Les prix de vente au public des produits pétroliers ont été augmentés le 6 juillet 2008. Il s'agit du 9ème ajustement en 3 ans. Le dernier est intervenu le 2 mars 2008. Le litre d'essence super ou sans plomb a été augmenté, cette fois ci, de 70 millimes passant de 1,250 dinar à 1,320 dinar. Idem pour le litre du gasoil, dont le prix est passé à 960 millimes, contre 890 millimes auparavant. La bouteille de gaz de pétrole liquéfié (13 kg) est vendue depuis cet ajustement à 7,500 dinars, contre 7,200 dinars jusqu'au 5 juillet 2008. Officiellement, le prix du carburant demeure subventionné. A titre indicatif, l'essence est subventionné à hauteur de 280 millimes par litre (et non de 300 millimes) comme il a été publié dans les communiqués officiels, le gasoil dans la limite de 540 millimes (et non de 600 millimes comme ça a été repris par les médias) et le GPL au niveau de 12,500 dinars (et non de 12,800 dinars comme l'ont reproduit les médias officiels). Les prix réels de ces trois produits s'élèvent respectivement à 1600 millimes, 1500 millimes et 20 dinars. Il est bien évidemment certain que ce 9ème ajustement ne sera pas le dernier. Lors d'une récente réunion avec les partenaires sociaux (4 juillet 2008), le Premier ministre a été très clair. Il a déclaré que «si le prix du baril se maintient à son niveau actuel, 140 dollars le baril, jusqu'à la fin de l'année 2008, cela se traduira par une compensation supplémentaire de 600 MD, au titre des hydrocarbures sans tenir compte des 400 MD prévus à cette même fin par le budget de l'Etat de 2008, soulignant que le montant de la compensation directe et indirecte dédiée aux hydrocarbures s'élève à 3,5 milliards de dinars». Et le Premier ministre d'ajouter : «l'Etat ne peut pas supporter la charge d'une compensation de cette valeur sans risquer de compromettre la réalisation de projets de développement». Décryptage : il faut, désormais, prendre son mal en patience et se préparer au 10ème ajustement. Néanmoins, si les pouvoirs publics ont constamment justifié ces ajustements par la flambée du cours du pétrole, à l'échelle internationale, ils ne disent jamais pour combien de dollars la Tunisie importe le pétrole et pour combien elle vend le sien. Pour satisfaire notre curiosité, le rapport de la Banque centrale, exercice 2006, apporte quelques éléments de réponse. Selon ce document, en 2006, la Tunisie a exporté 2,5 millions de tonnes de pétrole, toutes qualités confondues, contre 2,8 millions de tonnes en 2005. A la faveur de la flambée du cours, ces exportations ont crû en valeur, passant de 1.416 MDT à 1.564 MDT en 2006. Le prix moyen de vente du pétrole tunisien s'est apprécié de 9,83 dollars américains le baril pour s'élever à 63,41 dollars contre 53,58 dollars en 2005 et 37,50 dollars en 2004. Au plan de la qualité, ces prix ont varié entre 60,30 dollars et 65,48 dollars. En particulier, le prix moyen du baril à l'exportation a atteint 64,63 dollars pour le Zarzaïtine et 62,03 dollars pour Ashtart (off shore) contre, respectivement, 56,10 dollars et 52,58 dollars l'année précédente. Au chapitre de l'importation, la Société tunisienne des industries du raffinage (STIR) a importé 1,7 million de tonnes dont 1,1 million de tonnes de Libye pour une valeur de 710 MDT. Si une tonne équivaut à 7,3 barils (1 baril : 159 litres), la Tunisie importe en moyenne le baril pour 60 dinars (environ 45 dollars). Conséquence, la Tunisie n'importe pas et n'exporte pas du pétrole ni pour 100 dollars ni pour 140 dollars. Le non dit dans cette affaire c'est que ces ajustements vont dans le sens de la refonte du système des prix préconisée par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international(FMI). La Banque mondiale encourage, particulièrement, ces ajustements du prix du carburant. Ses représentants ne ratent aucune opportunité pour le crier haut et fort. En Tunisie, ce point de vue a été développé exhaustivement dans une communication, faite par le représentant de la Banque mondiale lors de la conférence nationale sur l'énergie (12 février 2008). Globalement, l'institution plaide pour une refonte du système des prix tout en soulignant «la difficulté d'une administration des prix prolongée et la relative inefficacité des subventions, qui bénéficient rarement aux plus nécessiteux». Quant à la stratégie de maîtrise de l'énergie, elle souffre de deux incohérences majeures. Il est certes possible, comme le mentionnait le Premier ministre «d'économiser 20 à 30% de la consommation d'énergie par l'adoption de comportements simples sans que cela affecte ni le confort du citoyen ni la compétitivité de l'entreprise». La manuvre est possible pour peu que les faiseurs de plans, les responsables des collectivités locales, de l'administration et des entreprises publiques en soient conscients et surtout déterminés à agir pour obtenir des résultats concrets. Car, il est inadmissible de voir les municipalités continuer à accorder des autorisations pour bâtir des immeubles en verre, réputés pour être particulièrement énergivores. Il est également inadmissible que le transport en commun continue à assurer seulement 40% du transport des voyageurs contre 80% en Egypte, par exemple. Il faut reconnaître, toutefois, que la prise de conscience des pouvoirs publics de l'ensemble de ces lacunes est assez développée. En témoignent les mégaprojets lancés pour développer, à moyen terme, l'infrastructure de transport, et la réalisation d'une deuxième raffinerie, à Skhira, l'ultime but étant de réaliser l'autosuffisance du pays en produits pétroliers importés, actuellement, au prix fort en devises.