Une classe élitiste qui a plié bagage vers d'autres cieux et des pays développés qui l'accueillent à bras ouverts, d'un côté, et un peuple opprimé et bafoué dans ses droits qu'il risque de perdre, de l'autre... Peut-on t'aimer encore ô Tunisie ? Non, la révolution du 14-Janvier 2011 ne nous fait pas que du bien. Le dur apprentissage de la démocratie et la transition démocratique que vit le pays compliquent les choses, en réalité, puisque tout est à revoir, du code pénal aux réglementations juridiques qui nécessitent un long cheminement. Les derniers événements qui ont marqué l'actualité de la scène nationale laissent songeur à plus d'un titre. L'arrestation de Rania Amdouni, militante en faveur des droits des homosexuels et de la communauté LGBTQ, qui écope de six mois de prison pour avoir dénoncé ses harceleurs, a ému l'opinion publique qui se solidarise pleinement sous le slogan: «Free Rania». Dans la foulée, un autre événement macabre s'est produit avec la mort, en pleine arrestation, du jeune Abdessalem, diabétique qui a manqué d'avoir accès à sa dose d'insuline. La Tunisie serait-elle devenue une prison à ciel ouvert ? Les sentiments de résignation ou de désaffection pour le pays se manifestent de plus en plus. Ce n'est pas bon signe car les gens ont l'impression qu'ils ne peuvent plus rien au péril manifeste qui guette la Tunisie des droits de l'Homme et des libertés individuelles. Que de statuts et de publications sur les réseaux sociaux qui dénigrent le climat social et le piétinement des libertés ! Les gens, malgré leur attachement à leurs racines, ont un dégoût pour leur nationalité tunisienne qui perd de la valeur à leurs yeux. Ce sentiment néfaste dure depuis de nombreuses années chez certains et se développe aujourd'hui chez d'autres : «Pays de terroristes, de vendus, de corrompus, d'ignares, d'ignorants et d'incultes !». Des insultes maintes fois entendues qui traduisent un malaise général dans le pays a fortiori. Alors les Tunisiens qui s'exportent le laissent à son propre sort et le vident de son réservoir humain continuellement jusqu'au jour où tout va s'arrêter... On ne peut prédire ce qui va se produire au cours des dix prochaines années même si de nombreuses voix craignent le pire ou le scénario du chaos. En attendant, de nombreux experts avertissent du danger de voir les compétences tunisiennes, notamment dans la médecine ou le domaine de la santé, continuer à s'exporter vers l'étranger. Le secteur de l'éducation a connu un branle-bas terrible également avec le chiffre d'un million d'élèves qui ont quitté l‘école au cours de ces dix dernières années pour subvenir aux besoins de leurs familles nécessiteuses. Le système s'effondre Le pays, qui a basé par le passé son système de développement sur l'éducation et la santé, ce qui est l'apanage de nombreux pays qui ont connu le progrès et le développement, à l'instar des pays asiatiques, voire latino-américains, est en train de tout perdre, à moins de changements radicaux. La République du Costa-Rica, petite terre de cinq millions d'âmes, le prouve encore aujourd'hui en basant son développement sur l'éducation. Pour autant : «Ne te demande pas ce que le pays peut faire pour toi mais ce que toi tu peux faire pour lui», affirmait John Kennedy, ancien président des Etats-Unis durant les années 1960. Cette affirmation laisse perplexe sur le degré des compétences tunisiennes en la matière et remet en cause beaucoup d'acquis. Le travail est-il fait convenablement à tous les niveaux des institutions éducatives et où le bât blesse réellement ? Il faut avouer que les Tunisiens, bons vivants, ne manquent pas de tares : une forme de fainéantise au travail qui pousse à compter sur autrui, un manque de civisme sur les routes, un manque d'esprit citoyen… Loin de l'idée de diviser le monde avec le Nord et le Sud dont la Tunisie fait partie avec toutes les tares que cela suppose, le pays gagnerait à reconstruire son idéologie vers un nouveau modèle de développement pour réécrire son histoire vieille et riche de plusieurs millénaires. La Tunisie a choisi la voie la plus difficile et laborieuse vers le développement et le progrès par le capital humain et le travail, contrairement à d'autres nations qui veulent asseoir leur hégémonie sur la base des seules ressources naturelles et le régime dictatorial, à l'instar de l'Arabie saoudite ou de l'Egypte pseudo-démocratique. Espérons tout de même que les ressources naturelles dont dispose la Tunisie comme l'énergie solaire, les phosphates ou le gaz pourront être exploitées pour accompagner le développement économique et social qui tarde à trouver un nouvel élan. Le flot des mauvaises nouvelles quotidiennes qui ont trait aux grandes entreprises publiques et nationales sont les dettes structurelles à coups de milliers de millions de dinars, donnent le tournis et laissent pantois. En attendant, un climat de sinistrose et de grosse déprime s'installe et brise les liens sociaux aggravés par la crise sanitaire du Covid-19. Il faut miser à nouveau sur l'éducation, le sport et la culture sinon le pays court à sa perte.