«Aujourd'hui, l'UGTT, en tant que syndicat, doit faire sa propre révolution», estime Mustapha Ben Jaafar, président du parti Ettakatol. «La question de l'union des travailleurs est très délicate, et si je devais en parler, je pourrais en dire très, très long sur les personnes, sur la stratégie de l'UGTT, sur ses rapports avec la dictature... mais ce n'est pas le moment et j'ai toujours respecté l'indépendance des syndicats». Le moment n'est pas aux critiques ou aux reproches, estime Mustapha Ben Jaafar, président d'Attakatol qui s'est exprimé à l'occasion d'un petit déjeuner de presse organisé par le Centre des jeunes dirigeants (CJD), car le pays vit une phase transitoire. L'UGTT a toujours joué un rôle politique, et cela depuis l'indépendance du pays, du fait qu'elle a gardé des rapports très spéciaux avec l'Etat postindépendance. Le Syndicat constituait un contrepouvoir dans la mesure où, pendant longtemps, toute la politique économique et sociale a été d'une certaine manière négocié entre le parti au pouvoir, le «Destour» et le syndicat. Dans le premier gouvernement de l'indépendance, il y avait 5 ou 6 ténors de l'UGTT: «nous sommes restés dans cette démarche. En 1981, il y a eu un quota de 23 ou même 27 représentants de l'UGTT. Aujourd'hui, certaines voix de l'UGTT s'élèvent pour exiger des représentants de l'Union au sein de la Constituante, ce que je trouve totalement aberrant et je l'ai exprimé sur les médias». La démarche de l'UGTT pour occuper plus le terrain politique est en train de perdre son souffle et il est certain, indique M. Ben Jaafar, qu'après le 24 juillet, le syndicat reprendra son rôle initial pour la défense des droits de travailleurs. «Il est malsain que, sous prétexte que l'UGTT a eu un grand homme appelé Farhat Hached, elle trouve motif à intervenir à tous bouts de champs. Ce qui autorise tous les dérapages. L'UGTT doit passer à un autre cap pour redéfinir le rôle du syndicat dans la Tunisie nouvelle et moderne». Il est vrai par ailleurs, rappelle le président d'Ettakatol, que les unions régionales de l'UGTT ont joué un rôle important dans le soutien des jeunes manifestants à l'intérieur du pays, et ont uvré à ce que la révolution ne dérape pas et l'ont même protégée. «Il faut le reconnaître, car grâce à cela, on a parlé de révolution calme. Sans les syndicalistes, à Sfax à titre d'exemple, à Tunis, l'encadrement des manifestations de solidarité a été fait en partie grâce à l'UGTT». Merci UGTT et si maintenant les syndicats continuaient leurs bonnes uvres en appelant eux-mêmes les travailleurs à protéger leurs entreprises, en négociant avec eux pour un dialogue sain et constructif, ne serait-ce pas là la meilleure marque du patriotisme syndical?