Après avoir purgé quelque… 16 ans de prison, retour subit à la raison «Je me sentais longtemps comme incorrigible, mais je m'en blançais éperdument», dit d'emblée H.H, 45 ans, qui a tenu, avant d'accepter de se prêter au jeu des questions-réponses, à ne pas décliner son identité en entier, «non pas par peur, mais par dégoût», précise-t-il. Et il a mille fois raison de l'avouer courageusement. Lui qui traîne un lourd et ô combien triste «palmarès carcéral» avec, tenez-vous bien, une totalité de… 16 ans de prison. Un parcours dont il assure ne vouloir plus s'en souvenir, aujourd'hui qu'il s'est assagi, après avoir fait ses adieux au monde, qu'il qualifie d'infernal, de l'insécurité. «Je ne veux pas, insiste-t-il, remuer le couteau dans la plaie, car cette plaie me fait encore énormément souffrir moralement, pour avoir stupidement perdu 16 ans de ma vie dans les geôles du pays». Jusqu'au-boutisme C'est pourquoi d'ailleurs, on a eu de la peine à lui arracher des aveux qui, bien que servis au compte-gouttes, n'en demeurent pas moins révélateurs d'une triste réalité alimentée par une société jeune, révoltée et constamment en ébullition. Et pourtant, H.H., issu d'une famille nombreuse et pauvre, n'a pas vécu une adolescence agitée dans son quartier populaire. Jusqu'à l'âge de 28 ans, il était un bonhomme sans histoire qui partageait ses journées entre la maison, le café du coin et son boulot de peintre en bâtiment. Il projetait même d'enterrer son célibat après avoir fait la connaissance de sa voisine S. dont il s'est épris follement. Or, le hic est que les parents de sa dulcinée refusaient ses avances de mariage. Ce veto, à force de se répéter, a fini par lui torturer le crâne, et ce qui devait arriver arriva. En effet, par un jour de cafard, H.H. est soudain pris par un accès de colère aveuglant. Direction : un bar de la capitale où il s'offrira une terrible bacchanale qui s'acheva par la prise de la décision suivante : vengeance. Point barre. Un pas qu'il a tôt fait de franchir, en se dirigeant, dare dare, et armé d'un couteau, vers le domicile de sa bien-aimée. Et là, bonjour les dégâts avec, à la clé, le bilan suivant : quatre blessés graves, maison saccagée et début d'incendie heureusement vite maîtrisé par les voisins accourus sur les lieux du drame. Une fois son forfait perpétré dans une crise de démence, H.H. se rendit directement à la police. Déféré devant la justice, on lui infligea une peine de cinq ans de prison. Une sentence clémente dans laquelle a été prise en compte l'absence d'antécédents judiciaires à son passif. «Mon premier séjour en prison, se remémore-t-il, marquera ma vie, tout simplement parce que la population carcérale dans laquelle je vivais, de jour comme de nuit, a fini par me contaminer en me transmettant le virus de la délinquance». Et c'est vrai, puisque la contamination a été telle que, moins d'un mois après sa libération, il se fit arrêter de nouveau pour un délit de braquage sanglant qui a failli coûter la vie à sa victime, une jeune lycéenne qui s'en sortit avec… deux balafres sur le visage ! Retour donc à la cellule de prison pour une nouvelle peine de cinq ans. Désormais jusqu'au-boutiste que rien ne dissuade, H.H. semblait se plaire dans ses navettes entre la rue et l'auberge d'El Mornaguia pour des délits allant de la violence au vol avec effraction, en passant par deux tentatives avortées de braquage. «Durant mon dernier séjour en prison, se souvient-il, j'ai fait la connaissance d'un détenu âgé de 55 ans qui a été incarcéré pour avoir émis des chèques en bois. Un homme d'apparence gentil et honnête, qui m'a appris à faire mes prières, tout en m'incitant à m'assagir». Depuis, H.H ne sera plus comme avant. Recouvrant sa liberté après 16 ans de geôle, H.H a complètement changé aujourd'hui, d'abord en devenant, ô miracle, un être pieux et doux comme un agneau, ensuite, en retrouvant son métier de peintre en bâtiment, et enfin en songeant à refaire sa vie, lui qui est à la recherche d'une… épouse de son âge avec laquelle il pourrait construire un foyer familial.