Booster le sport national et ses différentes filières pour rester sur la trajectoire, riche en médailles, de notre palmarès national. Le pays a une tradition d'exploits sportifs d'athlètes et de formations qui ont eu le mérite de hisser haut et fort le fanion national. Gammoudi à Mexico, Meryem Mizouni sur tout le continent africain et le pourtour méditerranéen, Oussama Mellouli à Wellington, notre onze national de football à Buenos Aires en 1978, qui ouvre grandes les portes du Mondial à l'Afrique, et tout récemment la sélection de handball qui coiffe le Continent. Le pays a une réputation à défendre. Nous vivons mal les contreperformances de nos sportifs ou de notre sélection. Notre éjection du Mondial et de la Coupe d'Afrique, nous coûte d'autant que le challenge était à notre portée. Ayant été capable du meilleur en sport, pourquoi vivons-nous ces passages à vide ? C'est l'esprit du déjeuner débat du récent "Mardi de l'Atuge" (Association tunisienne des Grandes écoles), de ce 23 février. Et le débat s'est donc focalisé sur le management des élites sportives. C'est vrai qu'il y a là un enjeu de haute compétition. Manager les clubs : concilier entre discipline et passion La réussite dans le domaine sportif, c'est l'affaire de tous. Les clubs ont leur part de responsabilité, dira Youssef Kortobi, ancien joueur, ex-président de la Fédération tunisienne de Hand. Les clubs et associations font pousser les jeunes talents et en bonne logique les font évoluer sur la voie des records et de la performance. Toutefois, leur travail sur terrain est impacté par une grande incidence de l'émotion et de la passion qui sont propres au sport, ce qui les perturbe dans leur effort de discipline. Khaled Sanchou, ex-président de la Fédération tunisienne de foot (FTF) et ancien président du Stade tunisien, évoquera cette forte pression de la galerie et de l'opinion. Lui aussi plaide pour l'assainissement de l'ambiance dans les clubs. Mais également pour la stabilité des collectifs de dirigeants de clubs et de fédération. Dix présidents de fédération en quinze ans, cela ne privilégie pas la performance. Il faut amener de la stabilité pour faire prévaloir la discipline du souffle long. Zied Tlemçeni, grande figure du foot tunisien, ajoutera qu'il ne faut pas négliger la part de «génie sportif» que l'athlète doit puiser en lui-même pour savoir gérer sa carrière et donner le rendement qu'on attend de lui. Et son expérience est assez édifiante. Joueur international, il n'a pas moins terminé des études universitaires, et bien managé une carrière dans trois environnements différents, au Portugal, au Japon et bien entendu à domicile (en Tunisie) Proche de nous encore, on peut citer Oussama Mellouli, universitaire, serial champion. Les trois interventions ont convergé. Il y a de grandes similitudes entre l'univers sportif et le monde de l'entreprise, si on sait relativiser la variable émotionnelle. Et là-dessus, le reportage vidéo de Moncef Triki avec les joueurs du CSS était bien édifiant. Moncef Triki dirige avec son fils Anas un cabinet de Gestion des RH et tout en étant éloigné du monde du foot, il s'y est trouvé embarqué pour une expérience inédite à l'initiative de Moncef Sellami, président du CSS, chef d'entreprise, et qui est habité par la culture de la performance. Et selon les témoignages des sportifs, les recettes du monde du travail ont été bien assimilées par les «travailleurs du ballon rond». Et d'ailleurs cette assertion a servi de bien-fondé à toutes les suggestions émises par les membres du panel qui plaidaient pour un environnement régi par un cadre similaire à celui de l'entreprise. L'appel pour une saine gouvernance des clubs Si les entités sont ressemblantes, les pratiques doivent se rapprocher. Ici et là on a besoin de bonne gouvernance. La nécessaire réforme de l'environnement institutionnel sportif peut très bien puiser dans l'attirail de l'entreprise. La représentativité a besoin d'être revue et «corrigée». Le Département, la Fédération, les supporters, doivent continuer à peser dans la désignation des dirigeants de clubs mais, il y a un impératif de cohérence pour former des équipes homogènes soudées qui favorisent la confiance, dira Youssef Kortobi. Le sport est un univers de valeurs donc l'éthique doit être sauve. Il y a également à revoir le cadre des finances de club pour barrer la route à la tentation, insistera Khaled Sanchou. Les finances, également en sport, c'est le nerf de la guerre et une «intendance» en ordre c'est une grande assurance pour les joueurs. Et le statu des clubs doit pouvoir permettre tout cela. Il faudra bien y venir et donner à un monde définitivement gagné par le professionnalisme un statut juridique dédié. La piste aux champions : une filière globale Il est acquis que le sport national a besoin d'une refondation. Avec amertume, certains intervenants ont eu des opinions «ultra ». On a suggéré de renoncer au foot, où les couacs se succèdent, autant au niveau des clubs que pour la sélection nationale. Mais la situation est rattrapable, disent les panélistes, sous réserve de reconfigurer le système. La piste aux étoiles c'est un tout. Cela commence avec les écoles de formation. Oui c'est le maillon d'où on peut tirer la force de détecter les graines de talents. Après, il faut les suivre, les former et les coacher. Et en l'occurrence l'état est autant sollicité pour plus d'infrastructure et de formateurs. Le partenariat public/privé trouve ici tout son sens. Avec lassitude, on a rappelé que tout cela serait sans issue au motif que les élites sont à l'image des murs et des pratiques populaires. Trop peu de licenciés inscrits auprès des fédérations. Le vivier est trop maigre et peut-être qu'il n'a rien à attendre. Il est vrai que les Tunisiens ne sont pas sport-addict et transpirent peu sur piste et en survêtement. Mais enfin, on a bien sorti un sextuor d'as avec 2000 licenciés en handball. Tout est dans le mental, on vous le répète. Le pays n'est pas une grande nation sportive à l'image des pays scandinaves, soit. Mais il vibre pour les records et les performances. Pourquoi se morfondre et culpabiliser. Dans notre pays tout avance grâce au volontarisme de l'Etat. Nous espérons qu'il sera au rendez-vous, une fois encore. La Olà soulevée par l'Atuge et arbitrée avec fair play, par Dhia Bel Aifa, lors de ce déjeuner débat, trouvera écho. Les aigles de Carthage ont battu de l'aile et on s'est vu reléguer de la 20éme à la soixantième position mondiale. Mais un titre ça se reconquiert, c'est peut-être l'essentiel qu'il faut retenir des valeurs du sport. Allez, balle au centre. La partie continue !