Dans le cadre de sa première édition, la Foire Nationale du Livre Tunisien, qui se tient actuellement à la Cité de la Culture, a organisé ce mercredi 24 octobre un colloque autour du livre tunisien entre le papier et le numérique, auquel ont participé les professeurs éminents Moncef Louhaibi, Mouldi Farrouj et Chedly Ben Zouiten. La séance a été présidée par Mohamed Saâd Borghol. La salle était occupée essentiellement d'hommes de culture et d'étudiants appartenant à l'Institut Supérieur des Langues. D'abord Mohamed Saâd Borghol, l'animateur de la séance, a pris la parole en souhaitant la bienvenue aux conférenciers et à toute l'assistance. Après quoi, il a annoncé le contenu du colloque sous forme de quatre volets : d'abord, le degré de l'intérêt accordé aujourd'hui par les lecteurs tunisiens aux éditions numériques par rapport à celles sous forme de papier, en d'autres termes, quelle est la place du livre tunisien sur le net ? Ensuite quels sont les obstacles qui entravent le livre tunisien d'être diffusé électroniquement ? Puis, dans quelle mesure le lecteur tunisien est-il prédisposé à lire des livres électroniques ? Autrement dit, le nombre de lecteurs du livre électronique sont-ils nombreux de sorte qu'ils incitent les auteurs à éditer leurs œuvres sur les réseaux sociaux ? Enfin, pourrait-on parler d'une complémentarité entre le livre papier et le livre numérique, ou encore arrivera-t-il un jour où le livre en papier sera relégué à un second lieu par rapport au livre numérique qui se propage chaque jour davantage partout dans le monde ? La communication de Mouldi Farrouj, absent pour des raisons de force majeure, a été présentée par l'animateur. Selon Mouldi Farrouj, on a l'impression qu'il y a une course entre le livre en papier et le livre électronique qui rappelle le taxiphone à l'heure de l'expansion du téléphone mobile. Il voit, cependant, que cette concurrence finira par une sorte de complémentarité entre les deux formes d'édition. Nous vivons dans un monde où l'audio-visuel nous entoure de tous côtés, aussi devrons-nous initier nos enfants à ces nouvelles technologies de lecture, si bien qu'il faut numériser les manuels scolaires et les programmes officiels dans l'enseignement, dès l'école primaire. Le livre numérique, a-t-il ajouté, devenu plus accessible et plus facile à manipuler, puisque le lecteur peut, tout en lisant, ajouter au texte des accessoires (images, couleurs, sons…). Comme autres caractéristiques du livre numérique, c'est que sa réalisation coûte moins cher que le livre en papier et que sa propagation est très rapide, à l'échelle nationale et internationale, sans impôts ni droits de douane, ni même de frais d'impression, de stockage et de transport. Il a cité également quelques adresses de sites d'éditions électroniques sur la toile. Il a rappelé qu'un colloque autour du livre numérique a déjà eu lieu en Tunisie, lors de la Foire du Livre de 2009, lors duquel des recommandations ont été formulées en la matière, mais cela n'a pas eu de suite… Le Ministère de la Culture semble intéressé de la question en œuvrant pour un projet de numérisation de certaines bibliothèques publiques, mais il faut encore du temps pour pouvoir le concrétiser à l'échelle nationale. Quant à Moncef Louhaibi, il affirma que nous sommes aujourd'hui, qu'on le veuille ou pas, sous l'influence des nouvelles technologies de communication et qu'un nouveau phénomène, appelé face book, se manifeste et s'amplifie, touchant même à la production littéraire et artistique, devant lequel nos auteurs ne peuvent être insensibles, si bien que plusieurs ouvrages (poésie, roman, nouvelles…) ont été édités à travers face book, ce réseau qui sert de support également aux réactions des autres et à leurs interprétations, leurs critiques ou leurs remarques concernant la production éditée. Sur cette question, il nous raconta son expérience avec Face book et les relations qu'il avait dû faire virtuellement avec une femme inconnue qui, grâce à ses propos et ses entretiens, l'a incité à écrire son livre intitulé « La maitresse d'Adam ».Par ailleurs, il a souligné le fait que le livre numérique peut réunir trois tâches à la fois : voir, lire et écouter. Cependant, a-t-il conclu, nous sommes aujourd'hui en présence d'un livre « hybride » sous forme numérique. Chedly Ben Zouiten a parlé de la situation lamentable du livre-papier tunisien à l'heure actuelle, qui est due essentiellement à la crise de l'édition et de distribution chez nous, ajouté au désamour du livre et de la lecture, notamment auprès des jeunes. Il a soulevé les problèmes relatifs à la lecture en Tunisie, sachant que le nombre des lecteurs est en régression et la motivation à la lecture est insuffisante ou quasi absente, à l'heure où les réseaux sociaux, comme nouveaux supports de l'édition, foncent et prennent du terrain dans notre vie, reléguant à un second degré le livre en format papier au profit du livre numérique. En effet, l'apparition du livre numérique et sa propagation rapide sur les réseaux sociaux ont favorisé sans doute le recul du livre en papier. Il s'est interrogé sur la position du livre tunisien dans ce boom technologique qui envahit le monde de la production culturelle et de l'édition. Certes, a-t-il conclu, la fin du livre en papier n'est pas pour demain : les deux formes du livre vont encore coexister, et pour le moment le livre numérique n'a pas encore tué le livre papier qui reste encore le plus populaire ; mais il est temps de se mettre au diapason de l'ère numérique.