Jusque-là chasse gardée du sexe opposé, le trafic des stupéfiants est désormais investi par la gent féminine tunisienne. Le trafic de drogue se féminise de plus en plus en Tunisie. Un exemple tout à fait édifiant en atteste : le démantèlement d'un réseau de dealers conduit d'une main de ... maîtresse par une femme divorcée âgée de 46 ans. Celle-ci, qui ne payait pas de mine, avait transformé son domicile à La Marsa en quartier général où étaient entreposées d'importantes quantités de zatla, de pilules d'Ecstasy, mais aussi de cocaïne. Toujours selon les premiers éléments de l'enquête, il s'est avéré que cette femme était, selon ses propres aveux, à la tête d'un réseau de trafic de drogue composé de six personnes (dont une fille de 20 ans) et qui s'approvisionnait en stupéfiants, via des réseaux internationaux sévissant en Europe et au Brésil. Deux semaines auparavant, les policiers ont réussi à démasquer, du côté de la Cité Ennasr, un autre réseau, en arrêtant ses principaux acteurs, dont justement deux filles qui étaient chargées de la chasse aux clients accrocs à la drogue. Là aussi, la cocaïne était de la partie, ce qui ajoute au drame et à la gravité de l'affaire, dans la mesure où il s'agit d'une drogue dure coûtant très cher. Ces deux exemples suffisent pour aboutir à un constat nouveau, mais ô combien grave, à savoir l'émergence du phénomène de la féminisation du trafic des stupéfiants dans nos murs. Du stade de la consommation à celui de la commercialisation Bien évidemment, il n'y a pas encore de statistiques officielles disponibles pour en savoir plus. Mais il est possible de constater que la gent féminine s'est bel et bien mise à l'heure des stupéfiants, en achevant de passer du stade de la consommation à celui de la commercialisation illicite. Le chef d'une brigade de lutte contre la drogue est allé plus loin, en nous affirmant que «la majorité des dealers en jupons arrêtés ont avoué avoir opté pour ce ''métier'', non seulement parce qu'il génère beaucoup d'argent, mais aussi parce qu'il est plus sûr en comparaison avec la prostitution et le banditisme». Pour Karim Salhi, psychologue de son état, «si ce nouveau phénomène existe aujourd'hui en Tunisie, c'est tout simplement parce que, depuis la révolution, tout est désormais permis, avec notamment la floraison de multiples trafics clandestins et la tentative maladive du gain facile. Plus concrètement, l'absence de discussion juridique, le relâchement sécuritaire qui perdure, ainsi que la vulnérabilité de nos frontières et le manque d'éducation familiale appropriée ne font que donner des ailes à ce phénomène dont personne ne peut prévoir la fin». Remonter les ramifications Le constat est d'ailleurs d'autant plus amer que, selon des sources policières, d'autres réseaux de trafiquants de drogue dirigés par des femmes restent à démanteler. Il est vrai que leur «invincibilité» actuelle tire sa force de trois facteurs principaux, à savoir le profil bas adopté par les dealers en jupons. Celles-ci, pour être au-dessus de tout soupçon, s'habillent élégamment, conduisant leurs propres voitures, résident dans des quartiers chics et fréquentent les hôtels et restaurants huppés. Secundo, l'existence de certaines complicités qui, quelque part, leur facilitent la tâche, et tertio, l'étendue de leurs ramifications. En ce sens que des révélations policières font état de l'existence de liens entre les réseaux tunisiens et des réseaux étrangers. Et là surgit la question-clé, c'est-à-dire la plus importante et, peut-être même la plus embarrassante : comment la drogue est acheminée jusqu'en Tunisie pour finir... par parvenir au domicile d'une trafiquante de drogue?