La pièce rwandaise «Murs-murs» était en compétition officielle. Surclassement dû à la défection du spectacle togolais pour cause de mail en retard de la part des JTC. Peu importe. «Murs-murs» a montré que les femmes pouvaient porter un spectacle elles-seules. Cris de femmes pour rendre hommage à la femme. «Murs-murs» était l'une des deux pièces africaines subsahariennes en compétition aux JTC. La compagnie togolaise, dans la course,ayant pris des engagements ailleurs, n'ayant pas eu de réponse à temps du festival, les organisateurs se sont rabattus sur la pièce rwandaise. Adapté de l'œuvre de la Nigériane Zainabou Jallo, «Onions make us cry» («Les oignons nous font pleurer»), soutenu par des interviews, «Murs-murs» est un ensemble de cris de femmes, porté par deux femmes : Carole Karemera et Cécilia Kankonda, qui ont, également, fait la régie lumière. Malinda a poignardé son mari. Ce n'est pas un acte gratuit. Elle l'a fait pour se sauver et sauver ses enfants. Son époux était violent avec elle. Elle a supporté durant des années. Et une nuit, elle a craqué. Elle a été internée en hôpital psychiatrique, en chambre 1 du secteur 6, en attendant son procès. Lola est médecin clinicienne en psychiatrie. Elle suit Malinda. Au fur et à mesure des jours, une certaine complicité s'instaure entre les deux femmes, qui, finalement, sont le miroir l'une de l'autre. Malinda se verra en Lola, et Lola en Malinda. Et même si les femmes sont en contradiction permanente jusqu'à ce que Lola se rende compte de la véracité des dires de Malinda, puisqu'elle-même les vit avec son mari. Une mise à l'index des hommes et de la société patriarcale «Si la société décide que tu es une femme que les hommes veulent tenir dans leurs bras» (Malinda). «Tu peux les laisser te prendre dans leurs bras, toute la journée. Après tout, ils s'exercent toute leur vie pour avoir des corps forts, des muscles tendus. Et peu d'entre eux veulent réellement embrasser cette énigme que nous sommes et admettre qu'ils n'en connaîtront jamais la réponse (…)» (Lola). «Si la société décide que tu es une femme que les hommes veulent aimer et épouser» (Malinda). «Tu peux les laisser t'aimer et t'épouser (…)» (Lola). «Mais s'ils te touchent violemment, te brutalisent psychologiquement ou physiquement. Hurles, cries, pars en courant. Rappelle-toi tu es femme, tu es peau, os, veines et sang. Et rappelle-toi que chaque jour, des femmes se roulent par terre de douleur, sous les coups de leurs hommes et meurent». Mise à l'index des hommes et de certaines sociétés patriarcales qui écrasent les femmes de part l'éducation qu'elles reçoivent. «Et je me demande si ma lignée et celle de femmes qui rétrécissent», lance Malinda à Lola pour lui faire comprendre que la place de la femme est réduite à zéro. Et quand la femme pleure, elle dit que ce sont les oignons… Le mariage est le royaume d'Hadès. La maison, l'antre du «maître des Enfers». Une pièce, poignante, laide par la violence et la souffrance qu'elle dévoile, belle par le jeu des deux comédiennes et la scénographie. «Murs-murs» n'a jusque-là était jouée qu'en appartements. Lieu clos, intimiste.Ambiance fermée pour symboliser le cloisonnement d'une cellule d'un hôpital psychiatrique. Mais également le blocage dans les esprits. D'où le jeu de mot dans le titre de la pièce… La scénographie, rassemblant les spectateurs autour de l'aire de jeu, a cloisonné également le public. Des images en kaléidoscope pour des vies brisées.