Annoncée tambours battants, Le magazine hebdomadaire « Echappées Belles » sur Fr 5 a consacré son numéro du samedi 11 juillet à la Tunisie, intitulé « La Tunisie, le soleil de la Méditerranée ». Un magazine de voyage et de découvertes, qui met en valeur les destinations choisies ; la Tunisie a été plusieurs fois le thème de cette émission. Ce documentaire de 87 minutes vaut son pesant d'or et surpasse de par sa diffusion et sa notoriété, toutes les promotions réunies, conçues par le département du Tourisme tunisien. Les sujets mis sur le pavois sont : L'éco-Tunisie, la Tunisie au féminin, Immersion dans les îles de Kerkennah, La revanche de l'artisanat kitch, Tunisie romaine, Au sud, il y a les chameliers. Le choix de la date de diffusion n'est apparemment pas fortuit ; il a été décidé à ce moment délicat où la destination vit une descente aux enfers et que les professionnels doutent de l'avenir du secteur. La France, zone verte, (aucune restriction d'entrée en Tunisie) « Le pays est « safe», clament les responsables tunisiens, « allez en Tunisie », répondent les responsables français, les médias relaient l'appel, le geste flatte l'amitié entre les deux pays. Le présentateur Jérôme Pitorin est charmant, aimable et ne manque ni de sourires ni de vocabulaire éclairé d'adjectifs exquis sur le pays (petite perle du Maghreb...). Il connait la Tunisie comme peu de personnes la connaissent, il y est venu à plusieurs reprises. Quel angle allait-t-il choisir pour ce nouvel opus ? Exit les palaces somptueux, le luxe des spas et cures de thalassothérapie ; on ne verra pas non plus les plages au sable fin et la mer des bassins touristiques (Hammamet, Sousse et Djerba), non, le reporter sort des sentiers battus, il choisit l'angle du tourisme solidaire, de proximité, écologique ; bref durable (c'est la tendance après le Covid-19). La Tunisie ce n'est pas uniquement la mer, les plages, c'est aussi la montagne, la verdure, les champignons, les randonnées à cheval. Autant dire que le reporter, préfère le voyage au tourisme de masse, la nuance est remarquable. Le reportage est antérieur aux convulsions sociales actuelles, à la régression économique et évidemment avant la quasi faillite du système politique. L'émission évoque des visiteurs qui reviennent de plus en plus nombreux et, tenez-vous bien, « Des Tunisiens tournés viscéralement vers le renouveau et l'avenir de leur pays ». Ce constat replanté aux temps actuels fait plutôt rire ou pleurer, selon l'humeur du jour. L'incontournable Sidi Bou Saïd, « inspirant pour les artistes » ouvre le reportage, « Le Café des délices », une vue sur la Méditerranée bleue, par temps calme, sans rides, le majestueux Boukornine au fond et un ciel d'été, bien décrit par la musicienne Syrine Ben Moussa qui fera le guide plus tard pour la médina de Tunis. Suivent des virées en régions, le patrimoine naturel, un olivier classé au patrimoine immatériel de l'Unesco, une initiative d'éco-tourisme, les eaux pures et les figues de Kesra, à Tataouine ou Tatooine (pour évoquer Stars Wars), Chenini et son fabuleux village troglodyte, Bizerte, son fort et sa mer où une association initie à la plongée pour ramasser les déchets jetés en mer, Tunis et sa médina, etc. Quatre-vingt-sept minutes plus tard, le rêve prend fin, se défile devant le téléspectateur les images d'une jeunesse qui porte les projets innovants, des artistes qui réinventent l'artisanat, la nature et la mer respectées par l'homme. Là s'arrêtent ses pensées, il n'aimerait pas redescendre sur terre, revivre l'enfer annoncé par les chiffres économiques (baisse de 6,5% de taux de croissance, un endettement qui dépasserait les 85%, signale Nizar Yaïche, ministre des Finances le 13 juillet) sur fond de scènes de cirque à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), et le quotidien cruel des laissés-pour-compte, écrasés sans cesse par les mauvaises nouvelles, qui ne trouvent même pas l'occasion de rêver. H.H.