Le texte de l'auteur congolais (Brazza) Julien Mabiala Bissila, «Chemin de fer», a été mis en scène et interprété par l'artiste haïtien Miracson Saint-Val. Cette pièce, qui a pris un «s» en passant, puisque le titre est devenu «Chemins de fer», et présentée au FITHEB 2018, commence par un monologue pour se terminer en one-man-show. Texte de Julien Mabiala Bissila, auteur congolais de Brazzaville. Mise en scène et interprétation de Miracson Saint-Val, un artiste haïtien. Une pièce entre monologue et one-man-show. Le tout servi au FITHEB 2018. C'est «Chemins de fer» avec un «s» (alors que l'auteur n'en a pas mis). «Mon rapport avec l'histoire, ce qui est raconté à l'autre bout du monde, c'est que cette histoire-là est aussi la mienne. Comme dirait Aragon, le malheur au malheur ressemble. Chemins de fer avec un «s» comme pour signifier tous les lieux éparpillés dans ce monde et qui connaissent chacun, particulièrement, leur chemin de fer», nous a expliqué le comédien et metteur en scène. Il faut dire que Julien Mabiala Bissila et Miracson Saint-Val, bien que l'un congolais et l'autre haïtien, ont connu des similitudes dans leurs pays respectifs : les violences humaines (guerre civile pour le premier, dictature pour le second), mais aussi les catastrophes naturelles notamment pour Haïti. Ainsi Miracson Saint-Val s'est retrouvé dans le texte de Julien Mabiala Bissila, jusqu'à l'épouser jusqu'au bout du style haché de l'auteur.Une folie du personnage qui commence la pièce par un monologue et la fait terminer par un one-man-show. Deux styles différents qui ont dérouté les spectateursà la chute. Deux styles pour appuyer l'histoire que raconte un fou, devenu fou suite à une série de bombardements alors qu'il était médecin dans un hôpital. Un fou qui vient «de là où la mort est l'œuvre du sous-sol». Un fou «cannibale» L'histoire commence par la narration d'un homme qui attend le bus :«Sur la route du pont du Centenaire, un homme est souvent là assis ou debout.Visiblement c'est un fou. Mais, parfois, son accoutrement surprend tout le monde. Des fois, il est habillé si bien et si propre qu'on doute de son jeu (…) On raconte qu'à l'époque cet homme était médecin (…) Moi, j'attends le bus. Il est tard. Un dernier passera peut-être (…) J'attends. Je regarde à gauche si un bus arrive. Je suis surpris par sa présence sur ma droite. Cet homme est si calme (…) Puis une voix. Sa voix sans introduction. Sa voix s'engage dans discours interminable (…)» Un discours interminable qui raconte les corps éventrés dans les couloirs des hôpitaux, l'impuissance, le cauchemar. Une vie de famille tranquille qui éclate en mille morceaux qu'on ne peut plus rassembler. Et le fou raconte jusqu'à s'emparer de son auditoire, l'homme qui attend le bus pour rentrer chez lui.Jusqu'à le faire disparaître en mangeant son âme. Et à la fin, il ne reste plus que l'histoire d'un seul personnage sur scène. Le fou. C'est peut-être pour cela que d'un monologue la pièce est passée à un one-man-show : des larmes au rire. C'est ça aussi la folie. Mais y avait-il vraiment deux personnages ? Peut-être que l'homme qui attend le bus est tout simplement le fou. Un homme qui se dédouble comme pour s'extérioriser. Un double à qui parler ou à écouter parler quand la solitude et l'angoisse rongent le peu de lucidité qui reste. Un double pour s'aider à survivre. De la musique pour survivre Miracson Saint-Val n'a pas démérité, même s'il est difficile d'être à la fois comédien et metteur en scène. Un décor sobre et épuré pour permettre à l'histoire de se dérouler dans différents cadres. Par contre, nous avons eu un peu de mal avec la musique. Peut-être est-ce dû à l'instrument utilisé : une guitare électrique sur laquelle jouait Kerby Jimmy Toussaint. Peut-être qu'avec un autre instrument moins moderne ça passerait mieux. Cependant, il ne faut pas supprimer le volet musical car la pièce, à des moments, est soutenue par cela, permettant également de faire des pauses dans l'histoire. Le metteur en scène a noté l'importance de la musique : «De la musique. Pourquoi ? Pourrespirer. De la musique. Pour survivre. La musique pour échapper à l'obus, pour partager del'espoir(…)».