La pièce béninoise «25 décembre» a été présentée lors de la 14e édition du Festival International de Théâtre du Bénin (FITHEB). Une pièce prouvant que les jeunes artistes béninois en ont à revendre, même si leur discours théâtral reste encore axé sur la politique. Heureusement que pour «25 décembre», la mise en scène et la scénographie donnent une autre dimension, voire d'autres dimensions selon l'appréciation… «25 décembre», pièce béninoise présentée au FITHEB 2018, a un discours très politique dans son texte, mais la mise en scène et la scénographie apportent une autre lecture, mêlant réalité, science-fiction et dimensions spatio-temporelles selon l'appréciation. «25 décembre», jour de Noël. Mais, pour Mathilde (Florisse Sèdohoui Adjanonhoun), minuit sonnera l'heure de son exécution. Elle est en prison pour ses convictions. Elle est artiste et cela dérange le pouvoir en place. Elizabeth (Nathalie Bidossessi Hounvo Yekpe), son ex-amie de longue date, vient la voir, comme si elle était une de ces âmes charitables qui ne font la charité que le jour de Noël.En fait, elle vient pour la «purger» et la rallier au pouvoir. Elizabeth, elle, s'est ralliée, depuis longtemps, à l'Etat. Elle a oublié son passé. Mais la confrontation avec la ténacité de Mathilde va, par moment, l'ébranler. Au final, elle campera sur ses positions tout comme la prisonnière, mais tout en lui donnant la chance de s'évader. Le texte de Didier Sedoha Nassegande ne laisse aucun doute sur son intention : faire une réflexion politique. «25 décembre aborde le sujet des responsabilités et des convictions (…)», a-t-il signalé. Des portillons de science-fiction Mais le discours de cette pièce de 75 minutes, production du FITHEB 2018, est soutenu par une mise en scène et une scénographie qui, à elles seules, ont un texte avec dialogues. Didier Sedoha Nassegande, également metteur en scène et scénographe, avec l'aide de Michael Todego, est féru de science-fiction. Cela se sent dans le décor. L'élément principal en est quatre rectangles évidés comme une embrassure de porte. Justement, de portes y en est question.Ces rectangles symbolisant des passages vers plusieurs dimensions comme l'a expliqué le metteur en scène à notre collègue béninoise de dekart.com, Inès Fèliho. Des sortes de portillons de téléportation tel que l'on peut voir dans certains films de science-fiction. Personnellement, nous y avons vu deux autres choses. La première,les carcans dans lesquels s'enferment les deux personnages. Une sorte de boîte, voire de confessionnal, où chacune dit ce qu'elle a sur le cœur. Mais si l'on veut rester dans l'esprit du metteur en scène et dans sa conception de mondes parallèles, pour nous, ces portillons représentent plus des machines à remonter le temps. En effet, que ce soit Mathilde ou Elizabeth, chacune relate le passé, en solo ou en commun. C'est comme si, l'une après l'autre, elles embarquaient dans une machine à remonter le temps verticale pour revivre le passé et l'extérioriser. Mais sans pouvoir le changer. «Une fantaisie responsable» Ces «portillons» étaient interchangeables sur scène. Ce qui a permis de ne pas avoir de statique. D'avoir un mouvement quasi-perpétuel. Ces éléments étaient accompagnés de deux cubes qui permettaient aux protagonistes de s'y poser pour respirer, pour calmer le jeu. Didier Sedoha Nassegandea opté pour deux personnages féminins par«fantaisie responsable». Il s'en est justifié.«(…) Enjeu artistique qui nous conduit à la double peinture sur la femme : la fragile et la forte ; la mère et la fille ; la folle et la prévoyante, parfois même la reine soumise et l'esclave insoumise : toutes ont une conviction et quand elle est profonde, elle est bien tenue». Il faut avouer que la plupart des pièces parlant de politique est interprétée par des hommes, comme «Le chroniqueur du PR» (voir notre article dans l'édition du 24 novembre). Comme si les femmes n'y entendaient rien. Grave erreur d'appréciation ! L'Histoire en est la preuve en quelques exemples : Hatchepsout (pharaonne), Hangbe (reine béninoise), Aroua (Tunisie), Indira Gandhi (Inde), Margareth Thatcher (Grande-Bretagne), ou encore Angela Merkel (Allemagne). Initialement, et outre les deux comédiennes, deux musiciens devaient compléter la distribution de «25 décembre». «Je me suis rendus compte que je pouvais maximiser et gagner des challenges avec les comédiennes. Avant d'aller sur la planche, je rêvais et j'entendais le talking drum dans mon texte. Après plusieurs essais,cela n'a pas répondu comme je l'entendais dans mon rêve de mise en scène. Je n'ai pas forcé», a souligné Didier Sedoha Nassegande. Une absence de musiciens qui n'est pas plus mal car cela aurait sûrement faussé l'essence même de la pièce. D'autant plus que les deux comédiennes n'ont pas démérité.