Rassembler des photos prises par les familles confinées pour en faire un album témoignant de cette période: tel est le projet de Lotfi Ghariani qui a l'ambition de créer le plus inattendu des trombinoscopes. C'est aux familles de jouer! A chacune de prendre des clichés de la vie quotidienne durant les jours de confinement pour la partager sur les réseaux sociaux. Avec ce défi, Lotfi Ghariani espère bien rassembler un témoignage global qui puisse de manière décalée, raconter cette période durant laquelle les familles se sont rapprochées, ressoudées et évolué dans une promiscuité oubliée. Un projet documentaire, esthétique et interactif Cette manière originale d'aborder le confinement est à la base du projet artistique interactif de Lotfi Ghariani, un artiste qui agit dans le domaine de la photographie depuis des années et travaille actuellement sur la dimension esthétique du Marché central de Tunis. Confiné ce photographe voulait absolument garder une trac de cette période, documenter ces longues semaines. La tâche semblait impossible car l'impossibilité de se déplacer ne laissait pas beaucoup d'espace aux initiatives. Qu'à cela ne tienne! Ghariani allait trouver la pirouette et un angle d'attaque pour effectuer le travail et obtenir le plus diffus des albums photos. Pour cela, il fallait entrer en contact avec des familles pour qu'elles puissent envoyer leurs photos et obtenir de ces familles des photos où la valeur ajoutée artistique serait présente. C'est désormais chose faite car Ghariani a su mobiliser un réseau de photographes qui ont documenté le vécu de leurs propres familles. Les réseaux sociaux ont fait le reste. Ainsi, durant cette période du Ramadan, une page sur Facebook est devenue la vitrine de ce projet. Nommée "El Marché", cette page permet non seulement de visualiser les photos des familles mais aussi de voter pour les meilleures de ces photos. Chaque jour, après la rupture du jeûne, Lotfi Ghariani publie une photo et invite les internautes à réagir, commenter et choisir. Au final, un classement permettra de sélectionner les clichés les plus populaires. L'interactivité et l'originalité de ce projet ne font aucun doute. De plus la dimension esthétique n'est jamais absente des photographies rassemblées par Lotfi Ghariani. L'ensemble qui est encore en cours de constitution devrait déboucher sur un album pluriel qui sera développé en tant que support numérique et devrait faire l'objet d'une publication. Né durant le confinement, le projet "Photos de Famille" compte parmi les travaux sélectionnés par le mécanisme "Culture Solidaire KLF". Cette initiative de la Fondation Kamel Lazaar a pour but de soutenir les artistes et le processus de création pendant cette période difficile. Comment en étant confiné, créer une archive du confinement Photographe à la recherche de témoignages, Lotfi Ghariani a conçu ce projet en observant les réseaux sociaux durant la période du confinement. Comme il lui était impossible de se déplacer, Ghariani s'est retrouvé face à l'isolement social et aux reflets des réseaux. Ces derniers montraient des recompositions familiales et de nouvelles proximités qui renaissaient entre individus. Cette situation a mené Ghariani à se poser deux questions dont les réponses aboutiront au projet "Photos de famille". Voici les deux questions qui ont poussé l'artiste sur cette voie: Comment les familles tunisiennes passent-elles leur confinement? Et aussi comment créer en étant soi-même confiné, une archive photographique du confinement? Pour répondre à ces urgences, Lotfi Ghariani a élaboré son projet en trois phases. La première consiste à rassembler des photos prises par les membres des familles elles-mêmes durant le confinement. La seconde phase du projet verra ensuite le photographe se rendre chez ces familles pour prendre lui-même des photos. Enfin, en un troisième temps, les photos collectées ou créées seront rassemblées dans un album photo des familles tunisiennes en mode confiné. Actuellement en cours de réalisation, ce projet a été sélectionné par le jury de "Culture Solidaire KLF". Ainsi, dès la fin du confinement, Lotfi Ghariani devra faire le tour des familles qui ont participé au projet avec leurs photos. Il prendra le temps de photographier chacune d'entre elles pour nourrir le second versant de sa démarche artistique. Photographe, Lotfi Ghariani a souvent exposé en Tunisie et à l'étranger. Il a pris part à de nombreux ateliers de photographie en Italie, en Allemagne et en Espagne. Il a réalisé deux expositions personnelles: "Dialogue silencieux" à Duisburg en Allemagne (2015) et "Democracy is not a ready to wear" à Amsterdam (2016). Par ailleurs, il travaille actuellement sur un projet photographique intitulé "Intersections" et qui aura pour cadre le Marché central de Tunis.