Que de matches de très bonne facture entre grands et petits clubs sont gravés dans la mémoire des nostalgiques qui éprouvent un énorme respect pour le CSCheminots, l'USMaghrébine, la JSMétouia, l'ASAriana et tant d'autres, pour ne citer que ceux de Tunis et ses banlieues ! Faute de ressources et d'intérêt, les associations sportives, grandes ou petites, sont inéluctablement condamnées à disparaître. C'est dans la logique des choses. Leur vie ressemble comme deux gouttes d'eau à celle des être vivants, des entreprises, voire des nations et des civilisations. Cela se passe de la même manière un peu partout dans le monde et c'est la loi de la nature devant laquelle on est souvent impuissant. Seulement, pour les nostalgiques il est toujours dur de constater la fin ou l'agonie d'un club dont l'histoire et les périodes de gloire émeuvent et sont ressenties avec un pincement au cœur. Durant les deux premières décennies de l'Indépendance, les clubs sportifs, de prédilection footballistique, étaient très nombreux en Tunisie. Chaque grande ville comptait une pléthore de clubs grands et petits appartenant spécialement aux première et deuxième divisions. C'était du temps où le niveau et la qualité du jeu et des joueurs chez les grands clubs dépassait de peu ceux des petits clubs des quartiers et des banlieues avoisinants. La belle époque de l'amateurisme Et rien qu'à Tunis et ses alentours on comptait pas moins d'une vingtaine de clubs de football appartenant aux deux premières divisions nationales. Outre l'EST, le CA, le ST, l'ASM et le CSHL, ils y avait le CSCheminots, l'ASAriana, l'UST, l'USMaghrébine, le COT, la JSMétouia, la JSO, le Stade populaire, Mansoura (Hammam-Lif), l'EOGoulette-Kram, l'ESRadès, l'AMégrine Sports et la liste est vraiment très longue. C'était du temps où l'argent ne régnait pas en maître dans la gestion des clubs car le professionnalisme adopté en Tunisie à la fin des années quatre-vingt et début des quatre-vingt-dix n'avait pas encore été instauré. Avec de petits budgets mais avec beaucoup d'amour pour le club et le cuir rond, nos clubs vivaient dans l'allégresse totale. Tout le monde arrivait à se tirer d'affaire budgétairement sans accuser de déficit dans le rapport financier annuel. Les objectifs et les ambitions étaient à la mesure des moyens des clubs et même des joueurs qui ne rêvaient que d'honorer le maillot qu'ils portaient. On était encore relativement loin des premiers transferts de joueurs appartenant aux petits clubs vers d'autres plus huppés. D'ailleurs, cette fièvre n'a commencé à prendre de l'ampleur qu'au début des années soixante-dix avant de connaître son aspect pandémique de nos jours. Qu'ils appartiennent aux grands ou aux petits clubs, les bons joueurs qui pullulaient dans les deux catégories ne faisaient pas l'objet de la surenchère exagérée qu'on connaît depuis l'avènement du professionnalisme. On pouvait terminer sa carrière dans son petit club sans être tenté par une aventure dans un autre jouant pour les titres. Les opérations de transferts n'étant pas toujours alléchantes. Pour dépeindre un peu cette situation, citons l'exemple illustrateur du match de coupe historique (1977) entre le CA et le CSCheminots joué en l'absence de Attouga et soldé par le score de 4!! buts à 4 au stade d'El Menzah. A l'époque, le petit poucet qu'était le CSC comptait dans ses rangs d'excellents joueurs capables de jouer même en Europe tels que Ali Ghezala, Ammar Nefzi, Ridha Haddad, Naceur Ben Zekri, Bechir Rouatbi, Tahar Larouaki et un certain Habib Gasmi, transféré par la suite au Club Africain. C'était d'ailleurs pareil pour tous les autres petits clubs ayant enfanté des noms de gloire comme la Jeunesse Sportive Omranienne avec ses internationaux Ghommidh et Moussa, l'USMaghrébine et sa fraterie Moncef, Férid et Lotfi Laâroussi ainsi que son illustre régisseur Taoufik Laâbidi (passé à l'EST). Le COT dont la liste des excellents joueurs nécessite des pages entières en est l'exemple le plus édifiant. Aujourd'hui et depuis quelque temps déjà, ces clubs devenus très démunis vivotent péniblement et personne ne semble vouloir les extirper de leur marasme et du destin tragique qui les attend. Tout le monde assiste sournoisement à leur longue agonie. Honteux !