cas, le phénomène est de plus en plus perceptible dans les alentours de la capitale et d'autres grandes villes. De nouvelles pratiques sociales ont fait leurs apparitions, en particulier dans certaines facultés, les mariages dits coutumiers. Il s'agit d'un contrat de mariage formellement signé entre un homme et une femme en présence de témoins. Selon le code du statut personnel ce mariage est illégal car aucun engagement légal entre mari et femme ne lie les deux couples. Les premiers cas de mariages coutumiers ont été enregistrés dans certains quartiers populaires tunisiens à l'instar de la Cité Ettadhamen et Mellassine pour se répandre ensuite dans certaines universités. Des jeunes réclament la réforme de code statut personnel A l'Université de La Manouba qui connaît par rapport aux autres universités une forte présence du Mouvement salafiste et les idées islamiques, certains étudiants ont accepté de parler du mariage coutumier. Samia, une étudiante à la filière langue française âgé de 25 ans n'a pas caché sa fierté d'avoir choisi ce type de rapport. Elle a indiqué que le mariage coutumier représentait pour elle la solution optimale pour pouvoir vivre avec son petit ami avec lequel elle menait une relation amoureuse depuis plusieurs années. Compte tenu de la difficulté de la situation matérielle des étudiants et leur désir ardent d'être avec la personne qu'ils aiment sans pour autant contrarier les mœurs et la religion, ils ont opté pour une solution plutôt « religieuse ». Dans ce contexte, ils ont lancé un appel aux autorités compétentes pour réviser le code du statut personnel et de présenter un projet de loi régissant ce type de mariage. « Rendre ce mariage légal est indispensable aujourd'hui, on souhaite que le code du statut personnel soit révisé afin de ne plus interdire ce qu'Allah a autorisé » ont clamé quelques étudiants. Ils ont choisi de s'appuyer sur les conseils de quelques « frères » (des salafistes) qui leur ont conseillé le mariage coutumier. Samia a affirmé que la Révolution du 14 janvier l'avait aidé d'une manière considérable à faire cette décision « parler aujourd'hui de la religion ou de la jurisprudence religieuse n'est plus un tabou. Avant de faire ce pas j'ai consulté quelques «frères» et sœurs à l'Université de la Manouba. Ils m'ont présenté plusieurs avis, des conseils et surtout des encouragements, mais ce qui me rassure le plus c'est le nombre croissant d'étudiants qui optent pour le mariage coutumier ». Après la victoire du parti islamique « Ennahdha », la religion a pris plus d'ampleur en Tunisie. Les gens cherchent de plus en plus à établir des relations conjugales dans le cadre de la religion sans pour autant se soucier des apports que peut procurer un mariage officielle et légal. Ceux qui encouragent le mariage coutumier assurent que ce type de mariage préserve les droits des femmes et n'entre pas en conflit avec la religion ni l'éthique. Ils appellent les jeunes à choisir ce type de lien. Le mariage coutumier, une solution aux problèmes sociaux Mouna, 27 ans, étudiante à la faculté des Humanités de Sousse a été contrainte à abandonner une relation de 4 ans la liant avec son petit ami à cause du refus de mariage par l'une des deux familles. Cependant, les deux amoureux ont trouvé une solution « efficace » pour être de nouveau ensemble sans pour autant commettre le péché d'adultère, le mariage coutumier. Selon Mouna sa décision n'était pas arbitraire ni hâtive, elle a été pleine de conviction et après avoir assisté à quelques séances de sensibilisation, organisées par certaines de ses collègues, voilées comme elle, et après avoir vu le cas d'une fille musulmane dont le cas est similaire au sien, sur une chaîne satellitaire arabe auquel le prédicateur a conseillé un tel mariage. Les mariages coutumiers pour combler des besoins psychologiques Chaouki, étudiant à la Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis a expliqué que le mariage coutumier lui a permis de rencontrer et de cohabiter avec sa petite amie sans qu'il ne soit en conflit avec ses convictions religieuses. « J'ai retrouvé un certain confort psychologique, il ne faut pas négliger que le mariage coutumier est la solution à de nombreux problèmes sociaux, il ne doit pas être ignoré», a-t- souligné. Le phénomène des mariages coutumiers est limité et voué à disparaître dans la société tunisienne Dalenda Larguech, chercheur, historienne et directrice du Centre des recherches, des études et des médias de Tunis, a précisé que ce phénomène social est apparu avec des courants salafistes et religieux en Tunisie après la révolution du 14 Janvier. « A cela s'ajoute les conditions sociales difficiles, la pauvreté et l'ignorance de quelques jeunes» a-t-elle ajouté. « Ce phénomène est limité à certains milieux sociaux et existe chez quelques étudiants. J'ai assisté à quelques sit-in des salafistes lors des manifestations du niqab, ils ont scandés « je suis venu pour défendre ma « Horma » qui signifie «ma femme» dans ce type de relation, un fait qui indique que ce phénomène est répandu dans le milieu estudiantin », ajoute Mme Larguech. Elle a précisé que le phénomène des mariages coutumiers à presque disparu de notre société depuis 70 ans et est revenu avec le retour du courant salafiste. Auparavant, ont remarquait ce phénomène dans certaines zones rurales et isolées de la Tunisie. Les gens ne pouvaient pas alors joindre les bureaux de la magistrature pour légaliser leurs mariages. Et d'ajouter que la situation politique instable en Tunisie a favorisé l'émergence de ces pratiques dans la société tunisienne. Une société distinguée par sa tolérance, modernité et ouverture à toutes les tendances nouvelles et externes. Mme Larguech a assuré que ce phénomène est voué à l'extinction, surtout que la jeunesse d'aujourd'hui, semble être victime d'interactions politiques de toutes parts.