Il était temps. Il aurait fallu que cela soit fait depuis longtemps, et maintenant que la chose est réglée, l'on ne peut que s'en féliciter. Oui, les enseignes commerciales de Tunis viennent de renouer avec leur identité perdue. Maintenant elle est retrouvée. Quoi, l'éternité ? Sans blague… De quelle identité parle-t-on ? Nos enseignes arabisées, cela leur fait une belle jambe. A nous aussi dans la foulée. Il paraît que l'on doit en tirer beaucoup de fierté. D'avoir retrouvé enfin, le sens des origines. Nos enseignes étaient impies, à l'image de la langue française qu'elles véhiculaient. Aujourd'hui, vertueusement, elles affichent leur appartenance à la grande «Oumma», et ne s'en trouvent que mieux puisqu'elles faisaient, visiblement, un déni qui ne se serait que trop prolongé dans le temps, de leur propre appartenance, jusqu'à en perdre la langue. Ah, la décolonisation sur béquilles claudicantes : ça peut vous handicaper pour très longtemps! Si vous n'y prenez garde. Heureusement que Souad Abderrahim est passée par là! La maire de Tunis peut pavoiser : si l'identité en est sauve, que demande le peuple ? Le peuple justement demande un peu de discernement. C'est ce qui manque le plus, mais, à coup sûr, par les temps, qui courent, c'est une quête désespérée. Et de longue haleine! Comprendre qu'une langue, c'est toujours une richesse de plus. Qu'elle ouvre des horizons, et des perspectives insoupçonnées. Et qu'elle ne se place jamais, par essence, contre une autre langue. En l'occurrence ici la langue officielle du pays. L'arabe est-il antinomique avec les autres langues ? L'est-il, plus particulièrement, avec la langue française ? Rien n'est plus faux. Dans la mesure où, chaque langue, charrie dans son sillage, une vision du monde, autre, toujours nécessaire pour comprendre l'Autre, dans son altérité. Et qu'il y a des passerelles, subliminales et sublimes, qui peuvent faire fonction de catalyseur créatif, pour injecter du sens, du nouveau sens, à l'une ou à l'autre. Rendant plus facile, notre capacité à comprendre le monde où nous évoluons, et à parvenir à nous y sentir plus à l'aise. Beaucoup plus à l'aise, à mesure, que si on fermait portes et fenêtres pour nous complaire à regarder notre nombril, en se demandant pourquoi les murs, bizarrement se resserrent de plus en plus autour de nous ; à nous étouffer. Visiblement, les nouveaux «gardiens» de la ville ne voient pas les choses sous cet angle-là. Ils suivent leur propre regard, ou celui d'une boussole qui va à rebours, jusqu'à ce qu'ils prennent le mur dans la figure. Ils ne s'en doutent pas, mais ils n'auront pas trop à attendre. Ils seront servis dans les temps…