Après l'investiture de son parlement, Kaïs Saïed franchit un grand pas vers l'instauration de son nouvel « Etat», il ne lui reste que la mise en place du composition du Conseil national des régions et des districts pour tirer un trait final sur l'ancien régime. Quel est le secret de cette force qui lui a permis d'écraser sur son chemin, sans grande peine, instances, corporations et puissants syndicats de police ?
En partie, sa réussite s'explique par sa mainmise sur les rouages judiciaires et sur les médias resserrant ainsi l'étau sur ses adversaires. Il n'est pas arrivé au point de dissoudre les partis politiques, mais de fait, il n'a pas cessé de leurs rétrécir les espaces d'expression et d'action en négligent leur rôle dans le schéma de son nouveau régime. Car, il n'a jamais mâché ses mots en rejetant la responsabilité du « désastre » de la décennie antérieure sur toute la classe politique, l'accusant de complots et de corruption.
Aujourd'hui, il y a plus de doute sur le fait qu'on glisse directement vers le régime de la construction par les bases, une forme de « conseillisme » - ou de « khadafisme » comme disaient certains. Mais, tout le monde est impuissant face à ce glissement vers l'inconnu. Même le mince espoir de recourir à un dialogue national pour trouver des alternatives consensuelles limitées à la « famille 25-Juillet » s'est évaporé comme le présentaient certains. L'UGTT, initiateur de la proposition du dialogue national, s'est vu recevoir deux coups durs de la part du président de la République en expulsant du pays deux de ses invités, dirigeants syndicaux internationaux. Les rumeurs circulent, d'ailleurs, dans les alentours du Président, parlant d'un dessein obscur visant à réduire le rôle et l'autonomie de l'organisation syndicale, voire sa mise sous la tutelle du pouvoir. Il existe, dans l'histoire, des exemples où des Hommes pour lesquels la voie a été facile afin d'atteindre leurs objectifs. Mais, cette facilité peut devenir trop dangereuse quand il s'agit du destin d'un pays et d'un peuple.
La fougue populaire peut donner l'illusion d'avoir des ailes pour survoler le monde entier, mais elles risquent d'être en cire comme celles d' « Icare » et de fondre au premier contact avec la chaleur de la réalité.