L'entreprise tunisienne qui est le pouls battant du système économique et la source intarissable à créer des richesses, croupit des années durant sous le joug destructeur des difficultés structurelles et conjoncturelles menaçant la pérennité des unités productives tunisiennes pour aboutir à leur extermination. L'environnement socio-politique post-Révolution dans lequel se débattent nos entreprises n'a fait qu'envenimer la situation. Les tensions politiques, les revendications sociales, la montée de la menace terroriste, ajoutées aux facteurs exogènes liés notamment à la crise européenne et à la guerre en Libye sont en train de hâter l'extinction inéluctable de plusieurs entreprises. Jusque-là la loi 95 régissant les entreprises en difficulté a montré ses insuffisances et ses limites. Un nouveau projet de redressement des entreprises en difficulté a été dès lors présenté auparavant à l'ANC, et le revoilà représenté à l'ARP pour être prochainement examiné. Un projet de loi controversé, considéré par ses détracteurs comme un outil démolisseur au lieu d'être un socle galvanisateur de l'entreprise. Une loi a priori prescrite par la Banque Mondiale tout comme les autres projets de loi en suspens et sujette à équivoque. La disparition ou la faillite d'une entreprise est généralement corrélée à son incapacité absolue de s'acquitter de ses dettes auprès de ses créanciers notamment la banque, les fournisseurs, le fisc et les caisses sociales. La loi 95-34 du 17 avril 1995, relative au sauvetage des entreprises en difficulté, telle que amendée par les textes subséquents en 1999 et 2003, a institué trois procédures de grande importance en faveur des entreprises en difficultés à savoir : le système de notification des signes précurseurs de difficultés, le règlement à l'amiable et le règlement judiciaire. Un système qui a montré toutefois ses limites. Après 20 ans d'existence quelque 3000 entreprises ont bénéficié des dispositions de ladite loi dont 24%, soit 720 entreprises ont été déclarées en faillite et 1200 entreprises ont profité du programme de redressement. Les limites de la loi 95 Finalement, le recours au redressement judicaire de l'entreprise n'a pas toujours été heureux et favorable pour les entreprises citoyennes et transparentes, celles qui ont résisté au système de Ben Ali et qui ont gardé leurs distances vis-à-vis des pratiques malhonnêtes de la corruption et autres circuits douteux. Pour certains, la loi n'est qu'un fourre-tout qui n'a en aucun cas servi les intérêts des entreprises en difficulté. La loi telle que amendée en 2003, visait essentiellement la protection de l'intérêt des créanciers, en premier lieu les banques et nullement l'entreprise. En effet : l'amendement de 2003 a été élaboré suite à une recommandation du conseil ministériel restreint du 12 avril 2002 faite sous la pression du système bancaire qui a justifié l'accroissement des créances accrochées au recours abusif de beaucoup de chefs d'entreprises à cette loi juste pour éviter de s'acquitter de leurs dettes et bénéficier ainsi de la suspension des poursuites judiciaires. N'est il pas risqué pour un chef d'entreprise en difficultés de recourir à la loi relative au redressement quand il sait que les institutions financières ont été autorisées depuis 2007 à provisionner leurs créances dès l'ouverture des procédures de règlement amiable ou judicaire et de ce fait elles ne peuvent plus continuer à financer les entreprises en difficultés inscrites à la loi sur le redressement. Dans les meilleurs des as, il pourrait espérer du recours à cette loi, celui d'aboutir à un plan de rééchelonnement de ses dettes. Peut-on à juste titre confondre et traiter pêle-mêle et faire l'amalgame de tous les dossiers et tous les hommes d'affaires dans le même contexte vague et flou ? Ne faut-il pas sauver l'entreprise au lieu de la condamner à mort et perdre des milliers de postes d'emploi? Aujourd'hui, quatre ans après la Révolution les entreprises en difficulté sont en droit de revendiquer une révision qui soit constructive et réaliste de cette loi. Or, les premiers échos sont défavorables et nombreux experts pensent que cette loi qui sera présentée bientôt à l'examen ne concourra en aucun cas au sauvetage de l'entreprise mais conduira inexorablement à sa perte. qu'en pensent les hommes d'affaires et les experts de cette loi ?