En fin de compte, la guerre d'huile d'olive, qui a fait couler tant d'encre, n'aura pas lieu. Contre toute attente, le gouvernement vient d'annoncer tout un programme pour résorber les difficultés rencontrées par les exportateurs qui ne parviennent pas à écouler un stock invendu de 20.000 tonnes à leur charge. A l'origine de ces difficultés, une mauvaise évaluation de la demande extérieure par des exportateurs privés. Ces derniers ont été induits en erreur par des informations faisant état d'une baisse significative de la production du premier exportateur mondial d'huile d'olive, l'Espagne, et son corollaire, l'émergence d'opportunités significatives d'écoulement fort rémunératrices à l'étranger. Selon cette évaluation, quelque peu hâtive, le marché mondial aurait été demandeur de 600 mille tonnes pour une consommation totale, estimée, en période normale, à 2,3 millions de tonnes. D'où à la clef un stock en souffrance évalué à 30.000 tonnes au titre de toute l'année 2006 et pour lequel on ne trouve pas acquéreur. Interpellé au parlement, jeudi 26 octobre 2006, sur la question, Mohamed Habib Haddad, ministre de l'Agriculture et des Ressources hydrauliques, a annoncé qu'un arrangement a été conclu en vue d'écouler le stock d'huile d'olive en souffrance sur les marchés espagnol et italien. Rien n'a, par contre, été dit sur les conditions dans lesquelles ces quantités seront écoulées. Deux questions méritent d'être posées dès lors : Est-ce un arrangement entre privés tunisiens et privés de ces deux pays ? Ou est-ce que les quantités à exporter par les privés seront expédiées aux dépens ou dans le cadre du quota d'exportation de l'Office national de l'huile concédé par l'Union européenne? Aucune précision n'a été apportée à ce sujet. Le ministre a annoncé également que les banques de la place ont été autorisées à accorder aux exportateurs et huileries des crédits pour les aider à couvrir les dépenses à engager au cours de la nouvelle campagne oléicole (2006-2007). Autre mesure annoncée au parlement : un prix de référence sera incessamment fixé pour éviter les récriminations de toutes sortes apparues l'années dernière et contenir la colère des consommateurs, scandalisés par la cherté de ce produit de terroir. Les exportateurs d'huile d'olive, qui avaient fait preuve, lors de la saison précédente, d'un manque de professionnalisme manifeste étant incapables de décrypter l'état du marché, bénéficieront, toujours selon le ministre, d'un rééchelonnement des dettes contractées, au cours de la campagne précédente (2005-2006). Résultat : l'ensemble des revendications des exportateurs sera satisfait à l'exception d'une seule : celle du report de la date d'ouverture de la récolte oléicole qui aura lieu, comme d'habitude, au mois de novembre dans toutes les régions du pays. Ces bonnes nouvelles accueilles avec soulagement par les exportateurs et propriétaires d'huileries dont certains s'apprêtaient à mettre la clef sous la porte, viennent couronner, avec succès, plusieurs réunions que la corporation des oléiculteurs a tenu avec les ministres concernés, en l'occurrence, M. Mondher Zenaïdi, ministre du Commerce et de l'Artisant, et M. Mohamed Habib Haddad, ministre de l'Agriculture et des Ressources hydrauliques. Au cours de ces réunions, les ministres ont rappelé aux oléiculteurs leurs responsabilités et les engagements qu'ils avaient pris pour appuyer les efforts de l'Etat en matière d'exportation. Lors de la consultation régionale sur les exportations, tenue à la mi août 2006, à Sfax, Mondher Zenaïdi avait rappelé en termes très simples que la suppression, en 1994-95, du monopole exercé, depuis 1972, de l'organisme public, l'Office National de l'Huile (ONH), n'a été décidée que dans l'espoir d'atteindre deux objectifs majeurs : la promotion de l'huile d'olive biologique et le développement du conditionnement de cette huile. A ce sujet, le ministre a tenu à préciser que, jusqu'au mois d'août 2006, seules 500 tonnes sur un total de 100.000 tonnes exportées, étaient conditionnées, soit moins de 1% contre des moyennes de 45% et 60% en Italie et en Espagne. Moins direct, Habib Haddad leur a proposé comme solutions «de diversifier leur offre, d'améliorer la qualité, d'accorder plus d'intérêt à l'emballage et de déployer davantage d'efforts en vue de mieux faire connaître les spécificités de l'huile d'olive tunisienne à l'étranger». C'est dire que la perche de salut ponctuelle lancée au profit des exportateurs ne résout en rien les problèmes structurels dans lesquels se débat le secteur oléicole. Elle ne doit pas occulter la nécessité d'apporter des solutions profondes à un secteur qui navigue toujours à vue. Rappelons, enfin, que La Tunisie produit en moyenne 170 mille tonnes par an dont 35 à 50 mille tonnes sont consommées localement tandis que le reste est supposé totalement exporté, la plupart du temps en vrac, c'est-à-dire dans des conditions généralement peu compétitives. L'exportation d'huile d'olive constitue une importante source de devises tant elle génère des rentrées de l'ordre de 700 millions de dinars par an. C'est le cas de l'exercice 2004. En 2005, les exportations d'huile d'olive ont atteint 476,7MD, enregistrant ainsi une régression de 32,7%.