Sauvez la STIP ! C'était déjà le titre d'un des articles publiés par webmanagercenter en mars 2004 sur la situation de l'unique société tunisienne de fabrication des pneumatiques. Cet appel s'appuyait sur la multiplication, au cours de l'exercice 2003, d'événements négatifs qui ont abouti au terme de l'exercice à un déficit de 10 millions de dinars. Début de la série noire pour la STIP
L'ancienne direction de l'entreprise justifiait alors les difficultés de ladite entreprise, notamment, par l'arrêt de la production pendant une période de 37 jours pour cause de connexion de la nouvelle unité de production ALL STEEL, à une grève de 6 jours, à un dépassement au niveau du coût du projet, à la baisse du chiffre d'affaires, à l'arrêt des exportations vers l'Irak et par le poids de la dette généré par l'investissement ALL STEEL.
Au vu de ces éléments et des répercussions actuelles de ces événements et décisions sur les résultats de l'entreprise, on ne peut s'empêcher de se poser au moins deux questions : - Dans quelle mesure des éventuels problèmes d'organisation, de planification et de gestion de ce projet ALL STEEL ont-ils pu affecter les résultats de l'entreprise en 2003 et celles des exercices suivants ?
- Les choix pris en matière de financement de ces investissements ont-ils été les bons, surtout quand on voit l'évolution des charges financières ? Des résultats et des ratios alarmants
Si la baisse du chiffre d'affaires en 2003 avait été justifiée par les problèmes liés à l'entrée en production de la nouvelle unité ALL STEEL, la reprise de la croissance des ventes en 2004 et au cours du premier semestre 2005 ne suffit visiblement pas à faire face à l'augmentation des dotations aux amortissements, qui passent de 10,02% en 2003 à 20,21% du total des produits d'exploitation en 2004 ; soit en valeur de 5,7 MDT en 2003 à 16,1 MDT en 2004.
Du côté des charges financières, la situation est encore plus alarmante, puisqu'on assiste à un doublement, d'un exercice à l'autre (2002-2005), du ratio «Charges financières/Total produits d'exploitation», de 2,62% en 2002 ils passent à 4,09% en 2003, à 8,87% en 2004 et à 16,07% au premier semestre 2005.
2002 2003 2004 2005 (1erS) Charges financières 1.887.403 2.332.933 7.084.119 7.482.823 Ratio «CF/TPE» 2,62% 4,09% 8,87% 16,07% Côté résultat, le dernier bénéfice remonte à l'exercice 2002 avec 1.482.980 de dinars et depuis 2003, c'est une succession de déficits de plus en plus importants. De 10,1 millions de dinars, le déficit passe en 2004 à 15,6 millions de dinars et il est déjà à 14,6 millions de dinars au terme des premiers six mois de l'exercice 2005. Elle perd ses capitaux propres A ce rythme, la STIP risque de se retrouver à la fin de l'exercice 2005 avec un total «capitaux propres» proche de zéro. Ses capitaux propres sont, en effet, passés de 41% du total bilan à seulement 10% à la fin du 1er semestre 2005 ; soit de 60,2 millions de dinars à 19,7 millions de dinars pour un total bilan actuel de 190,1 millions de dinars. Evolution de la répartition de l'actif (2002-1er Semestre 2005) Dans le même temps, les concours bancaires passent de 29,8 MDT à 88,2 MDT au 30 juin 2005. et bascule dans le rouge Introduite en Bourse fin 2001 (27 décembre 2001), la STIP était alors considérée comme étant l'une des entreprises industrielle nationales à fort potentiel, et ceux qui la connaissent d'un peu plus près savent qu'il s'agit d'une entreprise qui était souvent, sur le marché financier, en position de placements et courtisé par la plupart des banques de la place. Qu'est-ce qui l'a fait basculer en si peu de temps (2 ans) ? L'investissement ALL STEEL ? Probablement. Mais n'aurait-on pas pu prévoir ces développements ? Tous les scénarios ont-ils été envisagés ? A ce rythme, on va finir par poser trop de questions et pas forcement toujours les bonnes. Aujourd'hui la situation est là et la plupart des indicateurs sont loin d'être encourageants, bien au contraire ; regardez le dernier rapport de l'exercice 2004 : Echéances impayées, défauts de déclarations d'impôts (malgré une créance fiscale de 12 MDT non encore restituée par l'Etat), une créance sur la filiale marocaine représentant une année de chiffre d'affaires de cette dernière et plus de 40% du total créances clients de la STIP. Evolution des cours de l'action STIP (Depuis son introduction en bourse) A la Bourse de Tunis, le titre de la STIP connaît une évolution conforme à l'évolution de la situation de l'entreprise, il vient de perdre 39% de sa valeur au cours des 8 derniers mois 2005, il termine la séance du 26 août 2005 à 5 DT (pour un nominal de 10 DT). Sachant que l'action avait été introduite en Bourse à 16,100 DT (en décembre 2001), l'entreprise affichait alors des bénéfices de 7 à 9 millions de dinars. Privatisable et dans la liste, mais probablement plus maintenant. Avec un développement pareil de la situation financière de l'entreprise, elle se retrouve beaucoup plus dans la situation d'une entreprise en difficulté ayant besoin d'un plan de restructuration.