Ils sont nombreux et presque invisibles. En ce temps difficiles de contagion, de quarantaine et de suspicion, les travailleurs de la première ligne ne sont pas seulement les médecins, les paramédicaux et les infirmiers et infirmières. Ils sont aussi des milliers à trimer tous les jours pour que la vie, notre vie, continue son cours, plus ou moins normalement. Ils méritent beaucoup plus que ce que nous leur consacrons comme attention. Nous avons tous beaucoup focalisé, et nous avons raison, sur « l'armée des blouses blanches » qui a été aux premiers postes dans la longue et difficile lutte contre le Coronavirus. Ils (et elles) ont été formidables, chez nous et partout dans le monde dans leur abnégation et leur courage et leur sacrifice. Cependant, il ne faut pas que nous oubliions toutes les légions des autres travailleurs, souvent dans les pires conditions et qui assurent, eux aussi, une lourde tâche pour la communauté. En premier lieu, il faudrait mentionner les milliers de travailleurs d'hygiène dans toutes les municipalités du pays. Depuis mi-mars, ils sont là tous les jours dans nos quartiers et dans nos rues à ramasser les ordures ménagères qui s'amassent. Au départ, la plupart n'étaient même pas protégés, en dehors de leur combinaison habituelle. Il a fallu un certain nombre de jours pour que les responsables municipaux se débrouillent pour leur assurer les bavettes et les gants nécessaires. Il y en a qui ne sont pas encore équipés surtout dans les petites communes qui manquent de moyens. Ces travailleurs-là méritent qu'on salue tous leur dévouement en ces temps difficiles. Nous nous réjouissons que les commerces de proximité, particulièrement les boulangeries, les épiceries, les marchands des légumes, de viande et de volaille, sont restés ouverts, ce qui nous a permis d'adoucir un tant soit peu notre confinement difficile. Mais, derrière ces commerces-là, où il y a déjà une foule de travailleurs qui assurent quotidiennement nos besoins, il y une multitude de travailleurs qui se lèvent tous les jours et qui sillonnent de kilomètres pour nous approvisionner à partir du marché de gros, des fermes et des usines. Ceux-là aussi affrontent des risques quotidiens et ceux-là aussi méritent respect et remerciements. Si nous avons continué à disposer de l'argent sur nos comptes, si nos salaires, pour ceux qui en ont, et nos pensions ont continué à être versés régulièrement, c'est que des milliers d'employés dans les banques et dans les bureaux de postes, dans les différentes administrations publiques et privées, ont continué à aller travailler tous les jours. Il y a également toute l'armée de techniciens et d'employés dans les secteurs de l'énergie, de télécommunication, de l'eau et dans d'autres domaines vitaux qui nous rendent des services énormes tous les jours. A tous ceux-là, nous dévons aussi remerciements et respect. Le gouvernement a estimé à presque un million et demi de travailleurs qui ont dû continuer à s'échiner pour faire vivre les autres millions de Tunisiens confinés, dont au moins deux millions et demi d'enfants et d'adolescents. Parmi eux, il ne faut pas oublier tous ces policiers, ces agents de la protection civile, ces militaires à qui nous devons beaucoup. Mais il y une foule de travailleurs «indépendants» qui ne sont pas comptabilisés officiellement. Ils sont des ramasseurs de bouteilles de plastiques, des femmes de ménages souvent non déclarées, des travailleurs agricoles (généralement des femmes d'ailleurs) journaliers qui triment dans les champs et dans les fermes pour leur pain quotidien. Tous ceux-là aussi méritent notre reconnaissance et nos respects.