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Chronique, le mot pour le dire : la part de la rebellion
Publié dans Tunivisions le 24 - 07 - 2013

« A l'ami, qui me disait, l'autre jour, qu'il ne comprenait rien à mes errances dans les sentiers – ô combien battus ! – du verbe en quête d'élan, je dirais, sans passer par la voix, qu'il n'est pas dans les us des aventuriers de cultiver des projets. Si je réussissais un jour à imposer leur voie à mes pas indociles, j'irais sur la première colline pour y creuser la tombe qui abriterait mes cendres. Je n'attendrais pas, pour rendre l'âme, que la faucheuse vienne frapper à ma porte. L'écorché meurt de lui-même le jour où, se préparant au périple, il découvre qu'il a perdu l'appétit ».
Testament d'outre-tombe, p. néant
Le viol – entendez l'écart – n'est pas en soi une cause que pourrait se proposer, en toute conscience, ou en toute inconscience, le forçat du calame – celui pour qui la plume est une sorte de raison d'être ou, plus précisément, d'un mal d'être dans un monde chaotique où la piété se mêle si merveilleusement à l'horreur – dont le souci majeur est de réussir l'éternelle gageure : celle d'affranchir le verbe de toutes sortes d'entraves, de dogmes et d'églises. C'est là l'œuvre d'un talent iconoclaste, une œuvre qui est la vie même, sans compter qu'il n'y a personne qui soit prête à reconnaître qu'elle cultive l'écart. Ce dernier est la règle – une règle rentre autres – aux yeux de celui qui transgresse une norme reconnue. Sade n'avait rien d'un sadique : d'ailleurs, le mot n'existait pas encore Mais, dans l'optique des maîtres-despotes en herbe, cette démarche relève de l'hérésie et devrait être promptement et impitoyablement éradiquée. Cela semble être le cas de ceux qui, d'un simple froncement de sourcils, condamneraient au bagne une légion d'Amina Tyler et leurs émules d'outre-mer.
Le philosophe, pour des raisons de clarté, et non d'esthétique comme c'est le cas ici pour le philosophe-artiste que je suis (qui n'oserait jamais condamner la beauté au silence, convaincu qu'il est que cette dernière ne prospère que dans les Lumières), opterait pour transgression, terme consacré, mais qui a l'inconvénient d'être, à l'instar des honorables dames Justice, Egalité et Liberté, un mot saturé ou, ce qui revient exactement au même, pollué. En effet, dans la bouche d'un Rached Gannouchi, la philosophie est l'exact synonyme du mimétisme et de la foi. C'est la raison pour laquelle il ne peut s'empêcher, du haut de sa tribune de mage – je veux dire de sage – de jouer au magistrat, des fois-mêmes au bon Dieu. Il est donc normal qu'il opte pour la cité et condamne la jungle, celle-là même que la Femen Amina s'est permis d'introduire dans la polis où il s'imagine régner en maître incontesté.
C'est là un crime de luxure, une tentative de profanation qui justifie, entre autres, que cette élève espiègle ait été arrachée à son école pour être jetée dans un cachot, du fond duquel elle ne serait pas, comme ses camarades de France et d'Allemagne, élargie.
Le serait-elle jamais ?
L'exploit du philosophe-mage-messie-magistrat, qu'est R. Gannouchi, qui n'a rien d'un despote éclairé, est un peu celui du rimailleur qui rêve, non qui ambitionne, compte tenu du fait qu'un prédicateur légifère et ne rêve point, de transformer, mieux encore de pervertir, le monde. Un poète rêverait de le transformer, de le faire plus beau qu'il ne l'est. En fait, contrairement au poète qui cible la beauté, le philosophe-prédicateur R. Gannouchi cible, lui, l'austérité et la hideur. Pour réussir son exploit, il exige, ni plus ni moins, que le verbe se défasse de son carcan discursif, c'est-à-dire de l'impérialisme du signe et de la graphie de telle manière que ni le cri, ni la larme, ni le rire, ni le silence (de ses victimes présentes et à venir) n'auraient besoin de transiter par le verbe (et resteraient, de ce fait, impunis), et que ce dernier, dans son gosier béni, embrasse tous les modes d'expression présents et à venir, réunis dans l'épopée grandiose des temps primordiaux que R. Gannouchi s'emploie à actualiser dans la grisaille d'un présent si terne, si désolant sous la forme d'une injonction : Obéissez ! Amina Tyler, du fond de sa prison, n'arrête pas de répéter, elle, qu'elle ne se prosternerait jamais parce qu'elle se sent libre dans sa cellule, la plus libre des Tunisiens qui ne font rien pour empêcher le retour de l'infamie totalitaire.
C'est là un crime de lèse-majesté qui explique, entre autres, qu'elle n'ait pas été, à l'instar de ces camarades d'Occident, élargie.
Le serait-elle jamais ?
On pourrait imaginer que, dans un avenir relativement proche, et compte tenu de tant de paradoxes, un nouvel ordre langagier mettrait fin au règne de l'ancien : l'éden se dirait alors géhenne et vice versa. L'idiome d'un R. Gannouchi devient alors si obscur, à ce point abscons qu'il devient tout à fait inintelligible pour les Amina Tyler qui n'ont pas encore eu l'occasion de se produire sur la scène de la rébellion. Il est un fait que, dans l'état actuel des choses, les Tunisiens, et les Tunisiennes en particulier, ne parlent plus tout à fait la langue de leurs ancêtres, en tout cas plus celle de cet aïeul qui entend leur imposer, en 2013, la loi du néant, celle de ses hantises du septième siècle. Nombreux sont ceux qui, aujourd'hui, n'entendent rien au galimatias de R. Gannouchi, de ses gens, de ses hooligans (ces Ligues de protection de la révolution auxquelles le premier ministre, le bras droit du maître, soucieux de leur bien-être, leur suggère de changer de nom) et de ses enfants. Quinze siècles séparent cet homme de ses concitoyens. C'est pourquoi ces derniers ont de la peine de se situer dans la mappemonde où il lui plaît de semer à tour de bras des jungles et des cités. Ils ne savent plus au juste si leur minuscule Tunisie fait toujours partie du monde civilisé ou si, comme le soutient l'austère redresseur de torts, elle a été, par la faute d'Amina Tyler, investie par la jungle !
C'est là un attentat au sacré qui explique, entre autres, que cette dévergondée d'Afrique n'ait pas été, comme ses acolytes païennes d'Europe, élargie.
Le serait-elle jamais ?
Cette velléité de révolte qui anime cette jeune fille, frêle et vulnérable, insouciante jusqu'à l'inconséquence, confiante dans sa bonne étoile, imbue d'une foi où il n'y a pas la moindre place pour les certitudes rassies de ce R. Gannouchi qui, semble-t-il, ne l'impressionne ni par son accoutrement, ni par son débit nasillard, ni par l'arrogance que lui confère un trop-plein d'assurance, dans lequel Amina Tyler, du fond de sa cellule, décèle les accents d'une angoisse si aiguë qu'elle ne tarderait pas, se promet-elle, de ruiner, tôt ou tard, le sang-froid de ce monstre sacré. Elle réalise alors que cet appareil, qui s'acharne sur elle dans l'espoir de la fléchir, a la trouille, une trouille du diable.
Amina Tyler réalise alors qu'elle fait peur à ses juges, à ses bourreaux, au prédicateur suprême qui se surprend à baragouiner chaque fois qu'il est amené à parler d'elle à son parterre docile et obséquieux. Elle réalise, en même temps, que c'est cette velléité de révolte qui, en elle, ne désarme point, subjugue ces mâles, les trouble, leur fait perdre leurs moyens. Se présenter devant son magistrat, sans ce hideux safsari que la procédure judiciaire la contraint – en principe – à porter, est, en soi un acte d'insubordination qui ne pourrait qu'aggraver son cas et fournir, à ses juges, un argument supplémentaire de sa culpabilité. Car, c'est d'un acte de viol qu'il s'agit là, d'autant plus insupportable qu'il est le fait d'une femme. Dans une société phallocratique, les hommes admettent mal, en fait pas du tout, d'être violés par une femelle, car il est dans l'ordre des choses que l'homme viole et que la femme se contente d'assurer le rôle de la victime, consentante si possible.
C'est que le viol, qui est l'essence même de la vie, est un exercice périlleux dont seul l'homme est – toujours en principe – capable de réussir. C'est, en tout cas, ce que croient ces mâles aguerris que dérange, au plus haut point, le mauvais précédent d'Amina Tyler. Se laisser tenter par l'écart et la marge, oser se détourner des sentiers battus et se dresser, les mains nues, dans l'arène où se pavanent les certitudes et les dogmes, est la voie de la damnation dans un univers où la flagornerie et la peur sont le prix du salut : c'est là un exercice qui n'est pas pour celle dont la place est l'alcôve. Cette Amina, âgée de dix-neuf printemps, aurait dû être, depuis longtemps déjà, au service de la communauté. A son âge, elle aurait pu être la mère de trois ou quatre enfants !
Amina a préféré se dresser, toute seule pour le moment, dans l'arène où il ne s'est jamais produit de gladiateur de son sexe. Rien que pour cela, elle devrait moisir en prison le plus longtemps possible, le temps nécessaire pour que son affaire se tasse et que le monde oublie jusqu'au souvenir de cette jouvencelle rebelle qui a osé, l'espace d'un caprice, donner sa nudité en spectacle. Au fait, ce n'est pas de s'être dénudée que le maître de céans lui tient rigueur. Ce qu'il ne lui pardonnerait jamais, c'est d'avoir servi d'exemple à toutes les têtes brûlées du pays, de sorte que, en moins d'un mois, une multitude de factions ont vu le jour qui prêchent toutes la rébellion. S'il n' y avait pas cette satanée môme, une véritable lionne comme semble l'indiquer son nom, R. Gannouchi aurait continué de piloter peinardement le navire tunisien.
C'est là un complot qui explique, entre autres, qu'au mage de Mont-plaisir se soit joint celui qui joue au président à Carthage pour dénoncer, l'un et l'autre, le putsch qui compromettrait la légalité : l'ordre sacré d'un monde que R. Gannouchi croyait pouvoir pérenniser. C'est cela qui explique qu'Amina Sbou'i, mieux connue sous le nom de Tyler, n'ait pas été, à l'instar de ces immondes espionnes d'outre-mer, élargie.
Le serait-elle jamais ?


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