La Tunisie s'est fixé des objectifs ambitieux pour le 11ème plan de développement (2007/2011). Elle aspire intégrée définitivement la mondialisation et rejoindre le peloton des pays développés. Mais, pour concrétiser ses objectifs, le pays a besoin de financement extérieur. Les ressources intérieures sont désormais, à elle seule, insuffisantes pour réaliser toutes les ambitions et tous les projets, grandioses du reste, inscrit dans le 11ème plan. A cet effet, le ministère du Développement et de la Coopération internationale a convié l'ensemble des bailleurs de fonds internationaux afin de les mobiliser en vue de soutenir la Tunisie dans la concrétisation de ses projets. On notera la présence de la Banque mondiale, du Fond monétaire international, de la Société Financière Internationale ainsi que la Société islamique pour le développement du secteur privé (SID). Une société qui croit profondément dans le potentiel du secteur privé tunisien et qui est déterminée à le soutenir. Dans cette interview, le Dr. Ali Abdelaziz Soliman, Président Exécutif, Directeur Général de la SID nous livre ses impressions et ses commentaires sur le secteur privé tunisien, nous présente la SID, ses objectifs, ses missions et sa vision globale.
Par ailleurs, le patron de la SID fait un bilan que l'on peut qualifier de positif sur la société dont le souci premier est le développement et la promotion du secteur privé dans l'ensemble de ses pays membres.
Pouvez-vous, d'abord, nous présenter la Société islamique pour le développement du secteur privé (SID) ?
Dr. Ali Abdelaziz Soliman : La Société Islamique pour le Développement du secteur privé (SID) est une institution du Groupe de la Banque Islamique de développement (BID). Elle a été créée en 1999 par le Conseil des Gouverneurs de la BID. Il s'agit, au fait, d'une institution financière internationale et multilatérale dont la finalité est le développement de ses pays membres, via le financement du secteur privé; un secteur qui, avec la globalisation, l'ouverture des frontières et la concurrence de plus en plus rude est appelé à assurer un rôle de premier plan dans le développement. Pour le moment, ils sont 45 pays à avoir ratifié les statuts de la SID dont les actionnaires sont la BID, à hauteur de 50%, les pays membres à hauteur de 30% et des Institutions Financières Publiques à hauteur de 20%. Le capital autorisé de la SID est de un milliard dollars dont 500 millions de dollars constituent le capital souscrit.
La SID concentre ses interventions, opérations et activités sur les institutions du secteur privé conformément aux principes de la « Shari'a » islamique. Et, outre les financements et les services financiers qu'elle dispense la SID apporte-t-elle son soutien au secteur privé en vue de l'adoption de politiques à même d'élargir et de moderniser les entreprises, d'une part et à développer les marchés des capitaux d'autre part. Sans compter que la SID cible les projets générateurs d'emplois, et à tendance exportatrices. La SID intervient en Asie du Sud Est, en Asie centrale, au Moyen Orient, en Afrique du Nord et en Afrique Subsaharienne.
Quels sont les objectifs, la mission et par la même, la vision de la SID ?
Partant de la conviction que le secteur privé est un des principaux moteurs de la croissance économique et du développement, les objectifs de la SID se résument à l'identification des opportunités dans le secteur privé, la mise à la disposition des entreprises d'une large gamme de produits et des services financiers et la mobilisation des ressources supplémentaires pour le secteur privé dans les pays membres de la SID.
Quant à la vision de la société, c'est celle d'en faire une institution islamique multilatérale de premier plan pour le développement du secteur privé. Enfin, je souligne que la SID complète à travers sa mission le rôle de la BID à travers le développement et la promotion du secteur privé
Quels bilan pouvez-vous apporter des interventions de la SID, au cours des dernières années ?
L'expérience des sept premières années de la SID a été concluante. La SID a financé 82 de projets dans 19 pays. Ces investissements ont mobilisé une enveloppe de 487 millions de dollars dans des secteurs variés tels que l'infrastructure, l'énergie, l'industrie, la télécommunication, la santé, l'éducation, le secteur financier et le service conseils.
Rien que pour l'exercice 2006 le Conseil d'Administration de la SID a approuvé 17 nouveaux projets pour un montant global de 123 Millions de dollars. A cela s'ajoute cinq autres projets approuvés pour l'augmentation de la part de la SID dans les capitaux de projets déjà existants pour un montant total de 17 millions de dollars.
Est-ce que la SID finance directement les entreprises ?
Oui. Notre contribution au financement des projets est à partir de deux millions de dollars par projet. Nous intervenons soit en financement à terme en protégeant notre risque avec les garanties usuelles appréciées au cas par cas, et non des garanties souveraines ou bancaires, soit en participant dans le capital social en partageant avec le promoteur le risque encouru par l'entreprise. Pour chacun des dossiers étudiés, nous apprécions les caractéristiques de l'entreprise et la faisabilité du projet proposé. Et, pour ce faire, nous procédons à une investigation circonstanciée avant de soumettre le projet à l'approbation du Conseil d'Administration.
Pour les projets de taille moindre, nous intervenons à travers des lignes de financements que nous mettons à la disposition de banques locales ou régionales.
Quels sont alors, les critères d'éligibilité ?
La SID finance les nouveaux projets et les projets d'extension d'entreprises déjà opérationnelles. Aussi, la SID intervient dans le financement de privatisation. L'impact sur le développement des économies des pays membres est un critère fondamental. Par ailleurs, le secteur privé doit détenir un minimum de 51% du capital des entreprises financées.
Et, pour financer ces opérations, est-ce que vous intervenez uniquement sur vos ressources propres ?
En plus des financements que nous accordons sur nos ressources propres et du risque que nous supportons directement. La SID apporte son soutien aux entreprises en mobilisant les capitaux sur le marché, en arrangeant des syndications de dette et des placements de capitaux. Les institutions financières sont conscientes du rôle pionnier de la SID et envisagent favorablement de se joindre à nous dans le financement des projets que nous retenons.
Vous êtes à Tunis pour participer à la Conférence des bailleurs de fonds pour le financement du 11ème plan de développement de la Tunisie (2007/2011). Quelles opportunités de coopération pourraient-ils y avoir avec la Tunisie?
La Tunisie se confirme de plus en plus comme un modèle de réussite économique et financière. Elle est citée comme référence par les différents observateurs et par les Agences de Notation internationales. En effet la Tunisie se distingue par la réussite et le développement exceptionnelle de plusieurs secteurs porteurs dont celui de le l'industrie, des services et de l'agriculture, ainsi que par une contribution de plus en plus importante du secteur privé, dans la formation du PIB. Ceci s'est traduit par une croissance soutenue et stable. De surcroît, la stabilité politique et sociale ainsi que l'excellent niveau d'enseignement et des infrastructures constituent des avantages comparatifs indéniables pour les Investissements Directs Etrangers (IDE).
La Tunisie est parvenue en effet, au cours des dernières années à drainer, à un rythme constant et soutenu, les investissements étrangers. Nous sommes persuadés que l'entrée en vigueur du traité de libre échange avec l'Union Européenne rendra la destination Tunisie encore plus privilégiée pour les IDE. Par ailleurs, l'entreprise tunisienne a atteint un niveau qui lui permet d'assurer un rôle plus important et à dépasser les frontières tunisiennes, en s'internationalisant et en s'implantant à l'étranger. Les entreprises tunisiennes ont la capacité d'intervenir dans les pays voisins en Afrique du Nord. Aussi, ces entreprises tunisiennes peuvent jouer un rôle majeur dans le développement de l'Afrique Subsaharienne.
Dans ce contexte, la SID peut apporter sa contribution dans la promotion du site tunisien en accompagnant les IDE vers la Tunisie qui se confirme de plus en plus comme un portail vers l'Europe disposant d'atouts privilégiés et d'une grande compétitivité. Parallèlement, la SID peut également accompagner les entreprises tunisiennes désireuses d'investir à l'étranger.
La SID peut effectivement financer de telles opportunités et aussi aider à mobiliser d'autres institutions financières internationales et régionales.
Nous venons aujourd'hui une nouvelle fois à Tunis à l'occasion du forum sur le financement du XIème plan de développement pour confirmer la volonté de la SID de contribuer au développement de la Tunisie, de son économie et de son secteur privé et pour inviter les milieux d'affaire tunisiens à nous soumettre leurs projets de développement afin qu'ils soient étudiés avec soins par nos équipes et experts en vue de leurs éventuels financement.
Propos recueillis par Insaf Boughdiri du quotidien Le Renouveau