Le professeur de droit public, Sghaier Zakraoui a expliqué que la prolongation des mesures exceptionnelles était prévisible et quasi-automatique puisque la situation sécuritaire a empiré et qu'il y a eu des menaces terroristes extérieures. « La prolongation peut durer des mois. La supra-constitutionnalité prime sur la légalité », a-t-il ajouté. Lors de son passage sur les ondes de la radio Shems FM le 24 août 2021, Sghaier Zakraoui a affirmé que la menace d'un groupe se trouvant en territoire libyen était réelle. « Le ministère libyen de l'Intérieur ne contrôle même pas son département », a-t-il affirmé. Pour ce qui est de l'Assemblée des Représentants du Peuple, le professeur en droit a estimé qu'il n'y aura pas de retour de l'activité parlementaire. « Même si les élus ont perçu leurs salaires, le parlement a été implicitement dissous. L'affirmation de non-retour en arrière de la part du président est un message clair à ce sujet », a-t-il poursuivi. D'un point de vue juridique, Sghaier Zakraoui a considéré que le président de la République devrait adopter un texte d'organisation provisoire des pouvoirs. « C'est la seule solution offrant un fondement juridique à la création d'un nouveau gouvernement. Ce gouvernement sera responsable vis-à-vis du président de la République et non pas du parlement ce qui veut dire que ce dernier n'a plus lieu d'exister… Le président de la République avance pas à pas en raison des pays voulant préserver le parlement comme élément de décor démocratique », a-t-il insisté. D'après lui, la Constitution de 2014 comporte plusieurs failles et contradictions. « L'article 6, par exemple, visait à résoudre un conflit au sein de l'Assemblée Nationale Constituante… C'est absurde… D'un point de vue légistique, le texte ne peut pas être qualifié de Constitution. On dirait que nous avons élaboré un traité de droit constitutionnel… Il n'est pas cohérent et c'est pour cela que nous devons aller vers l'élaboration d'une nouvelle constitution par une commission spéciale… La nouvelle Constitution doit poser les fondamentaux du système tunisien et des libertés… On pourrait reprendre la Constitution de 1959 en apportant des modifications et en annulant les révisions opérées par Ben Ali », a-t-il déclaré. Sghaier Zakraoui a, également, affirmé qu'il n'y a pas lieu d'avoir peur de retourner à un régime totalitaire ou à une dictature. Il a estimé que l'éveil politique des citoyens et la réactivité de la société civile ne permettra pas cela. « Nous devons être méfiants, mais sans pour autant avoir peur », a-t-il poursuivi.
Par la suite, le professeur de droit a exigé que la nouvelle Constitution, ainsi que la loi électorale, devront être soumises à un référendum. « Il est possible d'opérer une révision de la Constitution de 2014. Je pense que cela ne peut pas avoir lieu en raison des crises que ce texte a causé », a-t-il dit. Sghaier Zakraoui a, aussi, considéré que la réforme doit porter sur la législation en vigueur applicable aux associations et au financement des partis politiques ainsi que le fonctionnement de l'Instance Supérieure Indépendante pour les Elections qui n'as pas sanctionné les élus et partis ayant enfreint la loi. « De plus, la Cour des Comptes aurait dû révoquer plusieurs élus », a-t-il ajouté. Pour ce qui est de la justice tunisienne, Sghaier Zakraoui a affirmé que celle-ci était au service des partis au pouvoir et non pas du peuple. Il a souligné l'importance de réformer et réviser la loi réglementant le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM). « Le président de la République doit nommer un ministre de la Justice qui aura à opérer cela », a-t-il estimé. Par ailleurs, citant Yadh Ben Achour, Sghaier Zakraoui a critiqué l'attitude de certains affirmant qu'il est le seul véritable expert en droit Constitutionnel depuis 2011. Cette personne se considère l'interprète unique de la Constitution. « Par la suite, il s'est révélé que cette personne n'a jamais enseigné le droit constitutionnel… Il a créé un monstre à travers le système qu'il a mis en place depuis la révolution », a-t-il déploré. Il a, ainsi, expliqué que le changement s'est également invité chez les juristes et constitutionnalistes. « Nous marchons vers la rupture avec la monopolisation de l'interprétation », a-t-il conclu.