Les signes du temps qui passe, qui peuvent raviner un visage, le marquer comme à l'eau-forte, quasiment le pressurer, le tordre comme un papier qu'on froisse, avec violence ou avec douceur, en l'incurvant par endroits comme si les rides pour s'inscrire sur la face, s'étaient pourvues d'un objet tranchant, trouvent leur exutoire sur les toiles de Hamdi Mezhoudi, qui expose, jusqu'au 7 janvier prochain sur les cimaises d'El Teatro (El Mechtel), ses « Froissés » qui se déclinent sur tous les tons, et qui mettent, surtout à l'honneur, ces figures de la gent féminine dont il sait capter le cœur secret comme personne, en en redessinant les contours en usant de lacis évanescents, qui dénoncent une condition tout en en sublimant la forme. L'attrait est là ; comme le trait, souverain et inquisiteur, qu'il le modèle pour départager un paysage en libérant, dans la foulée, les limites de la toile, ou qu'il en use, à sa manière, dans une logique de dépossession pour que le regard se noie plutôt dans la couleur, les couleurs, avec le choix d'en nuancer la tonalité générale, pour donner plus de crédit à l'épure : ce qu'il réussit plutôt bien. Et alors, le visiteur ne peut que s'arrêter devant l'œuvre ainsi offerte au regard, dans sa quasi virginité et sa candeur, pour se laisser aspirer par le silence qui habite le tableau. Lequel est à son tour, habité étrangement par l'art poético-pictural du peintre. Car le peintre est tour à tour, poète et philosophe, qui interroge l'être et le néant, à travers ces toiles qui sont nées d'un questionnement qui exige une réponse de préférence immédiate : la matérialité des formes peut-être se confondre avec l'immatérialité des âmes ? Et est-ce que la peinture peut voler au secours de cette quête, lorsqu'elle nait de l'idée qu'un visage est forcément un papier qu'on froisse ? Il faut fréquenter vivement la peinture de Hamdi Mezhoudi, pour comprendre qu'il faut des années de macération en poétique picturale, pour qu'un coin du voile se lève pour déchirer mentalement la toile, et vous imprimer un éblouissement. Comme cela n'arrive pas tous les jours, il faut se précipiter pour ne pas rater l'embellie. Elle est réelle…