Suite à l'horrible affaire dite de l'école coranique de Regueb, un véritable débat public s'est ouvert, que ce soit sur les réseaux sociaux ou sur les plateaux de télévision ou encore sur les bancs de l'Assemblée, avec parfois quelques dérapages et un certain nombre de contre-vérités. Certains Tunisiens semblent découvrir d'un seul coup l'existence des écoles coraniques, or, ceux-là ont de tout temps existé, mais certains font une confusion entre les «koutteb», qui existent depuis la nuit des temps et les écoles coraniques gérées sous forme d'association, qui ont fleuri au lendemain de la révolution. En fait les Koutteb, c'est le schéma classique, ce type d'école coranique n'a jamais dérangé personne. Ces Koutteb relèvent directement du ministère des Affaires religieuses, qui a l'œil sur ces établissements, tout comme il contrôle les discours tenus dans les mosquées. C'est d'ailleurs le ministère de l'Intérieur qui accorde l'accréditation aux Imams et aux «Meddeb» (ces enseignants du Coran). Ces accréditations peuvent de toute évidence être retirées au cas où ces derniers ne respecteraient pas les règles édictées par l'autorité de tutelle. «A juste titre, des prédicateurs envoyés par le ministère dans toutes les régions scrutent soigneusement les discours tenus et le type d'enseignement dans les Koutteb, et signalent tout discours extrémiste», nous explique un imam et enseignant de Coran. D'un autre côté, il y a ce qu'on a appelé par abus de langage des écoles coraniques, là ce sont en grande majorité des associations qui sont créées conformément à la loi régissant les associations. Et comme l'a précisé Ahmed Adhoum, ministre des Affaires Religieuses, lors de son audition au Parlement, ces associations ne relèvent pas des compétences de son administration. Toutefois, elles reçoivent leur visa de la part de la présidence du gouvernement. Mais il est vrai que, une fois le visa en main, ces associations disparaissent pratiquement des radars. Sans droit de regard, les gouverneurs sont parfois démunis. Ils s'en tiennent à leur intuition parfois pour juger s'il faut, ou pas, décider la fermeture de tel ou tel établissement, tout comme l'a dernièrement décidé le gouverneur de Ben Arous à l'encontre de l'école coranique de Fouchena. Mais il est important de savoir que l'exécutif représenté par le gouverneur, n'a plus l'autorité de jadis. C'est toujours à la justice d'arbitrer. Seuls les tribunaux sont compétents pour dire, si oui ou non, ces fermetures sont légales. Mais contrairement aux idées reçues, les écoles coraniques ne sont pas apparues comme par magie au lendemain du 14 janvier. En effet, plusieurs écoles coraniques existaient bel et bien avant la révolution. Certaines avaient à l'époque l'approbation de l'Etat, d'autres étaient carrément clandestines. «Je me souviens déjà que dans les années 1990, ma mère m'a envoyé au Koutteb, dans la région du Sers, raconte le journaliste Aymen Harbaoui. Nous étudions dans un garage exigu dans des conditions exécrables, il n'y avait pas de toilettes et le Meddeb nous tapait avec un long bâton. Je m'en suis plaint à ma mère et j'ai cessé d'y aller, mais d'autres enfants n'ont pas eu cette chance et ont continué à y entrer». L'autre contre-vérité mise en avant cette fois en plein hémicycle, est celle défendue par un certain nombre d'élus du parti Ennahdha qui estiment que la prolifération des écoles coraniques anarchiques serait due à l'absence d'éducation islamique dans les écoles publiques. Une allégation évidemment complètement dénudée de vérité, puisque dès la première année du primaire, les petits bouts de chou ont droit à des cours d'éducation islamiques. Sauf que ce qui fait la différence dans l'école de la République, c'est que l'enseignement respecte les différents âges des enfants. En effet, l'apprentissage se fait petit à petit, sans bourrage de crâne.