Sihem Ben Sedrine, présidente de l'Instance vérité et dignité, a occupé le devant de la scène politique nationale tout au long des journées de vendredi et samedi derniers. Elle a organisé son dernier congrès pour présenter les recommandations de l'Instance à l'occasion de la fin de son mandat Au bout de deux jours de débats, personne n'est en mesure de dire qui a droit à une indemnisation et à quel moment elle lui sera servie si par hasard il y a encore de l'argent dans le Fonds Al Karama On attendait beaucoup de la clôture officielle de la mission de l'Instance vérité et dignité, vendredi et samedi derniers. Finalement, au bout d'une journée et demie de débats et au terme de la dernière audience publique consacrée au thème: «Propagande et désinformation», ceux qui ont suivi les deux dernières activités de l'Instance sont restés sur leur faim. La liste définitive des violations, la liste des victimes qui seront indemnisées, les montants auxquels les victimes auront droit, les délais des paiements des réparations financières à leurs ayants droit, etc., n'ont pas été révélés au grand public. On s'est contenté des interventions et des recommandations qu'on annonce généralement en de telles circonstances comme la réhabilitation des victimes, la non-répétition des violations et des anciennes pratiques, la disposition des victimes à pardonner à leurs tortionnaires à condition que ces derniers présentent leurs excuses publiquement (dans les auditions et les enregistrements révélés par l'Instance, on ne trouve aucun bourreau ou tortionnaire ayant accepté de témoigner). Quant aux dossiers présentés par les victimes, ils s'élèvent à 62.716 dont seuls 57.599 ont été retenus par l'IVD qui n'a pas jugé nécessaire de révéler pourquoi plus de 5 mille dossiers ont été rejetés. Les titulaires de ces dossiers rejetés auront-ils l'opportunité de contester la décision de l'Instance ? Personne ne le sait et personne n'est en mesure aussi de répondre à la question suivante : pourquoi seuls 472 dossiers ont été transférés aux chambres spécialisées de la justice transitionnelle ? Idem pour les dossiers déposés par les structures professionnelles, les institutions et les partis politiques qui n'ont pas été transférés aux chambres spécialisées. Dans les réponses aux critiques, les membres de l'IVD ont promis que les propositions exprimées par les participants seront prises en considération dans le rapport final, (comme la proposition de faire du 8 mai de chaque année une journée nationale de lutte contre la torture). Les mêmes responsables de l'Instance ont souligné que le but de la conférence de clôture était de faire contribuer «les participants à l'identification des défis auxquels fait face le processus de justice transtionnelle». Sauf que ces mêmes responsables oublient que l'heure n'est plus à déterminer les défis ou à dénoncer les obstacles à même de faire échouer l'expérience. Il s'agit plutôt d'éclairer les victimes sur les voies à suivre dans le but d'accéder aux indemnisations financières qui leur seront accordées: la grande inconnue n'est-elle pas de savoir quel sort sera-t-il réservé aux titulaires des dossiers soumis à l'Instance (acceptés ou rejetés), une fois la mission de l'IVD déclarée close définitivement. En d'autres termes, à qui s'adresser pour obtenir son indemnisation financière, une fois que l'IVD aura fermé définitivement son siège, début janvier prochain ? La question est d'autant plus inquiétante que les rumeurs les plus fantaisistes ne cessent de courir sur les crédits qui seront consacrés au Fonds de la dignité et de la réhabilitation des victimes. On parle d'une première enveloppe de 10 millions de dinars qui sera servie par le gouvernement (certaines sources prétendent que ces 10MD seront la seule contribution financière de l'Etat au Fonds, alors que d'autres parlent de trois versements de 10MD chacun au maximum) ainsi que de dons qui proviendront de l'étranger et de montants issus du recouvrement des crédits accordés par l'Etat à certains hommes d'affaires accusés de corruption. Il reste, d'autre part, à trouver une solution aux protestataires parmi les victimes des violations qui ont dénoncé la décision cadre publiée par l'IVD sur les barèmes et les critères qui seront pris en considération pour le calcul des indemnisations qui seront servies aux ayants droit.