Crise morale ou crise de mœurs ? Depuis quelques semaines, on suit non sans inquiétude, la prolifération d'une vague de déclarations médiatisées, où le vulgaire le dispute à l'ordurier. Jamais jusqu'ici, la scène politique n'était jamais aussi envenimée par des discours de haine et d'irrespect à la personne humaine, et qui, de surcroit, et en l'absence de réaction énergique, semblent passer subrepticement dans les coutumes et les modes d'action non seulement des politiciens, mais de gens que l'on croyait appartenir à une catégorie socioculturelle complètement opposée à ce genre de pratiques. Dans ce contexte de toutes les crises, nous avons eu droit à une campagne de dénigrement systématique dirigée contre la personne et le statut du Mufti de la République, Othman Battikh. Le tort de ce dernier est d'avoir condamné le recrutement de mercenaires parmi la jeunesse tunisienne, pour les envoyer dans les zones de conflit telles que l'Irak, la Syrie et la Libye voisine. Le Mufti s'était soulevé particulièrement contre le recrutement de femmes et de jeunes filles qui semblent servir d'objets sexuels, une fois isolées dans leur exil forcé. Ce ne sont pas des associations de droits de l'Homme qui ont pris la parole, mais un groupe d'individus qui prétendent appartenir à la Zitouna, ce monument religieux et culturel tunisien basé sur la tolérance et le respect de son environnement pluriel, islamique et au-delà. Diatribes ordurières contre le Mufti Une série d'articles publiés par des « docteurs » en des disciplines théologiques islamiques en disent long sur le niveau moral décadent où se débat cette prestigieuse institution millénaire. Du fait d'un groupe d'individus qui veulent s'emparer des institutions religieuses tunisiennes, afin de les soumettre aux programmes et visées de groupes, pour la plupart, classés terroristes par la Tunisie et la communauté internationale. C'est ainsi qu'on trouve un « docteur » spécialisé en matière d'héritage, se répandre en des pamphlets des plus orduriers contre la personne de Othman Battikh et son poste. Allant jusqu'à l'accuser d'apostasie ! Objectif : Substituer leurs élucubrations hystériques à l'institution du Mufti de la république. Pour faire court, ces personnes travaillent sur l'instauration d'un conseil de Choura qui serait habilité seul, à émettre les fatwas religieuses. Inutile de s'attarder sur les milieux qui les utilisent. Par-delà leur programme, ce qui retient l'attention dans ces écrits, c'est le ton foncièrement ordurier de ces « têtes » de pont, lesquels épousent sans vergogne le langage des bandits de quartiers les plus répugnants. On sait que l'islam, ou plus précisément les paroles attribuées au Prophète, mettent un accent particulier sur la morale basée, entre autres, sur le respect des ainés, de leurs personnes et de leur statut. Or, ces « enseignants » de la Zitouna, non seulement ne respectent pas le poste du Cheikh Battikh, ni son âge, ni sa respectabilité académique en tant que l'un des érudits qui a enseigné certaines de ces mauvaises graines, mais cette quantité inestimable de haine que ces personnes déversent sur le Mufti de la république tunisienne, donne à penser à un mouvement bien organisé par une minorité qu'il est temps de faire passer au crible. L'ARP étale ses mauvais instincts Des articles où semble payé, non pas la teneur thématique, mais la dose de haine et de mépris que ces individus vouent à la Zitouna, à l'instar de toutes les institutions de la République, qu'ils entendent reconvertir en Califat, sans plus. Restent que les auteurs de ces diatribes contre le Mufti sont connus par leur appartenance aux courants « islamiques » les plus obscurantistes et les plus rétrogrades, contre lesquels la communauté internationale ne cesse de mettre en garde. En Tunisie, la réaction officielle du Mufti a été le seul garant pour que le pays ne soit pas inscrit dans la liste des Etats terroristes ou abritant des terroristes, une liste qui circule déjà depuis quelques années dans les couloirs diplomatiques de l'ONU et de certaines administrations américaines, européennes, russes et chinoises. Côté officiel tunisien, il semble que l'on est resté à la phase observation passive, tandis que s'égrènent de jour en jour les insultes contre le Président de la République, certains responsables du gouvernement, pour finir en scène publiques de lynchage de députés, comme ce que le député Iyadh Elloumi a débité dans la soirée de mardi 21 avril sous l'Hémicycle, contre sa collègue Abir Moussi. Un scandale de plus à l'ARP, sous le sceau de l'immunité parlementaire. Est-ce à dire que la scène politico-sociale est désormais livrée aux pires instincts, et aux pires pratiques rendant « noble » la bassesse morale la plus immonde, laquelle s'est installée comme un mode d'action « normal » de faire de la politique. Ainsi, aux tensions nées de la pandémie du coronavirus sont venus s'ajouter d'autres virus humains dont la mission semble être la dislocation du système moral de la République de 2011. Pour l'instant, nous ne pouvons qu'attendre que l'Etat prenne en charge ces phénomènes et tendances nouveaux, qui ne cessent de faire multiplier les tensions à tous les niveaux de l'Etat. De la Zitouna à l'ARP, la traçabilité de ce phénomène de la violence et de la haine est la même. De par ses origines et ses modes d'action. Dans quelle mesure devrait-on s'en accommoder ? Nul ne le sait jusqu'à maintenant, à ce qu'il parait.