A Fernana, petit village magnifique de la région de Jendouba (nord-ouest de la Tunisie), les centaines de sources d'eau naturelles et artificielles (sources, barrages, lacs) rendent difficile à croire les chiffres des Nations unies sur la pénurie d'eau en Tunisie. Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), la Tunisie se trouve sous le seuil de stress hydrique avec 450 mètres cubes d'eau par an et par habitant. Le pays dispose, cependant, d'une riche infrastructure hydraulique avec plus de 37 barrages (capacité totale de 2,5 Km3), 230 barrages collinaires, 950 lacs collinaires et 138 000 puits fonctionnels depuis 2017, selon Fanack water.com. La moyenne annuelle de la pluviométrie en Tunisie s'élève, selon le ministère de l'Agriculture, à 36 Km3, avec des quantités de précipitations variant entre 1 500 mm dans les régions du nord et moins de 100 mm dans le sud. 80% des précipitations sont enregistrées pendant la période allant du mois d'octobre à mars. Ironie du sort ! Bien qu'il s'agisse de la région où les quantités les plus élevées de précipitations sont enregistrées avec une pluviométrie annuelle supérieure à 1000 millimètres, des milliers d'habitants des petits villages autour de Fernana, et dans la région du nord-ouest, souffrent d'une grande pénurie d'eau et n'ont accès à l'eau potable, que dire de celle destinée à l'irrigation. “Ce paradoxe témoigne de l'échec cuisant des politiques publiques en matière d'eau, de la mauvaise gestion de la distribution de cette ressource ainsi que du manque de volonté politique à résoudre ce problème”, estime Alaa Marzougui, coordinateur de l'Observatoire tunisien de l'eau (OTE), une ONG tunisienne créée le 22 mars 2016, à l'occasion de la Journée mondiale de l'eau. Selon Marzougui, environ 250 000 personnes en Tunisie n'ont pas accès à l'eau. Un chiffre qui pourrait s'avérer bien plus élevé en réalité, car, comme il le précise bien, “les statistiques disponibles sur l'approvisionnement en eau ne sont souvent pas très précises et devraient être revues”. “Pourquoi les habitants de Fernana et d'autres villages de Jendouba, ne bénéficient-ils pas du réseau de la SONEDE, d'autant plus que les sources d'eau sont proches et que le coût du raccordement sera certainement, moins cher que les opérations de transfert d'eau? Ce sont des citoyens tunisiens qui paient leurs impôts et qui ont droit à l'eau. C'est même l'un de leurs droits fondamentaux”, a-t-il lancé. Selon lui, l'accès des citoyens à leurs droits les plus fondamentaux ne doit pas répondre à la logique du coût et l'Etat aurait mieux fait de comptabiliser les coûts des services et produits importés. ” Les autorités sont tenues de garantir l'accès à l'eau à tous les citoyens, même quand il s'agit d'une seule famille vivant dans un endroit isolé”, a-t-il déclaré à TAP.