Depuis son ouverture au mois d'avril 2010, le Centre International d'Art et de Culture Dar Chérif à Sidi Jmour, ne cesse de proposer des spectacleshauts de gamme, alternant danse et musique, pour le plaisir et le bonheur des mélomanes passionnés, au goût raffiné, de plus en plus nombreux dans l'île. Disposant également d'une galerie d'art, le Centre a abrité par le passé deux importantes expositions de peinture de haut niveau à la résonance remarquable, et il vient d'ouvrir son espace à partir du 03 mai à l'exposition inédite consacrée à l'œuvre d'Otto Dix, en présence de M. Mehdi Mabrouk, Ministre de la Culture. Placé sous le patronage du ministère de la Culture et du Goethe-Institut , cet événement présente une autre occasion au public en Tunisie féru de peinture, après l'exposition au palais Kheireddine à Tunis en 2005, de voir des œuvres originales du célébrissime peintre allemand Otto Dix (1891-1969). Une cinquantaine d'œuvres entre peintures, dessins et gravures, qui resteront à la disposition du public jusqu'au 10 juillet, le temps qu'il faut, en somme, pour venir admirer les chefs-d'œuvre de ce grand artiste peintre considéré comme le chef de file de l'expressionnisme allemand, antimilitariste, profondément marqué par les deux guerres mondiales auxquelles il prit part. Il fut une figure prépondérante du courant artistique de la Nouvelle Objectivité qui influa significativement sur le regard qu'il portait sur la société de l'entre-deux-guerres en proie à un profond malaise et pessimisme, un regard réaliste, souvent acerbe. Ses œuvres sont, en effet, une parfaite illustration des horreurs de la guerre, des visages brisés d'anciens soldats réduits à la mendicité, de la misère morale des prostituées victimes d'un ordre social déprimant et déboussolé. Ses portraits d'inconnus, de la bohème et de l'intelligentsia, et ses autoportraits sont saisissants, d'un réalisme brutal qui dérange autant qu'il fascine. Cette violence dans le trait, cette âpreté dans le regard et ce pessimisme dominateur qui transparaissent sous sa plume firent de lui, aux yeux des nazis, un élément subversif et démoralisateur, qui lui valut d'être destitué de ce fait de sa chaire et exclu de l'Académie Prussienne des Arts à Berlin, et à ses œuvres d'être retirées des collections publiques, ou en partie brûlées. Certes, c'est un plaisir et un honneur pour le Goethe-Institute et Dar Chérif d'avoir rendu possible la tenue d'une telle exposition qui n'aurait pu avoir lieu sans la précieuse contribution de la galerie Hegau Bodensee, propriétaire des œuvres du peintre allemand, qu'elle a mises à la disposition de Dar Chérif dans un esprit désintéressé de pur échange culturel entre l'Allemagne et la Tunisie, mais le plaisir et le bonheur des férus de peinture , venus nombreux, étaient manifestement immenses, plus grands, et perceptibles lors de l'ouverture de l'exposition, tant sur les visages que sur toutes les lèvres.