L'étiquette d'éternel espoir promis à un grand avenir lui colle décidément à la peau. Msakni ne manque certes pas d'ambition, mais comme dit le dicton, l'ambition n'est pas une volonté de puissance, mais de réalisation de soi. A son corps défendant, il a dû faire l'impasse sur le Mondial, blessure musculaire oblige. Et une fois sa convalescence achevée, Youssef Msakni, taulier incontesté du Team Tunisie, a décidé d'opérer un virage dans sa carrière, passant du Qatar à la Belgique où Eupen n'a pas hésité à miser sur l'incroyable talent de l'enfant terrible du football tunisien. Au stade des balbutiements, personne n'a douté de lui. Et après la période d'adaptation, Msakni se lâche et retrouve sa verve. Ça tombe bien, la CAN se profile à l'horizon et le lutin tunisien tient sa revanche sur un destin capricieux. En clair, l'ex-soliste de l'EST comptait bien laisser derrière lui les coups d'arrêt et les coups du sort pour enfin prendre son envol. Telle une rédemption, cette CAN égyptienne devait enfin révéler Msakni au grand public. Un public exigeant et impatient de voir à l'œuvre un prodige qui peine à atteindre le palier supérieur, celui de l'excellence. Il faut dire que l'étiquette d'éternel espoir promis à un grand avenir lui collait à la peau. Il ne manquait certes pas d'ambition, mais comme dit le dicton, l'ambition n'est pas une volonté de puissance, mais de réalisation de soi. Alors, trouver avec la CAN une scène à sa taille. Voilà une formidable opportunité pour briller et amorcer le virage de la maturité. Pour cette révélation du Mondial cadet de 2007, il était temps d'exploiter tout son potentiel et surtout de se mesurer au must des solistes continentaux, ce florilège de joueurs qui font les beaux jours de clubs huppés en Europe. Et à Msakni de tenter le pari de la justesse, de la finesse en attendant la grandeur. Atteindre les cimes demande des sacrifices considérables mais Msakni manquait encore de rythme faute de cadence soutenue. Nous aurions ainsi aimé lui poser une question toute simple il y a quelque temps. Pour réussir, combien es-tu prêt à souffrir? Car faire face à la souffrance n'est pas donné à tout le monde. C'est l'apanage du compétiteur-né, de l'athlète que rien ne peut perturber. L'on se rappelle à cet effet un certain Zied Jaziri, bouleversant de panache, de volonté inébranlable et de détermination quand sa cheville récalcitrante lui a joué des tours. Cela ne l'a pas empêché de faire preuve de beaucoup de percussion dans son jeu aux côtés des Silva Dos Santos et autres joyaux de la sélection de 2004. Le potentiel ne suffit pas En football, le potentiel ne suffit pas. Entre le cerveau et le corps, le dialogue doit être ininterrompu, en harmonie, en cohérence totale. Passons encore si le talent en est au stade de l'apprentissage. S'il doit tout d'abord affûter ses armes avant l'ascension fulgurante. Or Msakni ne rentre plus dans cette catégorie même s'il a encore tout à prouver. Ce n'est plus un gamin pétri de talent qui ne demande qu'à se faire connaître. En Egypte, certes, il a joué la plupart du temps en complémentarité réelle avec ses compères offensifs. Sauf que ce coup de patte qu'on lui connaît n'a pas envoûté le public de la CAN, loin de là. Bref, pour un prodige qui a brûlé toutes les étapes, sautant, comme on dit, quelques classes au passage, le plus dur est toujours devant lui, à savoir confirmer ! C'est difficile pour un talent précoce de stagner. Et en Egypte, ce fascinant créateur n'a pas concentré sur lui l'attention des puristes. L'on a tendance à être sévère avec le premier de la classe quand il peine à atteindre la moyenne dans une matière. C'est forcément le cas pour Msakni, l'enfant terrible du football tunisien. Ses qualités de vitesse, de puissance, de dribble, de lucidité et de précision sont passés inaperçues. Idem pour ces éclairs de génie qui ont fait sa réputation, sa légende tantôt. A Suez, l'on attendait de lui plus de régularité, de concentration, de maturité dans ses performances et d'agressivité dans l'attaque de son ballon. Et avant les trois coups de la compétition, nous avions pourtant toujours eu cette certitude qui sonnait même comme une évidence. Le réveil a été brutal. Même s'il a marqué face aux Malgaches et touché du bois contre le Ghana, Msakni n'a pas enchaîné au contact des Lions de la Téranga. Certes, à ce stade de la compétition, l'on a pu noter une prise de conscience par rapport aux prestations fournies jusque-là. Mais alors que les nuages se sont dissipés, Youssef Msakni, brassard autour du bras, n'a pu à lui seul porter un Team Tunisie à court d'instinct, de panache et de vision dans le jeu. Avec ses caresses techniques, ses dribbles déroutants et ses décalages astucieux, Msakni restera une valeur sûre du football tunisien. Quant à savoir s'il aurait pu se transcender en terre égyptienne, les spéculations en tout genre tendraient plutôt à infirmer cette thèse, quoique…