Après une mise en parenthèse d'une année, le célèbre festival de Jazz de Tabarka est de nouveau relancé à la faveur d'une salutaire initiative administrative régionale -bien régionale. La nouvelle, annoncée, samedi 4 juillet, au grand bonheur des férus du Jazz, par les organisateurs du festival, tombe à point nommé pour réparer, un tant soit peu, les dégâts causés à une manifestation qui a pourtant une vocation touristique et qui commençait à s'imposer comme un rendez-vous incontournable des virtuoses du Jazz du monde entier. Pour mémoire, le festival, qui était en fait quatre festivals en un (Jazz, World Music, Latinos, Rai) n'avait pas bénéficié, l'année dernière, de la subvention du ministère du Tourisme. Conséquence : le festival a été purement et simplement annulé. Cette année, la subvention de l'Etat, estimée à 525 mille dinars (500 à la charge du ministère du Tourisme et 25 mille dinars à la charge du ministère de la Culture), pourrait ne pas suffire pour redorer le blason de ce festival, en ce sens où les organisateurs ne peuvent pas faire venir de grosses pointures du Jazz. Le montant souhaité pour mener à bien une édition de ce festival serait de l'ordre d'un million de dinars, 750 mille dinars sous forme de subvention et 250 mille de dinars sous forme de sponsoring. En 2001, la subvention de l'Etat était de 1,4 million de dinars. Depuis, elle a connu un trend baissier. La décision de relancer le festival aura au moins le mérite d'attirer de nouveau l'attention sur cette zone touristique, et surtout, de conforter les habitants de Tabarka dans leur ambition d'associer leur cité à cette belle musique des Noirs américains. C'est à la gloire du Jazz qu'ils ont érigé, dans la cité, de géants saxophones et contrebasse d'une dizaine de mètres de hauteur. Par delà les dégâts générés par l'incohérence administrative et la fâcheuse tendance délibérée de banaliser un festival à sa 45ème édition, il faut admettre en toute honnêteté que la Tunisie, en dépit d'une expertise d'un demi-siècle dans le tourisme, accuse, toujours, un retard fou en matière de businesse des festivals à vocation touristique. Nous sommes, hélas, loin des succès des festivals touristiques du nord de la méditerranée (festivals de Cannes en France, Venise en Italie et autres) et même de ceux de pays comparateurs comme le Maroc et l'Egypte. Les Egyptiens, avec leurs festivals et sons lumières, attirent moult touristes. Il suffit de participer un jour, au pied du Phénix au Caire, à ses manifestations pour s'en rendre compte. Idem pour le Maroc. Toute une stratégie cohérente est mise en place pour organiser régulièrement des festivals à forte composante touristique. Il s'agit des festivals d'Essaouira (musique de transe gnaoua, de Marrakech (cinéma), de Tanger et de Fès (Jazz), d'Agadir (musiques du monde) Ceci étant, il faudrait peut-être voir de près quelle est la contribution financière des pouvoirs publics à ces manifestations pour savoir si ces festivals sont devenus financièrement autonomes ou non. C'est dire qu'il y a beaucoup à faire en Tunisie. Les professionnels recommandent de commencer par la mise au point d'un cadre juridique de la profession d'organisateurs et de producteurs de spectacles, une législation qui tiendrait compte de tous les aspects de ce business, y compris le payement en devises des artistes qui se reproduisent en Tunisie. Tout un chantier à mettre en route. Et ça vaut la peine