Tweet Share TUNIS (TAP) - "La magistrature après la révolution: A-t-elle réalisé ses objectifs ou paralysé son processus ?", est le thème d'un séminaire scientifique dont les travaux ont démarré, jeudi matin, à Tunis, à l'initiative de la Coordination nationale indépendante pour la justice transitionnelle, en collaboration avec l'Association des magistrats tunisiens et l'Ordre national des avocats de Tunisie. Le président de la Coordination, Amor Safraoui a déclaré que la magistrature a connu après la révolution "des perturbations et un déséquilibre flagrant", relevant les "lacunes" dont souffre désormais le travail du magistrat et qui soulèvent, de son point de vue, "plusieurs points d'interrogation sur la capacité de l'appareil judiciaire à contribuer au changement vers la démocratie." Il a estimé que cette situation commande d'accélérer la promulgation de la loi relative à l'instance provisoire de la justice judiciaire et de la loi portant sur la justice transitionnelle, en plus de la création d'une haute instance de la vérité, de la justice et de la réconciliation, et d'une commission consultative provisoire. De son côté, le président de la République provisoire, Mohamed Moncef Marzouki a été optimiste dans son intervention, dès lors qu'il a considéré que le processus de transition est "sur la bonne voie", en dépit "des états de flottement et de manque de clarté dans plusieurs secteurs y compris celui de la magistrature", ce qui est tout à fait normal pour un pays qui vit une phase transitoire, a-t-il ajouté. Il a, par ailleurs, mis en valeur "la forte volonté politique d'introduire des réformes qui anime le gouvernement et la présidence de la République", soulignant "la maturité" qui avait distingué toutes les parties politiques le 23 octobre 2012 "à l'heure où le pays se trouvait au bord du chaos", selon son expression. Le président Marzouki a affirmé l'existence d'un "accord" sur la nécessité de créer une instance indépendante pour superviser la magistrature, ajoutant en substance : "Bien que le processus de justice transitionnelle ait accusé beaucoup de retard en raison des tiraillements politiques, il n'en demeure pas moins qu'elle sera réalisée conformément à la loi." Pour sa part, Mme Kalthoum Kannou, présidente de l'Association des magistrats tunisiens a indiqué que le secteur de la magistrature "n'a pas changé après la révolution", aussi bien au niveau de l'institution judiciaire qu'au niveau de la situation des magistrats, relevant que le magistrat exerce aujourd'hui ses fonctions sous la pression du pouvoir judiciaire et de la rue. Elle a ajouté que les mesures décidées récemment par le ministre de la justice et relatives notamment au mouvement dans le corps des magistrats et au conseil supérieur de la magistrature, sont de nature à réduire l'indépendance et l'efficience de la magistrature. Intervenant à cette occasion, le juge Abdelfatteh Khorchani a mis l'accent sur "la marginalisation" de la magistrature après la révolution et qui s'était traduite par le transfert de ses prérogatives à la commission nationale d'investigation sur la vérité et par l'absence de tout rôle du magistrat dans la consécration de la justice transitionnelle. M. Mokhtar Trifi, président d'honneur de la ligue tunisienne des droits de l'homme a, quant à lui, soutenu que la formation actuelle du magistrat et sa situation administrative et juridique ne l'habilitent pas aujourd'hui à jouer convenablement son rôle. Parmi les questions inscrites à l'ordre du jour de ce séminaire, qui se poursuivra durant deux jours, figurent notamment "Les répercussions de la non-création d'une instance supérieure de la justice judiciaire sur l'indépendance du pouvoir judiciaire", "Une approche critique des décisions du ministre de la Justice en rapport avec l'indépendance de la magistrature" et "la justice militaire". Tweet Share Suivant