Enseignants ou suppléants, parents d'élèves, diplômés ou sans-emploi, magistrats, avocats, ouvriers de chantier, qui n'a pas protesté dans ce pays, souvent en ébullition?! Il ne se passe pas un jour ou presque sans que l'on n'entende parler de mouvements sociaux provoqués ici ou ailleurs. Et le Ftdes, à l'instar d'autres acteurs de la société civile nationale, n'a pas cessé de les signaler et les recenser dans ses rapports mensuels. Mais, en vain. L'on assiste, comme tous les jours, d'ailleurs, à une spirale des tensions corporatistes exacerbées, prenant certains secteurs en otage, voire les mettant à genoux. La crise politique ou économique n'est certes pas fatale. Car, cela dépend des demandes et propositions des parties en négociation et de la capacité de chacune d'elles à faire des concessions. Quitte à tourner au vinaigre. Retour de manivelle : tout accord non abouti est censé donner du fil à retordre. Et rebonjour les protestations ! Toujours selon le Ftdes, l'année 2018 a fini sur un bilan lourd : 9.356 au total, à raison de 25 mouvements sociaux par jour en moyenne. Un chiffre de trop. Un véritable raz-de-marée aussi paralysant, ayant la même architecture géographique que les années précédentes. Son épicentre : Kairouan, Sidi Bouzid, Gafsa, Tunis et Kasserine, des foyers considérés comme les plus chauds en Tunisie. Il y a un écart Même constat en 2017 et les années qui l'ont précédée : « 10.452 mouvements contre 8.713 en 2016 », rappelle le Ftdes. Calmer le jeu, c'est répondre aux revendications. Emploi et développement régional en sont prioritaires. L'accès à la santé, l'eau potable et un cadre de vie digne et décent ne sont pas des moindres. En revanche, leur satisfaction nécessite forcément assez de temps et d'argent. Voire des investissements publics et privés pour booster le développement et améliorer l'employabilité. Or, l'Etat, surendetté, n'a pas les moyens de ses ambitions. D'un autre côté, des populations appauvries et des jeunes, désœuvrés, sont livrés à eux-mêmes. Des régions, longtemps marginalisées, n'ont aucunement profité de la discrimination positive, pourtant garantie par la Constitution. Entre ce qu'on veut et ce qu'on peut, il y a, certes, un écart. En termes de marché, la demande sociale dépasse de loin l'offre de l'Etat. L'intérêt général prime Huit ans déjà, les objectifs de la révolution font toujours du surplace. Faut-il un miracle pour s'en sortir? La voix de la raison devrait l'emporter sur la fuite en avant. Tout le pays vibre, ces jours-ci, au rythme soutenu des mouvements en cascade. Aujourd'hui, à l'échelle nationale, journée de colère d'enseignants du secondaire. Un mois plus tard (6 mars), grève nationale dans les écoles primaires. Pourtant, leur ministre de tutelle, Hatem Ben Salem, avait promis qu'il n'y aura pas une année blanche. A ses dires, les négociations vont bientôt aboutir, dans l'espoir de désamorcer la crise. Reste, alors, la grève générale prévue les 20 et 21 de ce mois dans la fonction et le secteur publics. A moins que l'on fasse des concessions. Pourquoi ce statu quo? Et pourquoi ce temps fou perdu si on est finalement condamné à en venir au jusqu'au boutisme ? Et à quel prix ?