Face à l'inconscience généralisée, l'Etat doit prendre les choses en main. C'est ce qu'a avancé un membre du Harak du 25 juillet, Hatem Yahyaoui, mercredi 28 septembre 2022, commentant les déclarations du président de la République au sujet des restrictions sur les importations pour remédier au déficit de la balance commerciale. Lundi lors d'une rencontre avec sa cheffe du gouvernement, le locataire de Carthage a estimé « insensée » l'importation de certains produits – cosmétiques et nourriture pour les animaux domestiques, notamment – alors que le déficit commercial se creuse de plus en plus. Insistant sur la question de l'approvisionnement du marché en produits alimentaires, notamment, et la lutte contre les spéculateurs, Kaïs Saïed a laissé entendre que les devises allouées à l'importation des produits de luxe devraient être utilisées pour importer de la nourriture. Or, selon les chiffres disponibles, le secteur des parfumeries, par exemple, ne représentait en 2018 que 0,6% des importations tunisiennes, selon une étude présentée par l'Utica pour dénoncer les répercussions de la prolifération de l'informel sur le secteur des parfumeries et des cosmétiques et l'impact de la règlementation et de la pression fiscale. « Rien qu'en parfums et eaux de toilette la Tunisie dépense 50 millions de dinars », a ajouté Hatem Yahyaoui au micro de Wassim Ben Larbi dans l'émission Expresso sur Express FM, notant que les restrictions sur certains produits « non-nécessaires » se feraient progressivement. Il a ajouté que les citoyens devraient faire preuve de sagesse, être conscients de la situation des finances publiques et contribuer à la mobilisation des ressources nécessaires pour clôturer le budget de l'Etat. Estimant que certaines parties ont travaillé après la révolution à torpiller certains secteurs – le phosphate notamment – pour saper l'économie nationale, il a évoqué la question des entreprises citoyennes comme alternative pour remédier aux difficultés auxquelles font face certains secteurs tels que l'agriculture. « Un rassemblement de 20 agriculteurs peut donner naissance à une unité économique capable de produire et de trouver les financements nécessaires à son fonctionnement », a-t-il déclaré. Le déficit de la balance commerciale s'est, rappelons-le, aggravé de 61,25% pour les huit premiers mois de 2022. Il s'est établi à -16.899 millions de dinars (MD) fin août 2022 contre -10.480 MD une année auparavant, avec un taux de couverture en régression de 5,3 points passant de 73,9% à 68,6%, selon l'Institut national de la statistique (INS). Les importations ont, selon la même source, enregistré une augmentation de +34% de par la hausse des importations de l'énergie (+90,2), des matières premières et demi-produits (+38,7%), des biens de consommation (+14,1%) et des biens d'équipement (+11,2%). Réagissant au même sujet, le porte-parole de la Chambre nationale des entreprises des chaînes de magasins spécialisés relevant de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica), Chokri Jarraya, a souligné que le déficit de la balance commerciale venait essentiellement des importations énergétiques du pays. Notant que l'Etat devrait travailler davantage sur ses exportations, il a appelé à promouvoir certains secteurs qui assurent d'importants revenus à l'Etat tels que le phosphate et les pharmaceutiques. Il a dénoncé, dans ce sens, l'anarchie qui règne dans l'industrie du phosphate et les lenteurs administratives au sein du ministère de la Santé pour l'octroi des autorisations de commercialisation des médicaments. Chokri Jaraya a, également, avancé que l'Etat devrait revoir sa stratégie en termes d'importation de blé jugeant inadmissible que l'Etat accorde des aides insignifiantes aux agriculteurs locaux – capables d'assurer l'autosuffisance du pays – alors que des budgets colossaux sont alloués aux importations de blé. Il a signalé, dans ce même contexte, la nécessité de définir les produits dont on n'a réellement pas besoin avant de se lancer dans des restrictions mettant en garde contre les répercussions d'une telle politique sur le marché local. « A chaque fois qu'un produit disparait du circuit officiel, c'est dans l'informel qu'on le retrouve », a-t-il précisé.