Nombreux sont les gens qui ont l'esprit fixé sur le prochain gouvernement de Mehdi Jomâa, dont l'annonce est attendue dans trois ou quatre jours pour certains et dans au moins deux bonnes semaines pour d'autres. Le plus curieux dans la situation, c'est que ces mêmes gens s'activent, de façon insensée, même pas à avancer, carrément à annoncer parfois des listes complètes des membres de ce gouvernement qu'on semble attendre comme le dernier miracle de l'humanité. Passons sur tous ces volontaires qui sont venus s'exhiber sur les trottoirs du pouvoir, sous prétexte qu'ils sont prêts à se donner gratuitement, comme si gouverner était une partie de football entre gens du quartier. Ils ne savent peut-être pas qu'en s'étalant de la sorte, comme le marché hebdomadaire d'une ville, ils dévaluent d'abord leurs personnes qu'ils chercheraient à rehausser par des CV concoctés et maquillés à différents usages. Arrêtons-nous plutôt à ces responsables politiques qui usent de leurs statuts facebook, de leurs blogs, de pages internet et d'espaces médiatiques rapides à la détente, pour nous divulguer ces scoops nés de leur propre imagination, car en fait, ils ne font que vouloir prendre leurs désirs pour des faits et leurs rêves pour des réalités. Il est évident qu'il y a forcément anguille sous roche à se livrer à de telles pratiques. Un coup d'ascenseur par-ci, un coup d'épaule par-là, et ça parle de laisser le nouveau chef du gouvernement libre de son choix !? Nous l'avons souligné précédemment, Mehdi Jomâa bénéficie d'un préjugé favorable de par plusieurs données personnelles et conjoncturelles ; il montre actuellement une compétence d'écoute intéressante et prometteuse ; il est beaucoup moins bavard que plusieurs responsables ou élus qui semblent n'être là où ils sont que pour profiter de la visibilité médiatique ; il paraît respectueux des formes d'usage dans le domaine, de façon à ne pas insulter l'avenir des relations diplomatiques ou de coopération ; bref, il se présente avec un profil qui coïnciderait aux conditions et aux ambitions de l'étape. Pourquoi donc ne pas le laisser agir dans la sérénité qui semble de caractériser et dont on voudrait vraiment si l'on n'a sous les yeux que l'intérêt de la Tunisie ? A la limite, si on est vraiment convaincu de quelqu'un, pourquoi ne pas en faire la proposition discrètement et laisser la rue et la place publique en dehors de ce travail dont on a voulu charger spécifiquement le nouveau chef du gouvernement ? Faire un vulgaire étalage de ce cinéma mal à propos peut parfois nuire à certaines personnes qui pourraient constituer des cadres plausibles dans le prochain gouvernement. En tout cas, il reviendra à M. Mehdi Jomâa, sans doute discrètement conseillé par des compétences de confiance et riche de ses consultations avec presque tous les responsables attitrés, de raisonner ses choix en bonne âme et conscience en considération de la mission qui est la sienne et qu'il a promis d'honorer. Car bientôt, il va avoir affaire à d'autres dossiers plus importants et plus brûlants. Nous pensons que, comme signal fort sur la voix de ‘indépendance de l'administration, sa première tâche sera de doter tous les gouvernorats de gouverneurs honnêtes, indépendants et compétents, car c'est eux qui vont porter sa politique dans les régions et c'est eux qui procéder au nettoyage des administrations régionales et locales des responsables qui ne sont pas à leur place, du point de vue des objectifs de cette ultime étape de transition. Cela se fera parallèlement avec la tâche de pleine sécurisation du pays et de relance économique à pleins gaz ! Quant aux vendeurs à la sauvette des nouveaux postes gouvernementaux, ils pourraient, au moins pour un moment, laisser la machine de l'Etat respirer un peu d'air pur, ou presque pur, car sans cela le pays risque d'en étouffer.